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“Les pays riches doivent transf rer leur savoir-faire” Interview de Kofi Annan, le président du Forum humanitaire mondial qui se réunit à Genève sur le thème du changement climatique
Frédéric Koller, Richard Diethelm (Tages-Anzeiger) Yahia Bélaskri ( Le Maghreb / RFI) Le Maghreb : Vous avez appelé mardi matin à une justice climatique. Comment peut-elle fonctionner dans un monde d'injustices en matière de répartition des richesses ou des droits de l'homme?
Kofi Annan: Il est important de sensibiliser le monde et en particulier les Etats qui vont participer à la réunion climatique de Copenhague de 2009. On vit tous sur le même navire et le réchauffement climatique est un problème pour tous. Ceux qui ont le plus de comptes à rendre pour ces dommages ont aussi le plus de responsabilités pour les corriger. Ils doivent éviter que les conséquences du réchauffement pèsent principalement sur les pays les plus pauvres. - Vous avez dit à plusieurs reprises que c'est aux pollueurs de payer et non aux pauvres. Quelles solutions voyez-vous dans une perspective d'accord post-Kyoto? - C'est une question clé. Sans le facteur de justice, de responsabilisation des pollueurs, il n'y aura pas d'accord. - Qu'en est-il du groupe de pays comme le Brésil ou l'Inde qui sont en voie de s'enrichir? - Ils ont des responsabilités. Ils devraient les accepter et faire leur part pour diminuer les gaz à effet de serre. Je ne fais pas partie de ceux qui disent que les pays en voie de développement ne doivent pas être tenus pour responsables. Nous sommes tous responsables. C'est une question de degré. - Yvo de Boer, le responsable de la lutte contre le réchauffement climatique au sein de l'ONU, a dit hier que les pays industrialisés ont une responsabilité historique et qu'ils ont le pouvoir économique pour résoudre le problème. En sont-ils conscients? - Les pays industrialisés qui maîtrisent les énergies vertes devraient transférer leur savoir-faire vers le tiers-monde. Les pays en voie de développement n'auront pas à faire le même chemin, à polluer autant que les pays développés si ce transfert fonctionne. Si les gouvernements créent les bonnes incitations, le bon système de régulation afin que les entreprises passent aux énergies vertes, cela aura un effet. - Yvo de Boer a aussi expliqué que le principal problème du Sommet de Copenhague est le "manque criminel de leadership" dans les négociations. - Les leaders du monde doivent accepter l'urgence du problème. Nous, le peuple, nous avons aussi du pouvoir. Ce n'est pas quelque chose que nous devrions laisser aux seuls politiciens et leaders. Si, avec nos voix, avec nos votes, nous sommes capables d'imposer les problèmes liés au changement climatique au sommet de l'agenda politique, les politiciens auront alors le courage de prendre les bonnes décisions. Il faut exercer une vraie pression. - A la fin de la conférence de la FAO à Rome vous avez affirmé que l'Afrique avait besoin d'une révolution verte. Que devrait-elle être pour éviter les échecs qu'a connus l'Asie dans sa révolution verte? - Nous voulons une révolution verte propre à l'Afrique. Elle doit être différente car nous avons des cultures céréalières différentes de l'Asie. La révolution verte implique la monoculture. C'était le riz en Asie et le maïs en Amérique latine. En Afrique, il y a une douzaine de céréales dont il faudra tenir compte en indiquant aux agriculteurs comment utiliser les bonnes semences en fonction des terres, de l'eau et de l'environnement. Il y a eu des aspects négatifs dans la révolution verte asiatique. Mais elle a permis de nourrir des millions de personnes. L'Inde n'a plus connu de famine ces dernières décennies. Des fermiers ont perdu leurs terres, il y a eu des suicides, il y a des abus de fertilisants, mais on peut étudier ce modèle pour éviter les mêmes problèmes. Au début, il faudra des subsides gouvernementaux. Les gouvernements américains et européens soutiennent leur agriculture. Il serait normal que les agriculteurs africains soient également soutenus.