Maurice Lévy, PDG du Groupe Publicis, présent dans 109 pays dont l'Egypte et six autres pays arabes, est un avant-gardiste en matière de publicité et a ce talent de poser sur le monde un regard précurseur. Portrait d'un homme d'affaires de gros calibre aux contours de philosophe. " La publicité, c'est vendre des courants d'air. Ces courants d'air font tourner des moulins ". Ainsi parlait Marcel Bluestein-Blanchet, le mythique fondateur du Groupe Publicis. C'est le disciple et le successeur de Marcel Bluestein-Blanchet, Maurice Lévy, qui a saisi toute la dimension du métier de publiciste et, sans hésitation, a pris l'initiative de le moderniser et a réussi en 20 ans à en faire un géant international de la publicité. Ce Français originaire du Maroc, plus précisément d'Oujda, près de la frontière algérienne, était issu en réalité d'une famille juive espagnole dont le père était un philosophe et un combattant contre le fascisme. Tout destinait donc Maurice Lévy à devenir à la fois Maïmonide, Saint-Simon mais aussi un Napoléon ou un " imperator ", comme on l'appelait dans quelques récents articles en France, des temps modernes. Il est devenu le magnat français le plus puissant du monde. Le président du Groupe Publicis est un partisan presque pathétique de la cause de la paix au Moyen-Orient. De ses origines juives-marocaines sont sorties des convictions politiques dans une tradition de conciliation entre les fils d'Abraham. Le PDG du Groupe Publicis ne cache pas sa double tristesse de la situation dramatique à Gaza d'un côté, et la paix " pas tout à fait cordiale " entre Israël et les pays arabes d'un autre. S'il est allé en Egypte en 1987 pour découvrir le pays où ont vécu Moïse, Joseph et Abraham, mais aussi le pays de Sadate, de Naguib Mahfouz et d'Oum Kalsoum, c'est parce qu'il croit profondément au rôle majeur de modérateur de l'Egypte dans la région. Mais cet homme, dont on parle beaucoup de l'influence et des réseaux en France et dans le monde, est également l'éminence grise, voire la dynamo des fameux forums économiques de Davos. En effet, Maurice Lévy croit profondément à l'impact du progrès économique sur la paix dans la région et dans toute la Méditerranée. Ainsi, œuvre-t-il constamment pour que se rencontrent ceux qui ont des idées avec ceux qui ont des fonds. Il croit également qu'il faut aider les pauvres non pas en leur donnant un poisson mais en leur offrant une canne à pêche. " L'or n'appartient pas à l'avare, c'est l'avare qui appartient à son or ", dit le proverbe chinois. Maurice Lévy met l'or au service de l'homme dans des dizaines de pays où son groupe est implanté. C'est ainsi qu'il voit que le projet de l'Union pour la Méditerranée, cher au président Nicolas Sarkozy, est un excellent rassemblement de projets politiques et économiques dans le bassin méditerranéen. " Vaut mieux, dit-il, le tourisme que le terrorisme ". Maurice Lévy rêve d'une Méditerranée réconciliatrice des cultures et des civilisations. Il parle de Mare Nostrum dans une terminologie proche des saint-simoniens. Pour Lévy, le Moyen-Orient sera la région la plus attirante pour les investissements durant les 20 prochaines années, surtout les pays du Golfe. Selon lui, les Européens doivent être conscients de cela et être présents dans une région qui intéresse aussi les investisseurs asiatiques, surtout les Chinois. En ce qui concerne le marché de la publicité, il y connaîtra un boom sans précédent. " Nous sommes conscients de cela et nous y serons présents ", lance-t-il. Effectivement, son groupe est déjà implanté dans plusieurs villes importantes de la région dont Koweït City, Riyad, Djeddah, Dubaï, Le Caire, Rabbat et Beyrouth. Peut-on dire de Maurice Lévy qu'il est un digne descendant de la tradition saint-simonienne et de son obsession d'universalisme nécessaire au bonheur des hommes ? Comme eux, il croit que l'Egypte a donné de la lumière au monde antique et que c'est à l'Occident d'aujourd'hui de la lui rendre. " Ex Oriente lux ", disaient les Latins. Ahmad Youssef