Plus que jamais auparavant, les relations américano-chinoises sont à l'ordre du jour avec la visite de quatre jours qu'effectue le président chinois aux Etats-Unis. C'est le moment, dit-on, pour mettre les pendules à l'heure entre les pays, avec en priorité la valeur réelle du yuan, la monnaie chinoise, qui cause de sérieux casse-têtes à l'administration Obama. Les Etats-Unis considèrent que la Chine est en train de miner l'économie mondiale avec la faiblesse voulue et sciemment provoquée par la Chine afin de « noyer le marché américain », particulièrement en cette période de reprise économique qui n'en finit pas. Un autre casse-tête chinois pour les Etats-Unis et surtout les démocrates qui, il faut le rappeler, ont bien laissé des plumes lors des dernières élections de mi-mandat. Quatre jours durant, le président chinois Hu Jintao arrivé mardi aux Etats-Unis pour une visite d'Etat, pourrait tenir l'Amérique en haleine après une année marquée par de fortes tensions entre les deux puissances, la Chine étant l'objet de critiques multiples. M. Hu dirige un pays à la fois critiqué à Washington sur des questions de droits de l'homme et monétaires mais impossible à ignorer étant donné son poids économique et, de plus en plus, militaire et géopolitique. Il est vrai que la Chine semble prendre le pas sur les Etats-Unis à l'apparence de parent pauvre ces dernières années face à la montée et la croissance économique de Pékin alors que le continent américain éprouve des difficultés de se défaire de la crise qui a ébranlé le monde ces dernières années. Certains pays ont réussi tout au moins à se maintenir alors que d'autres, surtout en Europe, ont failli être engloutis n'était-ce les plans de secours organisés par les pays voisins de l'Union européenne. Souligner et célébrer les points d'accord, prendre acte des désaccords sans que cela ne constitue un motif de rupture, tel a été le leitmotiv de la diplomatie américaine vis-à-vis de Pékin depuis l'entrée en fonctions début 2009 de Barack Obama, qui va rencontrer M. Hu en tête-à-tête pour la huitième fois. Eviter la rupture Mais la recherche d'un équilibre entre les deux grandes puissances du début du XXIe siècle ne s'effectue pas sans à-coups, comme l'a montré l'année écoulée. Les sujets de discorde ont été légion: cours du yuan, injustement sous-évalué pour favoriser les exportations chinoises selon Washington, situation des droits de l'homme et accès à l'internet en Chine, question tibétaine, revendications maritimes de Pékin face à des alliés américains, restriction des exportations de minerais stratégiques, ventes d'armes américaines à Taïwan... Toutefois, après une année 2010 chahutée, «nous entrons dans ce sommet alors que les deux parties souhaitent davantage de stabilité dans leur relation», explique Michael Green, expert du Centre pour les études internationales et stratégiques (CSIS), un groupe de réflexion de Washington. Selon lui, «la Chine a, au moins tactiquement, adapté sa position sur plusieurs questions», comme le yuan, «qui s'est apprécié de 3,9% depuis juin». La récente visite du secrétaire à la Défense Robert Gates à Pékin a permis de relancer la coopération entre les deux armées, et la Chine a adopté un ton plus conciliant vis-à-vis des pays alliés de Washington. Dans des propos publiés dimanche, M. Hu a déclaré à deux journaux américains que «les deux parties doivent garder le bon cap dans le développement de leurs relations, accroître les échanges, renforcer la confiance mutuelle (et) rechercher des terrains d'entente malgré les divergences». Mais M. Green met aussi en garde contre une attente trop importante vis-à-vis de la visite d'Etat de M. Hu, car ce dernier est censé passer les rênes du pouvoir à l'horizon 2012-2013. Pour lui, ce sommet ne sera pas de nature à modifier en profondeur les relations sino-américaines, seulement de constater les secteurs dans lesquels les deux pays peuvent coopérer. Selon le vice-président de la Fondation Carnegie, Douglas Paal, cette visite est aussi lourde d'enjeux pour M. Obama d'un point de vue de politique intérieure, alors que la campagne pour la présidentielle de 2012 va déjà s'amorcer. Renforcés au Congrès, «les républicains vont certainement s'en prendre à (M. Obama) s'il semble être faible face à la Chine, mais ils s'en prendront aussi à lui s'il ne gère pas correctement» ce dossier, selon M. Paal. Le vice-président Joe Biden accueillera M. Hu à la base aérienne d'Andrews près de Washington mardi après-midi, avant une journée de mercredi entièrement dédiée à la délégation chinoise: cérémonie d'arrivée en grande pompe, rencontre bilatérale, conférence de presse et dîner d'Etat. Tous les atouts sont à saisir pour harmoniser les relations et relancer une coopération bilatérale plus saine.