Depuis janvier dernier, les agents immobiliers sont soumis à une règlementation tant attendue. Malheureusement, elle ne répond pas du tout aux aspirations de la corporation comme l'explique le vice-président de la Fédération nationale des agents immobiliers (FNAI), Abdelhakim Aouidat, dans cet entretien accordé au journal Le Financier. Le Financier: L'entrée en vigueur du décret relatif à l'activité des agents immobiliers a soulevé un tollé au sein de la corporation. Qu'en est-il? Abdelhakim Aouidat: Le décret 09-18 du 20 janvier 2009, paru au mois de février de la même année sur le Journal officiel, devait rentrer en vigueur à partir de juillet pour les agents qui sont en activité. Par contre, pour les nouveaux, son application sera effective dès la parution du décret, une fois que la commission d'attribution des agréments soit installée au niveau du ministère de l'Habitat. Chose qui n'est pas encore faite jusqu'à aujourd'hui. Donc, les agréments sont bloqués pour les nouveaux arrivés dans l'activité. Les anciens agents sont coincés. Pourquoi? Parce que l'article 8 de ce décret stipule que: pour accéder à cette activité, il faudra avoir une licence en droit, ou en gestion commerciale ou économique, en comptabilité, dans l'immobilier ou dans le domaine technique. 90% des agents immobiliers en activité n'ont pas de licence. Cela ne veut pas dire qu'ils sont des illettrés. Il s'agit de gens qui sont sur le terrain. Ils ont prouvé leur professionnalisme- surtout avec l'avènement de la FNAI- il y a une déontologie et un code d'éthique. Il y a aussi des documents mis en place. Comme il y a des investissements. Il s'agit de personnes qui se sont imposées sur le terrain et qui connaissent bien le marché de l'immobilier. Elles ont joué un important rôle de sensibilisation du public pour y aller vers la déclaration réelle et l'accompagnent des clients pour minimiser les pertes du Trésor public en terme de fiscalité. En cas de mauvaise transaction, les affaires atterrissent devant les tribunaux. La FNAI est là, avec ses agents immobiliers, pour palier à tout ça. Ce décret est une tentative d'exclure les anciens. Le ministre a déclaré, los d'une conférence de presse à laquelle j'ai assisté, «nous n'excluons personne à condition qu'on ramène un jeune». Nous sommes d'accord pour un jeune sortant de l'université. Mais d'où va-t-il avoir les trois années d'expérience. Il y a contradiction! Ce décret est pratiquement inapplicable pour les anciens et pour les nouveaux. Combien sont-ils ces agents immobiliers dont les dossiers sont bloqués? Il n'y a pas d'engouement de la part des agents en activité parce qu'ils savent pertinemment que s'ils déposent leurs dossiers, ils seront rejetés. Le nombre d'agents immobiliers ayant déposé leurs dossiers ne dépasse pas 200 dont ceux qui ne sont pas licenciés. Donc, leurs dossiers vont être rejetés. La FNAI est le partenaire du ministère de l'Habitat. En tant que tel, nous avons fait des propositions. Le fameux décret est né sur proposition de la FNAI depuis les années 2000. En 2005, lorsque nous avons saisi le ministère du Commerce, le Département chargé de règlementer les professions a pris notre dossier en main. Il a été repris par la suite par le ministère de l'Habitat. Chose que nous avons salué. Nous avons présenté un projet de décret. Sur la base des deux dossiers qui étaient entre les mains du ministère de Commerce et celui de l'Habitat, nous nous sommes réunis avec près de dix ministères qui composent la commission d'harmonisation des textes. Si ce texte avait été adopté, cela aurait été quelque chose de magnifique pour les agents immobiliers en activité. Car, nous avons toujours demandé d'élever le niveau de l'agent immobilier, de le professionnaliser. Nous avons mis au point un très bon programme de formation que nous avons mis en marche grâce à une convention avec l'ISGP (Institut Supérieur de Gestion et de Planification). Tout ce que nous avons fait n'avait pas d'importance…et le bon sens ne peut l'admettre. Que cherche ce ministère? Nous lui avons tendu la main. Nous nous sommes organisés. Maintenant, il veut nous exclure. Nous nous posons des questions. Est-ce en relation avec la dissidence au sein de votre Fédération? Tout est possible. Comme par hasard, dès que le décret a été publié sur le Journal officiel, nous avons eu une petite dissidence. Ce n'est pas logique, alors que nous essayons d'aller de l'avant. Pour nous, c'est une parenthèse, les problèmes sont devant les tribunaux. Nous avons tenu notre congrès. Le président (Horri Djebbar) a été réélu. Ce n'est pas un problème pour nous. Le véritable problème est la survie de l'agent immobilier. Quelles sont les retombées économiques pour le secteur? Parlons du marché de l'immobilier en Algérie. Justement, il a besoin de professionnels. Si on ferme à tous les spécialistes de l'immobilier qui sont sur le terrain, il ne va y avoir que de jeunes agents qui ne connaissent rien au marché de l'immobilier. Ce qui va créer un autre problème. Actuellement, nous maîtrisons la situation, car nous sommes des professionnels. Je ne peux dire que tous les agents immobiliers sont honnêtes. C'est un problème que nous réglons au sein de la corporation. Il existe 6.000 agents immobiliers inscrits au registre de Commerce. Imaginons que 90% des agents immobiliers disparaitraient. La profession est touchée par toutes les Lois de Finances. Sachez que même si on a une licence, quinze années d'expérience avec des formations, il faudra être constamment à la page dans ce métier. Notre rôle est d'accompagner le client, de le sensibiliser sur la déclaration réelle sur la transaction pour sa sécurité. Aussi, ce qui va contribuer à renflouer les caisses du Trésor public. D'ailleurs, cette sensibilisation contribue à lutter contre les transactions avec «chekara» (l'espèce), la circulation des fonds se fera par le biais des banques. La Loi de Finances complémentaire 2009 exonère d'impôts les bailleurs d'appartements de moins 80 m⊃2;. Notre rôle est d'informer le public, car y a un problème de communication. Il existe de bonnes lois qui ne sont pas vulgarisées. Va-t-on vers un Conseil de l'Ordre des agents immobiliers? Mieux, il faut créer une Confédération des professionnels de l'immobilier qui réunit tous les acteurs de l'immobilier. On aurait souhaité voir tous les professionnels tenir leur assemblée générale pour discuter des problèmes de l'immobilier en Algérie à l'occasion de la tenue de l'AG du Fonds de garantie et de caution mutuelle de la promotion immobilière (FGCMPI). Tous les professionnels de l'immobilier seraient représentés dans cette confédération : du fabricant de la brique au décorateur, en passant par tous les acteurs. Notre objectif est d'apporter un plus à l'économie nationale et au pays. Ce n'est pas de la démagogie. Nous sommes convaincus qu'avec ces actions, nous pourrions y aller très loin pour apporter notre aide et être des acteurs essentiels pour l'Etat. L'agent immobilier doit justifier de garanties financières -fruits d'un cautionnement permanent et ininterrompu spécialement affecté- dont le montant et la forme sont fixés par les pouvoirs publics, plus une assurance contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile professionnelle. Ceci a soulevé un tollé au sein de la corporation. Pourriez-vous expliquer cela? En effet, le décret 09/18 du 25 janvier 2009 règlementant la profession d'agent immobilier prévoit dans son article 8/1 Alinéa 4, que nous devions justifier de garanties financières suffisantes résultant d'un cautionnement permanent et ininterrompu spécialement affecté à la garantie de ses engagements vis-à-vis des clients. Ainsi que l'arrêté interministériel n° 04 du 12 juillet 2009 fixant le montant et la forme pour l'exercice de profession d'agent immobilier, dans son article 02 qui fixe les cautions pour l'administrateur des biens et l'agence immobilier à 150.000 DA et 100.000 DA pour les courtiers. Cette forme ne répond pas aux aspirations de le FNAI, car nous voulons créer une mutuelle de garantie par les Fonds propres de l'agent immobilier. Elles couvriront les fautes professionnelles en premier lieu et jouer le rôle de garant afin de supprimer l'avance de loyer exigé par les bailleurs. Quant à la couverture des loyers, et en dernier lieu, couvrir les agents immobiliers sur le plan social en créant des centres de santé, colonies de vacances pour nos enfant etc.