«Les Algériens sont des malades du foot, il leur manquait un Halilhodzic pour les discipliner» «J'ai vu jouer la Belgique, son jeu dépend de la forme de Hazard» Entraîneur renommé dans son pays, où il a occupé notamment la fonction de sélectionneur des U21 et directeur des sélections de jeunes et contribué à mettre en pratique le système de formation suisse qui a valu à ce pays d'avoir été champion du monde U17 en 2009, Bernard Challandes a pris jeudi ses fonctions de sélectionneur de l'Arménie, adversaire de l'Algérie le 31 mai prochain dans un match amical à Genève. Il était présent mercredi à Krasnodar pour superviser sa nouvelle équipe à l'occasion du match Russie-Arménie et nous a livrés ses impressions sur la sélection russe. Vous avez accepté d'être le nouveau sélectionneur de l'Arménie. Qu'est-ce qui a motivé votre choix ? C'est le fait d'avoir senti que j'avais fait un peu le tour au niveau des clubs et de la Direction technique nationale suisse et qu'il me fallait passer à une étape supérieure, celle de prendre en mains une sélection. L'Arménie m'en a fait la proposition. J'ai accepté après m'être renseigné et documenté sur le football arménien et constaté que la sélection a du potentiel et peut émerger à court ou moyen terme dans le football européen. Ma mission est surtout de faire appliquer au football arménien le système de formation suisse qui a fait ses preuves ces dernières années. Quand vous dites que la sélection arménienne a du potentiel, pensez-vous à Henrikh Mkhitaryan, nouvelle star du Borussia Dortmund ? Il y a lui, bien sûr, qui est en train de briller dans la Bundesliga, un meneur de jeu complet qui n'est pas sans me rappeler Zinédine Zidane. Il a été acheté au Shakhtar Donetsk 26 millions d'euros, un record pour le Borussia Dortmund qui n'est pas n'importe quel club. Le bruit de ce transfert et les performances de Mkhitaryan avec son club constituent une excellente vitrine pour le football arménien. Mis à part le gardien de but, Berezovski, qui va avoir bientôt 40 ans, il y a des jeunes talents dans la sélection d'Arménie. Je pense surtout à Movsisyan, attaquant du Spartak Moscou, à Ozbiliz ou à Ghazaryan. Bref, l'Arménie a une diaspora de joueurs évoluant à l'étranger qui peuvent faire une sélection d'avenir. L'Arménie a été sollicitée par l'Algérie pour un match amical le 31 mai. Vous avez certainement été consulté pour cette rencontre, puisque vous serez en fonction à cette période-là. Avez-vous réfléchi longtemps avant d'accepter ? Alors là, pas du tout ! J'ai tout de suite accepté, car l'Algérie est quand même un participant à la Coupe du monde, avec des joueurs talentueux qui évoluent dans de grands championnats européens. C'est un adversaire coriace. J'aurais pu refuser parce que justement l'Algérie est forte est qu'il serait peut-être risqué d'affronter, en l'espace de 6 jours, l'Algérie, puis l'Allemagne, deux Mondialistes, mais j'ai accepté en me disant que c'est au contact de sélections fortes qu'on peut apprendre. De plus, la rencontre se déroulera à Genève, donc chez moi. Bon, la sélection algérienne sera aussi comme chez elle, car il y a de nombreux Algériens en Suisse tout comme en France et qui viendront sûrement nombreux. Au sujet justement de la domiciliation du match, le sélectionneur de l'Algérie, Vahid Halilhodzic, voulait que ça se déroule en Algérie. Pourquoi avoir refusé cette option ? Déjà, il faut préciser une chose : il n'y a pas que moi qui ne l'ai pas voulu. Je pense qu'au niveau des dirigeants, des intérêts économiques ont fait qu'ils aient préféré jouer en Europe. Pour ma part, mon argument est strictement sportif : ce sera le premier stage que je dirigerai comme sélectionneur de l'Arménie et, par conséquent, je ne veux pas trop voyager pour une première. La sélection arménienne a son avion qui l'emmènera en Suisse pour le stage, ponctué du match face à l'Algérie, puis à Mayence pour affronter l'Allemagne. La Suisse et l'Allemagne sont des pays frontaliers, ce qui fait que le vol sera court. Et puis, l'été, les conditions de préparation en montagne seront idéales en Suisse, certainement mieux qu'en Algérie. Voilà pourquoi j'ai décliné l'offre de jouer le match dans votre pays. Que pensez-vous de la sélection algérienne actuelle ? Pour être honnête, je n'ai pas trop suivi ses matches et je ne connais pas tous ses joueurs, mais dites-vous bien qu'en Europe, on a toujours dit que l'Algérie est un formidable vivier de talents qui ont juste besoin d'un peu de rigueur pour être constants dans le haut niveau. Je pense que Halilhodzic a apporté cette rigueur qui manquait à la sélection algérienne. Je ne le connais pas personnellement, mais j'ai eu des joueurs qui étaient avec lui et ils sont unanimes à dire qu'il ne badine pas avec la discipline. Comment voyez-vous ses chances dans son groupe face à la Belgique, la Corée du Sud et la Russie ? Pour la Belgique, il faut reconnaître qu'elle possède une formidable génération de joueurs. Il y a quelque temps, j'étais allé voir son match amical contre la Japon car je supervisais deux joueurs japonais qu'un club suisse voulait recruter. J'ai vu une équipe solide, mais qui, d'après moi, dépend un peu de la forme d'Eden Hazard. La Corée du Sud constitue un ensemble solide, mais ça n'a rien à voir avec leur sélection d'il y a dix ans. Pour les Algériens, il y a moyen de la battre. Quant à la Russie, c'est le grand point d'interrogation. Elle peut se transcender dans un match et devenir quelconque dans un autre. Avant le match amical Russie-Arménie, nous avons visionné plusieurs de ses matches, notamment celui contre la Serbie. Croyez-moi, il y a moyen de marquer à sa défense. Cependant, l'Arménie n'a pas pu lui marquer mercredi alors même que, de l'avis de tous les observateurs, Fabio Capello en premier, l'attaque est le point fort de cette équipe... C'est vrai que les Russes étaient trop forts mercredi. Ils ont carrément mangé les Arméniens ! Néanmoins, il faut noter que les Arméniens se sont un peu laissés faire. Je suis un peu déçu de constater que les Arméniens ne se sont pas révoltés après avoir encaissé deux buts en première mi-temps. Cela démontre qu'il y a du travail qui m'attend (rire). Je persiste quand même à croire que la défense russe est prenable, même si c'était difficile à vérifier mercredi face à des Arméniens trop passifs. En tout cas, l'Arménie a montré ce qu'il ne faut pas faire face aux Russes : rester passifs.