Frappés de plein fouet par la crise, les constructeurs américains ont commencé, mardi 2 décembre, à présenter leurs plans de restructuration demandés par le Congrès en échange de l'octroi éventuel d'une aide publique. Ford et Chrysler ont fait savoir à cette occasion qu'ils demandaient au Congrès la possibilité de bénéficier d'un prêt-relais, tandis que General Motors a réclamé aux autorités américaines 12 milliards de dollars de crédits dont 4 milliards dès ce mois-ci pour lui éviter la faillite. La présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a clairement indiqué que l'octroi d'une aide ne faisait plus guère de doute. Mais elle a souligné que le Congrès se réservait le droit de réécrire les plans stratégiques des constructeurs de Detroit si nécessaire. Les trois grands constructeurs réclament une aide qui, cumulée, représenterait 34 milliards de dollars : jusqu'à 18 milliards pour GM, 9 pour Ford, 7 pour Chrysler. Mais, a indiqué Mme Pelosi : "Nous voulons voir un engagement pour l'avenir. Nous voulons voir une restructuration" des outils de production et "une réforme de la rémunération" des dirigeants. Le directeur général de Ford, Alan Mulally, rémunéré 28 millions de dollars en 2007, a souligné qu'il serait prêt à accepter un salaire annuel d'un dollar... à partir du moment où son groupe tirerait sur la ligne de crédit consentie par le gouvernement. Son homologue de GM, Rick Wagoner, en a fait autant. Chez Chrysler, Robert Nardelli y était prêt dès le mois dernier. Tous ont promis de remanier leur gamme, le jour même de la publication de nouveaux chiffres de ventes pour novembre catastrophiques aux Etats-Unis avec un plongeon de près de 37 % des ventes, qui se retrouvent à leur plus bas niveau depuis 1982. GM a vendu 41 % de voitures en moins, Ford 30 % et Chrysler 47 %. Si les chiffres publiés en Asie et en Europe ont montré que la crise que traverse le secteur se propage à tous les continents, contraignant au passage les constructeurs à réduire partout leur production, aux Etats-Unis, les ventes ont signé leur 13e mois consécutif de baisse avec des chutes souvent spectactulaires. Si on tient compte de l'évolution de la population, les chiffres de novembre constituent même la pire performance que le secteur autmobile américain ait connue en un demi-siècle. Cette fois, aucun constructeur n'échappe à l'extrême prudence des automobilistes ; et à l'exception de Subaru (- 7,8 %), les baisses des ventes sont toujours à deux chiffres : -29,8 % pour Ford, - 33,9 % pour Toyota et - 42,2 % pour Nissan. General Motors s'est dit prêt à sacrifier le tiers de ses salariés américains, avec 31 500 suppressions d'emplois prévues d'ici à 2012. Le constructeur, critiqué pour le nombre excessif de ses marques, a aussi annoncé qu'il avait engagé une réflexion sur l'avenir de Saab et de Saturn. En d'autres termes, ces deux marques seront vendues ou fermées. Le groupe de Detroit pense redevenir rentable une fois son plan de restructuration mené à bien, même si le marché américain devait tomber à 12,5-13 millions de véhicules, contre 16 à 17 millions ces dernières années. GM prévoit de commencer à rembourser ses financements à partir de 2011 et d'avoir tout remboursé "d'ici à 2012". Ford, considéré comme le moins mal en point des "Big Three", a assuré avoir bon espoir de "réussir sa restructuration sans toucher au crédit que le Congrès déciderait de débloquer", tablant sur un retour à l'équilibre d'ici à 2011. Le constructeur a promis d'investir 14 milliards de dollars en nouvelles technologies pour accélérer la sortie de véhicules plus petits et plus propres, notamment des motorisations tout électrique à partir de 2010. Chez Chrysler, le plus petit, on n'a pas avancé de nouvelles mesure, expliquant compter sur le renouvellement de la gamme : "Chrysler s'est déjà engagé, et est en train d'accélérer un plan pour améliorer sa structure de coûts, simplifier ses activités, rediriger sa gamme pour satisfaire aux normes écologiques et à la demande de produits plus 'verts', et rationaliser son réseau de concessionnaires." Jeudi et vendredi, MM. Wagoner, Mulally et Nardelli retournent en audition au Congrès, deux semaines après de premières prestations qui avaient laissé les élus de marbre et tourné au fiasco de relations publiques.