Décidément, on a tendance à croire que Hosni Moubarak n'a pas compris le message du peuple égyptien. Ce dernier réclame le départ du président qui, lui, comme s'il était atteint de cécité politique, se lance de son côté dans un remaniement ministériel pour tenter de calmer les esprits. Mais c'est trop tard! Semble-t-il. Le peuple demande, ni plus ni moins, que le départ de Moubarak. Un moment historique pour l'Egypte qui a atteint un point de non retour. Au Canada, le leitmotiv des Egyptiens est : « Moubarak dégage ». Les membres de la communauté égyptienne de Montréal sont encore une fois descendus dans la rue, samedi après-midi, pour affirmer leur soutien à leur peuple et réclamer la fin du régime de Hosni Moubarak. Brandissant des drapeaux égyptiens et des pancartes affichant le slogan «Moubarak, dégage !», une centaine de manifestants se sont réunis devant le consulat égyptien, situé au centre-ville de Montréal. Pendant plusieurs minutes, ils ont scandé «No Moubarak, No Souleimane. Egypt has to be free now». (Ni Moubarak, Ni Souleimane. L'Egypte doit maintenant être libre.) Ni le discours prononcé vendredi par le président égyptien, ni les nominations d'un vice-président et d'un nouveau Premier ministre n'ont semblé satisfaire les manifestants, au Caire, comme à Montréal. «Le régime de Moubarak doit partir complètement, a réclamé l'organisateur de la manifestation, représentant québécois de l'Association nationale pour le changement en Egypte. Ça ne prend pas, avec juste la désignation d'un nouveau vice-président. C'est le même régime. Ce n'est pas acceptable que la police égyptienne fasse feu sur les Egyptiens qui manifestent dans la rue pacifiquement pour demander la démocratie. C'est un mot qui est très difficile à faire entendre en Egypte». Tous dénoncent également la nomination du chef des services de renseignements, Omar Souleimane, au poste de vice-président, lequel était vacant depuis l'accession de Hosni Moubarak à la présidence en 1981. «C'est le même régime, c'est la même idéologie, souligne-t-on. C'est la même dictature, mais avec un changement de visage. Le gars est un militaire, il n'a jamais pratiqué la politique». En Egypte, des milliers de personnes ont bravé, samedi, le couvre-feu et sont descendus dans les rues du Caire pour la cinquième journée consécutive. Des responsables de la sécurité faisaient état de 74 morts au cours des deux derniers jours parmi les manifestants et les forces de l'ordre. Au moins 2.000 personnes auraient été blessées. Le ministère des Affaires étrangères du Canada recommande, par ailleurs, aux voyageurs d'éviter tout voyage non essentiel au Caire, à Alexandrie et à Suez en raison de troubles civils. «On recommande aux Canadiens, tout particulièrement ceux qui séjournent ou vivent dans des régions urbaines d'Egypte, d'éviter toutes les manifestations ou les rassemblements importants, précise la porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Mme Laura Markle. D'importantes manifestations ont lieu dans ces villes. On signale un grand nombre d'arrestations, des dommages matériels, des personnes blessées et plusieurs décès suite aux blessures subies au cours des protestations. Le mouvement de contestation populaire, entamé mardi et qui ne paraît pas s'essouffler, a fait au moins 92 morts, en majorité des civils, et des milliers de blessés, selon des sources médicales. En soirée, et malgré le couvre-feu, des milliers de personnes étaient toujours massées dans les rues du Caire et dans d'autres villes du pays après une journée marquée par des heurts sanglants entre manifestants et forces de sécurité qui ont fait usage de gaz lacrymogènes et de balles en caoutchouc.