Comment sortir l'entreprise algérienne de sa léthargie ? Par la mise en place de la politique de la prévision, répondent les spécialistes d'Ernst &Young. Ces derniers déplorent, cependant, l'absence de statistiques «fiables» en Algérie. Ils récusent ainsi la véracité des chiffres et données officielles, puisque ce secteur est monopolisé par l'Etat et reste très verrouillé. Lors d'une d'une rencontre organisée, avant-hier, à Alger, par Ernst &Young, les experts de ce cabinet ont appelé à une amélioration des statistiques sur la consommation en Algérie. Autrement dit, ils conseillent le processus S&OP qui préconise de rassembler toutes les activités d'une entreprise autour d'une prévision stratégique et les mettre au diapason des finances, de sa stratégie marketing et de vente, via la production et les l'approvisionnement. Selon Philippe Ausseur, responsable des régions France, Algérie et Luxembourg auprès d'Ernst &Young, «le manque de statistiques fiables est effectivement une véritable contrainte aux entreprises algériennes pour évaluer leurs prévisions de demande». «Le marché algérien manque, selon cet expert, «d'enquêtes fiables sur la consommation et ses tendances, sur les données financières du consommateur et son profil», soulignant l'effort à mener dans ce domaine par les acteurs chargés de la collecte de ces données, y compris par Ernst and Young. Selon cet expert, ce type de service devrait connaître un développement en Algérie avec l'arrivée de nouveaux acteurs sur le segment des enquêtes et études statistiques. Mais, est-ce que l'Etat est prêt à ouvrir le marché des statistiques ? Chez nous, la réalisation et la diffusion des statistiques relatives au secteur économique relèvent, entre autres, de l'Office nationale des statistiques (ONS). A travers cet organisme public, le gouvernement exerce son monopole sur les études et autres enquêtes statistiques. Le seul organe qui était, a priori indépendant, en l'occurrence le CNES (Conseil national économique et social), a perdu de sa liberté, avec la démission de son directeur, feu Mohamed Salah Mentouri (mort en septembre 2010). Depuis, selon des observateurs, les rapports sur la vie sociale et économique du CNES sont presque des reproductions des statistiques officielles. En tout cas, à l'unanimité, les responsables de ce cabinet et les entrepreneurs algériens affirment ipso facto que le manque de données fiables sur la consommation en Algérie génère des contraintes qui bloquent les entreprises dans l'élaboration de leurs stratégies commerciales. «Anticiper les besoins du marché»' Quand au directeur exécutif du bureau d'Alger, Phetsamone Rasmone, il estime que les entreprises en Algérie doivent savoir «anticiper les besoins du marché» afin d'évaluer correctement son approvisionnement en matières premières, et partant d'éviter les ruptures de stocks». «Or, a-t-il observé, l'évaluation de la demande par les entreprises algériennes est souvent faite sur la base de l'historique des ventes sans prendre en considération l'évolution des parts de marchés des concurrents». Et d'ajouter que «cette évaluation est rendue nécessaire, d'autant plus que la réglementation régissant l'importation, telle qu'appliquée actuellement, conduit à des perturbations d'approvisionnement et à des ruptures de stocks de certaines matières premières». De sa part, la solution pour ce problème, selon Thi-Tu Khuong, responsable de la chaîne approvisionnement du bureau de Paris, «n'est pas de surstocker, mais d'adapter un système d'approvisionnement, actualisé mensuellement avec les fournisseur». Le même constat a été fait par Philippe Ausseur, qui a expliqué que «le surstockage, solution avec un coût très élevé, représente une réponse dangereuse» au manque d'approvisionnement vu le risque de péremption de certains produits et les coûts des espaces de stockage. Fiche technique Ernst & Young est un des principaux cabinets d'audit, l'un des Big Four, et le troisième réseau mondial en termes de chiffre d'affaires (après Pricewaterhouse Coopers et Deloitte). Ernst & Young est aussi nommé par son acronyme EY, ou également E&Y. Sa mission est de répondre aux enjeux majeurs de ses clients (sociétés cotées, entreprises du Middle Market, jeunes entreprises innovantes, secteur public, fonds d'investissements...).