Saâdane et Raouraoua ont promis de le protéger au sein de l'équipe Le feuilleton Lacen semble avoir remplacé ceux des Egyptiens dont on s'est débarrassé avec grand plaisir. L'Algérie entière est aujourd'hui suspendue à la venue du milieu récupérateur de Racing de Santander, mais surtout à la manière avec laquelle il sera accueilli par ses nouveaux coéquipiers. Va-t-on le marginaliser et lui réserver de sales coups comme cela se fait dans toutes les équipes du monde ? Ou le bon sens va-t-il prendre le dessus sur les frustrations pour permettre à l'EN de grandir un peu plus et se renforcer ? La question restera sans réponse tant que Lacen n'a pas rencontré Yahia, Bougherra et ceux qui ont levé leurs boucliers pour lui signifier qu'il ne sera pas le bienvenu, aussi facilement qu'il pourrait le croire. Saâdane et Raouraoua ont promis de le protéger au sein de l'équipe Mais peut-on avoir des craintes à ce sujet, après les garanties qu'ont données Saâdane et Raouraoua à Lacen ? Bien sûr que non, car le coach tout comme le président ont montré une grande fermeté à l'égard de ceux qui espèrent lui pourrir son séjour parmi les Verts. Et connaissant le caractère de l'un et de l'autre, nul doute que le premier qui voudrait afficher une quelconque hostilité à l'endroit de Lacen sera remis à sa place illico presto. C'est ce qui rassure le plus dans cette histoire sur laquelle nous avons voulu revenir depuis le premier contact avec le joueur de Santander et dont Le Buteur a été le seul à qui Lacen a fait confiance à ce jour. Il avait «hésité» pour un problème épineux lié à l'obtention de son… passeport ! Le moins que l'on puisse dire est que, depuis la toute première interview qu'il nous avait accordée, Lacen est resté cohérent dans ses déclarations à ce jour. Bien que le public n'ait pu comprendre ses hésitations, Lacen a préféré montrer profil bas, ne brusquant personne et ne répondant jamais à ceux qui doutaient de son algérianité. Mais qui pouvait comprendre qu'il avait en fait un problème administratif assez épineux à régler avant de rejoindre l'EN ? En l'absence de cet élément important, l'opinion publique ne pouvait que le critiquer sévèrement tellement il donnait l'impression qu'il voulait nous faire languir. Et malgré les assurances de certains responsables du football national, personne n'a pu lui régler le problème de son passeport depuis tout ce temps. La preuve, c'est qu'il ne l'a obtenu qu'un an plus tard. La malchance d'un emploi du temps bousculé Avec les promesses qu'on lui avait faites, Lacen devait venir déjà en décembre dernier avec son passeport français, pour rendre visite à sa famille et se familiariser un peu plus avec l'ambiance du pays. Mais ce voyage n'a pu se faire en raison d'une série de mauvais résultats de son équipe, ponctués par une défaite en fin d'année qui a poussé son coach à «punir» les joueurs en les privant de quatre jours des vacances d'hiver. Manque de pot, Lacen devait justement profiter de cette période pour venir à Alger. Il devait en plus accompagner son épouse et sa fille à Laval, en France, avant d'aller en Algérie. Ce qui était pratiquement mission impossible. Si Saâdane avait vu un rictus hautain, il l'aurait envoyé balader illico En revanche, il avait eu une discussion avec Saâdane et lui a exposé son cas, lui expliquant qu'il n'avait jamais mis les pieds en Algérie et qu'il voulait d'abord connaître sa famille avant de venir honorer sa première sélection. Les arguments qu'il avait alors développés devant le coach étaient très cohérents, au point de convaincre le sélectionneur de sa bonne foi. Saâdane avait pris le temps de l'écouter et analyser l'expression de son visage pour être sûr que Lacen ne prenait pas de haut l'EN. D'ailleurs, si Saâdane avait vu ne serait-ce qu'un rictus hautain, il n'y a pas de doute qu'il l'aurait envoyé balader sur-le- champ. Saâdane : «Lacen est un garçon bien élevé et il joue bien au football» Mais le patron des Verts avait toujours gardé cette image de Lacen qu'il exposait à chacune de ses réponses aux questions des journalistes : «J'ai eu une discussion franche avec Lacen et je peux vous assurer que c'est un garçon très bien élevé qui désire bien venir en équipe nationale. Il m'a expliqué sa situation vis-à-vis de l'EN et j'ai accepté de lui laisser le temps d'analyser les choses tranquillement avant de prendre sagement sa décision. Je crois qu'il a montré un intérêt réel pour venir jouer avec nous, il prendra le temps qu'il faudra, parce qu'il est encore jeune. C'est aussi un garçon qui a un langage franc. Les portes de l'EN lui seront toujours ouvertes», avait toujours déclaré Saâdane. Lacen impressionné par la sagesse de Saâdane déjà en 2008 Lacen a même appelé Saâdane pour lui dire ses regrets de ne pouvoir venir en fin d'année 2008. Ce que le coach a beaucoup apprécié. A son tour, Lacen a été très impressionné par la sagesse de Saâdane qui lui a expliqué par des mots sincères que l'EN avait besoin d'un joueur aussi bien élevé que lui et que les qualités morales du joueur étaient beaucoup plus importantes que les qualités techniques. «Je préfère me passer d'un génie qui peut perturber la tranquillité de l'équipe et garder un joueur moyen mais très bien élevé. Maintenant, si les deux qualités se trouvent chez le même joueur, ce sera le profil idéal pour la sélection nationale», lui avait expliqué Saâdane. Même après avoir rencontré Raouraoua et Saâdane à Santander, Lacen était resté sur sa position Après sa discussion avec Saâdane, ce dernier a décidé d'aller à Santander en compagnie de Raouraoua et Walid Sadi pour rencontrer le joueur. Ce qui s'est fait autour d'une table, et Lacen avait alors dévoilé les vraies raisons qui l'empêchaient de répondre rapidement présent à la convocation de la sélection nationale. Raouraoua avait décidé dès lors de prendre en charge le problème du passeport. Mais la position de Lacen avait laissé ses interlocuteurs un peu sur leur faim, puisqu'il avait gardé le même profil en leur signifiant que ce voyage en Algérie lui tenait vraiment à cœur et qu'il le lui fallait avant d'honorer sa première sélection. Raouraoua avait digéré cela moins facilement que Saâdane qui comprenait mieux son futur joueur. Question de tempérament des uns et des autres… Une grande acrobatie de Raouraoua pour le passeport de Lacen Mais le président de la FAF s'était promis de ne jamais interférer dans les décisions techniques du sélectionneur. C'est ainsi qu'il a laissé au temps de faire les choses, ne s'occupant que du volet administratif dans lequel il excelle. Pour preuve, c'est lui qui a réactivé le dossier Lacen en faisant appel à ses connaissances au sein de l'ambassade d'Algérie en France pour lui faire délivrer son passeport algérien. Selon certaines sources, il a fallu faire une grande acrobatie administrative afin de contourner certains obstacles. C'est grâce à la contribution et la volonté de plusieurs parties que des solutions définitives ont été trouvées pour remettre Lacen dans son droit de jouer pour l'Algérie. «Je n'ai jamais pensé à jouer pour la France» Lorsque notre journaliste a été le voir à Santander l'année dernière, Mehdi Lacen lui avait confié qu'il n'y avait pas plus énervant pour lui que d'entendre les gens dire qu'il attendait que Raymond Domenech le sélectionner parmi les Bleus. «Je n'ai jamais pensé à jouer pour la France ! J'espère que c'est clair comme ça, non ?» lui a-t-il clamé, comme pour montrer qu'il n'avait rien d'un opportuniste en retardant sa réponse à Saâdane. Il devait venir avant Yebda et Abdoun Pendant la préparation d'été, Le Buteur avait été le voir en Allemagne et il nous avait déclaré qu'il se tenait prêt à jouer avec l'Algérie. Il restait alors quatre matchs : un, en amical, contre l'Uruguay, deux à Blida (Zambie et Rwanda) et celui du 14 novembre du Caire. Lacen avait alors de grandes chances d'intégrer l'équipe nationale avant Yebda et en même temps que Mourad Meghni qui avait bénéficié des nouvelles lois de la FIFA. Lorsqu'il avait donné son accord pour jouer avec les Verts en été, Lacen était quasiment certain d'obtenir son passeport. Mais la malchance avait accompagné son dossier qui s'est compliqué au fil des démarches. A défaut de se justifier, il devenait indésirable La mort dans l'âme, Mehdi Lacen avait accusé le coup des critiques de la presse algérienne ainsi que des joueurs de l'EN qui ne comprenaient pas ce revirement de dernière minute. Il était dès lors considéré comme indésirable pour la suite de la compétition, vu qu'il lui était devenu très difficile de faire partie de l'EN dans ces moments d'extrême concentration. Même Hassan Yebda, qui avait intégré la sélection nationale, se voyait confiné à un rôle de remplaçant de luxe, laissant la place à ceux qui étaient rodés aux automatismes de l'équipe. Les sceptiques doivent se rappeler ceux qui sont venus à 31 et 32 ans ! La conquête du Mondial s'est donc poursuivie sans lui et la qualification fut arrachée dans les conditions qu'on connaît tous au grand bonheur du peuple. Dans l'euphorie, le peuple avait élevé l'ensemble des joueurs au rang de héros nationaux. Il devenait dès lors très difficile d'intégrer un joueur supplémentaire à cette équipe. Mais le bon sens a fini par prendre le dessus sur les sentiments et Saâdane a demandé à Raouraoua de réactiver le dossier Lacen de plus belle pour le mettre à sa disposition avant la CAN 2010. C'est ainsi que Lacen a donné son accord définitif pour jouer avec l'Algérie. A 25 ans, Mehdi a encore plusieurs années devant lui pour gagner le cœur des sceptiques. S'il a des soucis à se faire, il lui suffit de savoir que d'autres avant lui ont attendu 31 et 32 ans avant de dire oui ! Bienvenue chez toi Mehdi. Nacym Djender