Frédéric Koller et Yahia Bélaskri Le Maghreb: La médiation de Thabo Mbeki au Zimbabwe est très critiquée. Vous avez été le négociateur de l'Union africaine ayant permis de trouver une solution à la crise politique du Kenya. Pourriez-vous intervenir dans cette nouvelle crise? Kofi Annan: J'ai conseillé et je parle avec plusieurs leaders de la région ainsi qu'avec les présidents de l'Union africaine, de la Communauté des pays d'Afrique australe et Thabo Mbeki. Lundi, j'ai parlé avec le secrétaire général de l'ONU. Il y a plusieurs personnes qui s'occupent de la situation. Nous n'en sommes pas encore au point où mon implication personnelle est posée. Mais je suis en éveil et je parle avec les leaders. - Vous dites que l'annonce d'un vainqueur de l'élection présidentielle dans les circonstances actuelles serait inacceptable pour les Zimbabwéens et la communauté internationale. Pensez-vous qu'un gouvernement d'union nationale, comme au Kenya, est encore envisageable? - Je ne l'exclurais pas. Les élections seules ne suffiront pas. Il y aura un besoin de médiation et de dialogue pour réconcilier les deux parties et permettre une transition en douceur ainsi qu'un arrangement en vue de former un gouvernement qui assure la stabilité et la paix. Les divisions sont si profondes qu'il serait illusoire de croire que les élections suffiront à résoudre le problème. Même s'il y avait des élections propres et justes, il y aura toujours la nécessité d'entreprendre des négociations sérieuses afin de savoir comment gérer leur pays, comment reconstruire leur pays qui a souffert et l'économie qui est brisée. L'économie devra être au sommet des priorités. - Robert Mugabe et Morgan Tsvangirai ont tous deux rejeté l'idée d'un gouvernement d'union. - Il est trop tôt pour dire si c'est un refus définitif ou si cela fait partie d'une tactique de négociation. Nous devons attendre qu'ils réalisent quelles sont les options. Je ne suis pas sûr qu'ils réalisent la difficulté de la situation dans laquelle ils se trouvent. - Thabo Mbeki ne voit toujours pas de crise. Qu'en pensez-vous? - Il ne le dit plus depuis quelque temps.