Après la préférence nettement marquée pour les entreprises étrangères dans les gros contrats des travaux publics, notamment celui relatif à l'autoroute Est Ouest, les pouvoirs publics opèrent un revirement à 180° en prônant un patriotisme économique salvateur pour l'emploi et la pérennité des entreprises nationales mais coûteux pour le trésor public. Trop flagrants pour être cachés, les scandales de corruption qui ont entachés les contrats passés dans le cadre de la réalisation de l'autoroute Est-Ouest, les anomalies constatées et les retards qui traînent en longueur, ont fini par persuader les pouvoirs publics à abandonner leur choix de ne compter que sur les entreprises étrangères. Seulement pour y pallier, on va d'un extrême à l'autre. Exit donc, l'efficacité, exit le savoir-faire et la technologie de pointe tant chantés pour lancer le projet de l'autoroute, on va compter sur le « potentiel national ». Seulement par potentiel national, M. Amar Ghoul n'entend que les entreprises publiques, pour la plupart moribondes. Il est clair que pour compter sur ce potentiel national, une réelle politique de soutien à l'entreprise (publique et privée) doit être menée. Ce soutien doit se matérialiser tant par une aide au plan du financement, que celui des incitations fiscales ou encore, et surtout, par la mise à niveau et l'efficacité managériale. Le soutien exclusif aux entreprises publiques du secteur semble se résumer à une perfusion. Ainsi, on apprendra qu'une convention de financement entre la Société de gestion des participations de l'Etat (SDGP-SINTRA) et les deux banques publiques BDL et CPA a été signée, hier au siège du ministère des Travaux publics. Le docteur Omar Oukil, responsable de la communication de ce département ministériel, annonce un coût faramineux de 120 milliards de dinars, soit environ 1,2 milliard d'euros. Cette convention porterait sur « l'assainissement financier de 51 entreprises publiques relevant du portefeuille des travaux publics, l'octroi de crédits d'investissement et de mise à niveau de ces entreprises et un programme spécifique d'amélioration de la gestion ». « Cette convention permet de sauvegarder plus de 40.000 postes d'emplois », a précisé M. Oukil. Les entreprises concernées bénéficieront d'un plan de charge de la part du secteur des travaux publics et de moyens financiers pour moderniser leurs moyens de production. Le patriotisme économique a un coût, pas seulement financier. L'absence d'émulation et de concurrence mettrait les entreprises qui ont bénéficié de la perfusion à se complaire dans une situation de monopole protectionniste. Un savant dosage entre les compétences publiques privées et étrangères donnerait de meilleurs résultats.