«Je n'ai aucun doute sur la capacité de l'Algérie à passer le premier tour» «90% des bébés argentins naissent avec un ballon dans les bras» Merci Diego d'avoir accepté de nous recevoir au centre d'entraînement de l'Inter pour parler à un média algérien, pour la première fois de votre carrière. C'est un plaisir d'autant plus qu'on a des Algériens à l'Inter. Justement, ce début de saison a été très spécial pour les Algériens intéristes avec la présence de Taïder et Belfodil (Ndlr. entretemps, Belfodil a été transféré à Livourne au Mercato). Que pensez-vous de ces deux joueurs ? Ce sont deux très bons joueurs sur lesquels l'Inter a beaucoup investi. Ce sont deux valeurs sûres qui, dans un avenir proche, feront l'histoire de ce grand club ou d'autres clubs pour Belfodil. Les deux ont apporté beaucoup à l'Inter. Taïder continue à le faire par son talent, sa jeunesse et son envie de s'imposer. Etant en fin de parcours, contrairement à eux, je leur souhaite de réaliser une grande carrière. Avant de connaître Belfodil et Taïder, vous avez eu l'occasion de découvrir le football algérien lorsque vous avez affronté la sélection de notre pays au Camp Nou, en 2007. Gardez-vous une image particulière de ce match ? Oui, ce fut un match très dur au Camp Nou que nous avons gagné sur un score inhabituel de 4 à 3. Ce fut réellement très difficile parce qu'en face, il y avait une très bonne équipe algérienne. Je me rappelle surtout que cette équipe algérienne était très forte sur les balles arrêtées puisqu'elle nous a marqué trois buts sur ce genre d'exercice. C'était une belle course-poursuite puisque nous menions au score puis l'Algérie a renversé la vapeur, avant qu'on termine fort le match en l'emportant au final. Nous avons été surpris par la qualité de jeu des Algériens. Quand une équipe comme l'Argentine est menée au score à la mi-temps par une petite équipe comme l'Algérie de cette période, comment réagit-on dans le vestiaire ? La réaction, c'est d'essayer de corriger les erreurs commises sur le terrain tout simplement pour ensuite tenter de renverser le score. Heureusement pour nous, nous avons réussi à gagner le match. Mais sincèrement et comme je vous disais tout à l'heure, nous avons été surpris par les Algériens parce que nous ne pensions pas que l'Algérie allait être un adversaire aussi coriace, comme ce fut le cas ce jour-là, en première mi-temps notamment. Depuis ce match face à l'Argentine, l'Algérie semble avoir pris conscience de ses possibilités puisqu'elle a été présente en Coupe du monde 2010 en Afrique du Sud et sera présente aussi au Brésil où elle sera opposée à la Belgique, la Russie et la Corée du Sud. Que pouvez-vous nous dire sur ce groupe ? Il ne faut pas penser que ça sera facile parce qu'on est quand même en Coupe du monde et tous les groupes sont difficiles. Au Brésil, il y aura les meilleures sélections du monde, mais je n'ai aucun doute sur les possibilités de l'Algérie à franchir tranquillement le premier tour. L'Algérie, qui jouera sa deuxième Coupe du monde consécutive, mérite tout le respect. Ça sera compliqué, mais l'Algérie se qualifiera. Certains en Algérie pensent que le fait de se qualifier est en soi une prouesse et qu'il faudrait, de ce fait, se contenter d'une bonne participation, sans plus... C'est une erreur de penser de cette manière car en football, il ne faut jamais se mettre de limites. Même si on connaît tous nos limites, on ne doit quand même pas s'empêcher de rêver. Ce n'est pas interdit, non ? Il faut donc avoir l'ambition de toujours progresser et faire mieux à chaque fois. C'est ce que fait l'Algérie depuis le match du Camp Nou. Les deux qualifications en Coupe du monde en sont la meilleure preuve. Ce n'est donc pas le moment de s'arrêter là. L'Argentine a, pour sa part, hérité d'un groupe abordable. Pensez-vous que les adversaires de l'Argentine sont faciles ? Aucun footballeur argentin n'utilisera le mot facile pour qualifier un adversaire. Encore moins dans une Coupe du monde. Il faut être sincère et dire que nous avons hérité d'un groupe accessible sur le papier. Nous avons quand même une grande sélection avec de très grands joueurs, mais je n'oserai jamais dire que nos adversaires en Coupe du monde seront faciles. Il faut respecter tous les adversaires car au risque de me répéter, nous sommes en Coupe du monde et il y aura les 32 meilleures sélections au monde. L'Argentine a les qualités pour passer sans encombre le premier tour. Avec la génération Messi qui arrive à maturité, pensez-vous que l'Argentine est capable de ramener la Coupe du monde au pays ? J'espère que Dieu vous écoutera. Je crois que nous sommes sur la bonne voie. Je vois que l'ossature de la sélection possède, désormais, une grande expérience. La génération Messi a joué des Coupes du monde, des éliminatoires. Tous ces garçons arrivent à un bel âge dans le football et surtout avec beaucoup d'expérience. Je souhaite de tout cœur que cette génération joue enfin une finale de Coupe du monde et naturellement réussit à ramener le trophée au pays. C'est le rêve de tous les Argentins. L'Argentine dépendra-t-elle de la forme de Messi ? Sincèrement, Leo, c'est notre atout majeur. C'est le meilleur joueur du monde. Donc, s'il est en forme durant le Mondial, nos chances augmenteront sensiblement. Mais attention ! Ce serait une erreur de miser tout sur lui parce qu'à côté de Messi, il y a une très bonne équipe et d'excellentes individualités. Malgré tout, on aura besoin d'un Messi en possession de tous ses moyens pour espérer gagner la Coupe du monde. Ses buts et ses prestations avec le Barça sont-ils une bonne nouvelle pour les Argentins ? Sans aucun doute. Le voir revenir aussi fort, après une période de deux mois d'indisponibilité, génère beaucoup d'espoir et beaucoup de confiance. J'espère qu'il va continuer à progresser jusqu'en juin, sans devoir souffrir du moindre problème physique pour arriver en Coupe du monde au top. En plus de l'Argentine, quels seraient les favoris pour gagner la Coupe du monde ? Pour moi, les mêmes seront toujours là avec le Brésil au-dessus de tout le monde, surtout parce qu'il joue chez lui, mais aussi parce que c'est une grande sélection. Le fait de jouer à domicile augmente les chances de gagner le Mondial. Après, il y a l'Allemagne et l'Espagne. Je crois aussi que l'Italie est capable de réaliser un grand Mondial. Parlons de vous maintenant. Malgré une carrière très riche, vous avez dû attendre jusqu'à 30 ans pour gagner votre premier titre majeur avec l'Inter. A-t-on besoin d'une si longue durée pour le faire ? On a toujours besoin d'être patient en football et dans la vie. Moi, j'ai dû attendre d'avoir 30 ans pour gagner la Coppa Italia. Pourtant, j'ai bien entamé ma carrière en Argentine avec le titre de champion avec le Racing Club d'Avellaneda, après 35 ans d'attente. Si vous voulez la vérité, je ne me suis pas posé de questions, mon seul souci était de travailler dur à l'entraînement et progresser, sans jamais baisser les bras. J'avais, certes, des objectifs qui ont tardé à se concrétiser, mais qui se sont concrétisés quand même. Ma patience et ma foi ont fini par payer. C'est peut-être une leçon pour la jeune génération. La saison 2009-2010 a été la meilleure pour vous avec trois titres majeurs avec l'Inter, 52 matchs joués et beaucoup de buts marqués. Pourtant cette année-là, vous n'avez même pas été nominé pour le Ballon d'or. Avez-vous été déçu ? Sincèrement, non. En toute modestie, j'aurais dû faire au moins partie des nominés, je crois qu'ils étaient 50 nominés, mais je n'ai pas été déçu. Mais vraiment, pas du tout parce que ce qui compte pour moi, ce sont les titres collectifs. Naturellement, si on m'avait demandé de choisir entre le Ballon d'or et les titres que j'avais gagnés cette saison-là avec l'Inter, le choix aurait été évident pour moi. Je n'aurais eu aucun doute à choisir les titres gagnés en club, parce que la plus belle chose de ma carrière, c'est lorsque nous avons gagné le triplé avec l'Inter. Quel a été le secret de la réussite cette année-là ? Il n'y a pas eu un seul secret, mais beaucoup, dans le sens où ce fut une saison parfaite. Et pour qu'une saison soit parfaite, on a besoin de beaucoup de facteurs. D'abord, il y a eu un engagement sans faille de la part des joueurs. Ensuite, on avait un staff technique de très grande qualité commandé par Mourinho. Enfin, il y a eu un certain nombre de facteurs qui nous ont permis de gagner plusieurs titres. ... dont le duo d'attaque composé de Samuel Eto'o et vous-même... Pas seulement, nous avions des individualités de très grande qualité dans notre effectif. Avoir des joueurs de qualité fait aussi partie des secrets de notre réussite. Que faut-il à l'Inter pour refaire une saison pareille ? Du temps. On a besoin de temps, car l'Inter est en période de reconstruction avec beaucoup de nouveaux joueurs, un staff technique nouveau aussi. Avec un changement de propriétaires. Avec toutes ces nouveautés, on a forcément besoin de temps pour travailler, afin que les choses reprennent leur cours normal. Je pense qu'avec tout ce que ce maillot de l'Inter représente, ce club doit viser les objectifs les plus importants. Avec un peu de temps, je suis persuadé qu'on va réussir à atteindre tous nos objectifs. Quel était votre joueur modèle lorsque vous étiez jeune ? Quand on est jeune, on est attiré par les joueurs qu'on voit tous les dimanches en Argentine. Sans parler de Maradona qui a été notre idole à tous, mon joueur modèle a été Enzo Francescoli, un joueur extraordinaire. En plus, vous lui ressemblez physiquement... Oui, on me l'a dit plusieurs fois. En plus, il a toujours été une référence pour moi, sur et en dehors des terrains. L'Argentine est une véritable usine à fabriquer des footballeurs. C'est quoi la recette ? Pourquoi plusieurs nations n'arrivent pas à faire comme vous ? Ne me dites pas c'est parce que vous aimez le football car en Algérie, on adore aussi le football... C'est difficile à expliquer, mais chez nous, on naît avec ça. Le foot, c'est le sport le plus pratiqué en Argentine. Comme on dit chez nous, 90% des bébés argentins naissent avec un ballon dans les bras. Tout le monde en Argentine veut jouer au foot et ressembler à ses idoles. C'est ce qui explique cette grosse pression permanente sur la sélection... Oui, la pression est toujours là. Nous sommes un pays consommateur de football et comme il y a longtemps qu'on n'a pas eu la possibilité d'aller loin dans une Coupe du monde, la pression on la vit, on la sent. Espérons qu'elle sera positive cette fois-ci et qu'elle nous permettra de ramener la Coupe du monde au pays. Quand on a un frère footballeur de haut niveau comme vous, de quoi on parle à la maison ? On parle de tout, mais généralement le sujet de discussion, c'est le football. Nous sommes une famille de footballeurs puisque même mon père a joué au foot, sans avoir eu la chance d'évoluer dans de grands clubs. Cette chance, on l'a eue Gabi et moi qui avons joué dans de grands championnats, raison pour laquelle on se considère comme des privilégiés. _________________________ Zanetti-Le Buteur, les retrouvailles Dès qu'il a appris que les envoyés spéciaux du Buteur étaient à la Pinetina, le centre d'entraînement de l'Inter, Javier Zanetti a tenu à venir nous saluer et discuter un peu avec nous, pour se rappeler un peu son récent voyage à Alger en tant qu'invité d'honneur du Ballon d'Or algérien. Il Capitano nous a montré une autre facette de sa personnalité car aussi surprenant que cela puisse paraître, Zanetti est un grand plaisantin qui ne lâche personne, encore moins ses jeunes coéquipiers argentins de l'Inter qu'on a réussi à interviewer. «Vous êtes désormais un interista» Dès qu'il nous a vus, Javier Zanetti est venu vers nous pour nous faire une accolade très chaleureuse. Remarquant notre tenue vestimentaire tout en bleu, il n'a pas tardé à lancer sa première boutade : «Désormais, vous êtes un interista (Ndlr : supporter de l'Inter) comme tout le monde ici, à moins que vous n'ayez choisi ces couleurs que pour nous faire plaisir !» Tout en continuant de discuter avec nous, il saluait tout le monde, ses trois coéquipiers dont Diego Milito, les trois membres de la cellule de communication de l'Inter, le photographe et le cameraman. L'image de Lalmas l'a beaucoup touché Revenant un peu sur le Ballon d'Or, Javier Zanetti nous a réitéré avoir été enchanté de venir en Algérie et d'assister à la seule grande soirée sportive algérienne. Il a beaucoup aimé la soirée, mais une chose l'a beaucoup ému : la présence de Lalmas. «Je ne connais pas le joueur en question, mais j'ai beaucoup de respect pour lui, il a été honoré et a tenu à répondre à l'invitation, malgré son état de santé, l'ovation de l'assistance prouve qu'il fut un très grand joueur dans son pays, c'était émouvant», nous a expliqué Zanetti. «J'aimerais bien voir ta tête si tu n'es pas convoqué» Reprenant son air plaisantin, Zanetti s'est attaqué à un coéquipier argentin dont l'interview sera publiée bientôt sur Le Buteur. Le coéquipier en question a été sollicité par un photographe de son pays qui voulait une photo un peu spéciale pour la Une de Olé, en prévision du Mondial. Le joueur se faisait photographier avec le maillot, le drapeau et un chapeau aux couleurs de l'Argentine. Zanetti regardait tranquillement le manège, puis à la fin, il a lancé à son coéquipier qui n'est pas certain de faire partie des 23 de Sabella : «J'aimerais bien voir ta tête si le sélectionneur oublie de te prendre au Brésil», lui a-t-il lancé en cachant son visage avec les mains. «Je ne voudrais pas être à ta place», a-t-il ajouté. Réaction du joueur : «J'espère que si je ne suis pas convoqué, tu oublieras ces photos», dira-t-il en s'adressant au photographe. «La prochaine fois, je resterai plus longtemps à Alger» Afin de ne pas nous déranger dans notre travail puisqu'il restait encore une interview à réaliser (celle que vous avez entre les mains), Javier Zanetti a pris congé de tout le monde pour rentrer à la maison après un entraînement sérieux, non sans avoir accepté de nous accorder une photo. «Il faut bien immortaliser votre venue ici à Milan; j'espère pour ma part retourner à Alger et y rester un peu plus de temps», nous a-t-il dit. Il s'engouffre ensuite dans un long couloir qui mène vers le parking. Il rentrera à la maison pour une sieste réparatrice et une bonne récupération en pensant à l'entraînement du lendemain. Des gestes qu'il fait déjà depuis plus de 20 ans. __________________________ Un fou zigzaguant avec sa Ferrari, c'était Balotelli ! La Pinetina, le centre d'entraînement de l'Inter, se trouve à quelques dizaines de kilomètres au nord de Milan, dans la commune de Como. Pas loin de Como, se trouve Milanello dans la commune de Varese, le centre d'entraînement du Milan AC. Il fallait donc prendre le même chemin pour rejoindre les centres d'entraînement des deux clubs. Vous vous demandez sans doute pourquoi ces explications géographiques. Eh bien, parce que sur notre chemin à la Pinetina, nous avons aperçu un fou au volant d'une flamboyante Ferrari zigzaguant sur une route pourtant étroite. Le temps pour notre photographe d'apercevoir la tête de Mario Balotelli et de sortir son appareil pour immortaliser l'évènement qu'on arrive à la bretelle menant à Varese. Une accélération fulgurante et Gustavo le photographe n'y a vu que du feu. La Ferrari de Balotelli roulait au moins à 180 km à l'heure. __________________________ On nous reçoit avec des boissons chaudes et des croissants Depuis quelques semaines, Le Buteur est devenu un habitué de la Pinetina, grâce à nos deux compatriotes Taïder et Belfodil qu'on a eu l'occasion d'interviewer. La venue de Zanetti au Ballon d'Or, accompagné de deux membres de la cellule de communication, a permis au Buteur de faire partie des médias préférés du club lombard. La preuve, à l'Inter, nous avons eu droit à un accueil des plus chaleureux avec du café, du thé, des croissants chauds et tout le respect qu'on doit à un grand média. On a également mis à notre disposition une grande salle pour la réalisation des interviews. __________________________ Les éditions du Ballon d'Or algérien dans les archives de l'Inter En quittant Alger pour Milan à la fin du Ballon d'Or, Edoardo, le responsable de la cellule de communication de l'Inter, a insisté auprès de nous pour lui envoyer les éditions de la cérémonie grandiose organisée au Hilton, en décembre dernier. Edoardo savait qu'il pouvait voir tout ça sur internet, mais il voulait le papier pour le garder comme souvenir. Avant notre voyage à Milan, nous avons donc pris le soin de lui préparer plusieurs éditions de nos trois journaux, Le Buteur, El Heddaf et El Heddaf dawli. Lui, ses collègues et Zanetti ont décortiqué les photos de l'évènement. Ils ont beaucoup apprécié la Une d'El Heddaf dawli avec une grande photo de Slimani entouré de Rivaldo et Zanetti. __________________________ Les entraînements toujours à huis clos Alors que tous les clubs qu'on a visités, même les plus fermés comme le Real Madrid, font parfois des concessions en ouvrant les séances d'entraînement aux médias, à l'Inter, les séances se tiennent toujours à huis clos et c'est le club qui met à la disposition des médias les photos, les images et les informations concernant son quotidien. Nos confrères italiens se contentent donc des conférences de presse et de quelques rares ouvertures pour des interviews personnalisées. __________________________ Milito, alias le Prince comme Francescoli En Argentine, Diego Milito est surnommé le Prince pour son élégance sur et en dehors des terrains, mais aussi pour sa ressemblance avec Enzo Francescoli, l'ancienne star de Marseille et de la sélection uruguayenne, surnommé lui-même le Prince. D'ailleurs au cours de l'interview qu'il nous a accordée, Milito nous a appris que durant son adolescence, son modèle de joueur a toujours été Francescoli. «En plus, tout le monde me disait que je lui ressemblais», nous a-t-il dit entre autres.