L'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA) vient de reposer la problématique des subventions en attirant l'attention des pouvoirs publics sur les fuites relevées dans le marché de la farine. Ces déperditions concernent également plusieurs autres produits, dont une grande partie prend la tangente vers les frontières. N'est-il pas temps d'ouvrir sans tabou un débat sur ces subventions ? L'UGCAA vient encore une fois de jeter un pavé dans la mare. Elle accuse simplement les minoteries de détourner 90% de la farine subventionnée, destinée normalement pour la fabrication du pain. Cité part le journal en ligne l'Econews.com , le vice-président de l'Union nationale des boulangers, affiliée à l'UGCAA, Amer Amar, reproche aux minoteries de livrer de fausses déclarations aux services d'inspection du ministère du Commerce car, selon lui, «la majorité de cette farine est soit vendue directement aux usines pour la production de biscuits, ou bien, versée dans le marché de gros, où elle est vendue à son prix réel». Une enquête, nous apprend-il, est ouverte par le ministère du commerce. A ce propos, le ministre Benbada conforte l'UGCAA dans ses propos tout en restant mesuré sur les chiffres. Le ministre du commerce parle de 50% de farine détournée. Même à ce niveau, la plaie reste profonde et le saignement du trésor public ne profite pas au citoyen. Le porte-parole de l'UGCAA, Tahar Boulenouar, avait déclaré à ce propos, que dans la politique nationale de subvention actuelle, «le consommateur est relégué au dernier rang». Les premiers bénéficiaires de cette subvention sont, selon lui, les producteurs étrangers et les importateurs, en second lieu, ceux qui détournent des quantités de farine au profit des fabricants de gâteaux et de gaufrettes et ensuite viennent les grossistes et les revendeurs. Pour pallier ces manigances, l'UGCAA, appelle le gouvernement à changer sa politique de subvention, en ciblant d'une manière directe le citoyen, sans passer par plusieurs intermédiaires. La dépense sociale budgétisée représente presque un quart du budget de l'Etat, et 13% du PIB national. En incluant les subventions non budgétisées, ce taux atteindrait les 30% du PIB, selon certains experts. Est-ce à dire pour autant que cette subvention contribue réellement à lutter contre la pauvreté et les inégalités sociales? Sur le terrain, force est de constater que c'est loin d'être le cas. La générosité de l'Etat prend souvent des chemins escarpés pour atterrir sur les comptes des trabendistes et trafiquants. Dans ce cadre, la Banque mondiale vient d'appeler les pays de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA), dont fait partie l'Algérie, à réviser leur système de protection sociale, notamment les subventions des prix, qui «alourdissent les finances publiques, et profitent davantage aux riches». La Banque Mondiale relève que la plupart des systèmes de protection sociale, mis en place dans les pays de la région MENA, dans le but de protéger les plus pauvres, s'assurent une protection insuffisante et laissent un grand nombre de familles dans la pauvreté. Les subventions occasionnent de grandes fuites. Citant essentiellement les subventions générales censées aider les couches pauvres de la population, la BM note que cette catégorie d'aide a pesé lourdement sur les budgets publics, alors même qu'elle profite le plus souvent et davantage aux riches, qu'aux pauvres et qu'elle génère de fortes distorsions économiques diminuant la demande de la main-d'œuvre. Dans ce contexte, le ministère des Finances a entamé, il y a une année, deux réflexions sur les subventions des produits de base et sur les salaires, deux postes représentant des dépenses «très importantes» dans le budget de l'Etat. Actuellement «tout le monde, y compris les gros fortunés en profitent, a souligné, en Avril 2013 Ferhane Sidi Mohamed, directeur général de la prévision et des politiques. Et ce qui aggrave la plaie c'est que -et c'est de notoriété publique- les subventions aux produits de première nécessité, se traduisent aussi par «la fuite des produits vers les pays limitrophes». L'Algérie figure parmi les pays arabes qui subventionnent le plus, selon le PNUD Ainsi, le pays consacre 6,6% de son PIB aux subventions à l'énergie, soit 10,59 milliards de dollars en 2010, dont,8,46 milliards de dollars de soutien au prix des carburants et 2,13 milliards de dollars a profité à l'électricité. A cela, il faut ajouter tous les autres produits aidés (sucre, blé, eau dessalée,…), ce qui porteles dépenses sociales budgétisées à 13% du PIB. Parmi ces dernières subventions, 80% vont au lait et à la farine.