La crise financière qui dure depuis d'un an et qui s'est exacerbée cette semaine suscite chez nombre de commentateurs la comparaison avec le krach boursier de 1929 et la Grande dépression qui a suivi, mais on en n'est pas encore là, estiment les vétérans des marchés."La Grande dépression, rappelle Allan Sloan, éditorialiste au Washington Post et à Fortune, a vu des milliers de banques faire faillite et les gens perdre leurs économies, un taux de chômage de 25%, des troubles sociaux et des tentes pour les pauvres." La facture des différentes mesures de sauvetage des Fannie, Freddie et autres AIG s'élève certes déjà à plus de 1.000 milliards de dollars pour le contribuable américain, mais le taux de chômage n'a pas encore flambé et le pays est encore en croissance économique. "J'ai déjà vécu de très nombreuses débâcles. Chaque fois qu'on en traverse une, elle semble être la pire depuis 1929", commente Theodore Weisberg, membre de la Bourse de New York depuis une quarantaine d'années. Parmi les débâcles déjà oubliées figurent notamment la crise asiatique de la fin des années 90 et l'éclatement de la bulle internet au début des années 2000 qui avait fait disparaître en fumée plusieurs milliers de milliards de dollars sur le Nasdaq. Auparavant, il y avait eu le krach d'octobre 1987. Les livres d'histoire sont truffés de références à des lundis noirs, des mardis ou encore des jeudis noirs. Lehman Brothers et AIG ont tous deux chuté à cause de placements liés à la dette et d'autres produits complexes et interconnectés, qui ont entraîné une chute bien plus rapide que ce que Wall Street et les autorités de régulation étaient à même de gérer. C'est une similitude importante avec le krach de 1929, souligne Maury Klein, professeur émérite à l'Université du Rhode Island et auteur de "Rainbow's End: The Crash of 1929." "Ce qui est identique dans chaque cas est qu'on a une situation où on commence à jouer avec des choses qu'on ne comprend pas avec des montants toujours plus grands", explique-t-il. La crainte sous-jacente de tout un chacun est que la débâcle se propage à l'économie réelle. Mais aujourd'hui, le tableau économique des Etats-Unis est très différent de celui de 1929. "Avec seulement un chômage de 6%, nous nous demandons même si nous sommes en récession", souligne Richard Sylla, professeur d'histoire des institutions financiers et des marchés à l'université de New York. Il est certes difficile de prédire jusqu'où s'enfonceront les marchés. Les ramifications de la crise née des crédits à risques subprimes pourraient aller plus profond que prévu dans le système nerveux financier. Il pourrait y avoir des effets en cascade de nouvelle baisse de la valeur des maisons et de nouvelles pertes d'emploi. Mais il est peu vraisemblable qu'on en arrive à ce que les gens n'aient qu'un miche de pain à avaler pour tout repas quotidien avant de dormir à la belle étoile.Le président de la Réserve fédérale Ben Bernanke et le secrétaire au Trésor Henry Paulson sont déterminés à éviter les erreurs de 1929, assure Brad DeLong, professeur d'économie à l'université de Californie. "Ils veulent faire leurs propres erreurs", dit-il.