«Entre les Algériens et moi, ce fut le coup de foudre», avait lancé l'avocat anticolonialiste Jacques Vergès, alors qu'il venait de «débarquer» en Algérie pour défendre l'emblématique moudjahida et militante du FLN, Djamila Bouhired. Le mois d'avril 1957 marque, selon des historiens et des biographes, un tournant dans la carrière du jeune avocat français, qui n'a que dix-huit mois d'expérience lorsqu'il est appelé en Algérie pour défendre la jeune militante algérienne. D'abord militant du parti communiste français qu'il quitta pour l'avoir jugé «tiède», à l'époque, sur la question algérienne, il rejoint le FLN au sein duquel il milite sous le nom de «Mansour». Son attachement à l'Algérie, il le manifestera à l'orée de l'indépendance en prenant la nationalité d'un pays qu'il a tant chéri. Il deviendra même responsable au cabinet du ministre des Affaires étrangères. En janvier dernier à Paris, il a été honoré par l'Algérie pour ses «nobles actions» envers la cause nationale et son engagement en faveur du combat libérateur du pays. Une attestation de reconnaissance ainsi qu'une médaille honorifique lui ont été remise, au nom du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, par le consul général d'Algérie à Paris, Rachid Ouali, lors d'une cérémonie célébrant la double fête du déclenchement de la révolution du 1er Novembre 1954 et du cinquantenaire de l'indépendance nationale. Un «Chevalier de la Défense» Vendredi, au lendemain de son décès, la Corporation des avocats français saluait un «Chevalier» de la Défense «courageux» et «indépendant». Pour l'avocat Georges Kiejman, feu Vergès était un «Géant» du barreau de Paris. Son collègue Me Charrière-Bournazel a salué un «très brillant avocat», «courageux» et «indépendant». «Un avocat, ce n'est pas un mercenaire. C'est un chevalier et Jacques Vergès était un chevalier», a opiné le président de la conférence des bâtonniers. A ceux qui le qualifiaient de «défenseur des causes perdues», son confrère Me Paul Lombard, autre ténor du barreau, a répondu en affirmant retenir de Feu Vergès un message : «Que personne n'est indéfendable et tout le monde a droit à un avocat quel que soit le passif qui pèse sur lui». Me Rémi Boniface a, lui, rendu hommage à un avocat «hors du commun par sa conscience». «Nous perdons un avocat hors du commun par sa conscience, son intelligence et son courage. On peut parler à l'infini des qualités et des défauts d'un homme et il avait des deux, et c'est ce qui moi me marque concernant cette personne assez extraordinaire», a-t-il témoigné.