Après l'expiration de la date butoir du 31 août, le gouvernement aura à choisir entre le maintien des exonérations ou le retour aux taxes précédentes en maintenant, en revanche, la possibilité d'intervention de l'Etat pour compenser les opérateurs. Quelque soit l'issue, l'Etat interviendra pour apaiser le mécontentement de la population face à la forte hausse des prix des produits alimentaires qui ont atteint des record à l'échèle mondiale. Ce procédé est-il la solution appropriée au problème? D'après les estimations des experts, même si le gouvernement algérien peut se permettre de telles largesses, ces mesures pourraient exacerber la crise inflationniste à plus ou moins long terme. Ceci est vrai si on prend en considération le dernier rapport de l'Organisation onusienne pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) qui relevait cette semaine que les prix des produits alimentaires mondiaux avaient atteint un nouveau record historique en février, et le bond soudain des prix du pétrole risquait de rendre la situation encore plus difficile. Cette hausse en crescendo va également continuer, vu les dernières perturbations climatiques, qui ont touché plusieurs pays exportateurs de denrées alimentaires, ainsi que l'envol des prix de pétrole qui vont se répercuter ex abrupto sur l'agroalimentaire. D'après un expert qui a requis l'anonymat, «ces mesures ne résolvent pas le problème définitivement. Le gouvernement apaiser la pression et prend donc des mesures qui ne sont pas forcément bonnes pour la société». Et de poursuivre: «les subventions et les contrôles sur les prix peuvent, à moyen terme, nourrir indubitablement l'inflation, car elles encouragent la consommation tout en décourageant la hausse de la production». En effet, si ces mesures de subventions et de plafonnement des prix sont mal conçues, elles peuvent aussi profiter surtout à ceux qui n'en ont pas besoin, ajoute un économiste de l'université d'Oran. En extrapolant, et en théorie, cette panoplie de mesures permettra de contenir l'inflation tant qu'elles seront en place. Mais «ce barrage risque de se rompre, lorsque le gouvernement ne pourra plus se permettre, financièrement, le maintien de cet arsenal, en prenant en considération la persistance de la hausse, comme l'a annoncé la FAO. Et alors, les accommodations seront d'autant plus…agressives», prévient notre interlocuteur. La «régularisation» des mesures du gouvernement sera prise en charge par la loi de Finances complémentaire de 2011, rappelle-t-on. Après l'expiration de la date butoir du 31 août, le gouvernement aura à choisir entre le maintien des mêmes exonérations, au cas où les prix mondiaux de ces produits continueront leur hausse, ou le retour aux taxes précédentes en maintenant, en revanche, la possibilité d'intervention de l'Etat pour compenser les opérateurs. Le satisfecit des opérateurs de l'alimentaire ! Côté opérateurs économiques, les dernières mesures gouvernementales portant sur des exonérations d'impôts pour aplanir la «surchauffe» des prix ont suscité un satisfecit général. En effet, les opérateurs économiques ayant participé aux quatre Conseils interministériels (CIM), consacrés à l'élaboration du décret fixant le plafonnement des prix et les marges bénéficiaires du sucre et des huiles alimentaires, ont manifesté un «consensus» autour de ces marges qui seront rendues publiques dans quelques jours, a indiqué lundi un responsable du ministère du Commerce. «Les marges bénéficiaires ne sont, à mon point de vue, qu'un détail de ce décret dont la publication au Journal officiel est imminente», a déclaré Aïssa Zelmati, secrétaire général du ministère, en assurant qu'elles «ont été fixées en concertation avec les opérateurs», qui «ont affiché leur satisfaction à l'exception d'un seul». Le même responsable, qui n'a pas avancé plus de détails sur le contenu du décret actuellement au niveau du gouvernement, a rappelé que les dispositions y afférentes ne sont qu'une application des lois sur la concurrence et sur les pratiques commerciales, adoptées l'année dernière, et que «toute opposition à ces mesures était, par conséquent, une opposition à la loi». Pour rappel, lors de la dernière rencontre entre le ministère du Commerce et les opérateurs économiques, Issad Rebrab, patron de Cevital, principal groupe importateur et producteur de sucre et d'huile en Algérie, avait estimé que «seule l'offre et la demande devraient définir les prix», en proposant de maintenir leur plafonnement, mais de laisser libres les marges bénéficiaires. De son côté, le président Abdelaziz Bouteflika avait récemment instruit le gouvernement d'approfondir la concertation, avec toutes les parties concernées, autour des dossiers socio-économiques. Le décret, qui fixe par ailleurs les modalités de compensation des opérateurs pour le manque à gagner que peut engendrer le plafonnement et la fixation des marges bénéficiaires, prévoit la création d'un «comité d'évaluation du différentiel», selon Aïssa Zelmati. «Si un opérateur importe tant de tonnes de matières premières destinées à la production des huiles, il doit démontrer la quantité des huiles alimentaires effectivement produites à partir de ses importations afin qu'il puisse être remboursé après évaluation faite par le comité», a-t-il expliqué, en ajoutant que ce «remboursement ne peut avoir lieu qu'au cas où les prix de ces matières affichaient une hausse sur les marchés internationaux». Le sucre à 90 da le kilo et 600 da les 5 litres d'huile En janvier dernier, le gouvernement a décidé de juguler les prix du sucre et de l'huile de table après les hausses spéculatives qu'ils avaient connues, provoquant de violentes protestations sociales. Il a été ainsi décidé de plafonner ces prix à 90 DA pour le kg de sucre et à 600 DA pour les cinq litres d'huile et de «suspendre», jusqu'à fin août 2011, l'application des tarifs douaniers (5%), de l'IBS (19% pour la production et 25% pour la distribution) et de TVA (17%) sur les importations ou la production des sucres roux et blanc et des matières premières des huiles alimentaires.