Les auditions des principaux accusés dans l'affaire d'El Khalifa Bank, pour association de malfaiteurs, vol qualifié, faux et usage de faux, examiné par le tribunal criminel de Blida, depuis le 8 janvier dernier, ont pris fin mardi et le procès se poursuit depuis hier par l'interrogatoire des mis en cause pour délits. Rappelons que ce procès concerne 104 accusés, 35 mis en cause pour crimes, dont 7 en fuite, y compris Rafik Abdemoumen Khalifa, ancien patron du groupe Khalifa, jugés par contumace, et une soixantaine d'autres qui comparaissent pour délits. Le tribunal a également convoqué pour audition 280 témoins dont des hauts responsables de l'Etat, anciens ou en poste, et 120 victimes constituées pour la partie civile. A l'issue de l'interrogatoire des principaux accusés, de l'audition d'une partie des témoins, ainsi que des experts, le tribunal criminel présidée par Fatiha Brahimi, a confirmé les principaux faits résumés dans l'acte de renvoi établi par l'instruction. Donc, les premières révélations ont d'abord prouvé que "l'empire financier" a été construit par le principal accusé, en fuite, Rafik Khelifa, à partir de la vente frauduleuse d'une villa avec l'usage de faux documents et la complicité d'un huissier de justice. Elles ont ensuite démontré que cet empire reposait sur El Khalifa Bank, qui a été constituée en mars 1998, sur une base "illégale". L'illégalité de la banque et, par conséquent, de son agrément, a été mise en lumière, du fait, que le montant du capital initial fixé par la loi sur la monnaie et le crédit à 500 millions de DA, pour sa constitution, n'a pas été payé entièrement au Trésor public, qui n'a reçu que 85 millions de DA, en violation flagrante avec cette loi. En outre, la modification apportée à la liste des actionnaires de la banque ne s'était pas accomplie conformément à la loi. Par ailleurs, les interrogatoires et auditions ont fait ressortir que les fonds déposés dans les caisses de la banque et ses différentes succursales, provenant d'entreprises publiques et privées et d'organismes sociaux, étaient obtenus par la corruption des dirigeants de ces entités. Il est à rappeler, que les responsables de la banque, dont le principal dirigeant, offraient des cadeaux (cartes de soins, de payement, véhicules, billets de voyage gratuits) et des commissions (pourcentage sur les intérêts générés par les dépôts) pour convaincre les dépositaires des fonds de ces entités, outre des taux d'intérêts élevés. Une quarantaine de dirigeants de ces organismes figurent, également, parmi les accusés pour crimes et délits. Il est important de dire que, les premières révélations ont fait apparaître que les responsables de la banque géraient les fonds publics et particuliers déposés en faisant fi des règles les plus élémentaires de la gestion bancaire. Elles ont mis en lumière l'absence de toute procédure prudentielle dans la gestion des fonds mais également la défaillance du contrôle bancaire, aussi bien interne, que celui relevant de la Banque d'Algérie, lequel en dépit de plusieurs inspections diligentées n'a pu établir les dysfonctionnements causant la dilapidation des fonds en monnaie nationale et en devises étrangères. Enfin, les auditions ont confirmé que le trou financier qui était à l'origine de la banqueroute de la banque en 2003, et évalué à plus de 3 milliards de DA, n'était pas définitif compte tenu notamment de l'absence de documents comptables justifiant les entrées et sorties des fonds au cours des cinq ans d'existence de la banque. A ce sujet, il a été relevé qu'après le constat de banqueroute et, notamment, après la cessation de toute opération extérieure de la banque, les responsables ont tenté de justifier le trou financier, en confectionnant à la hâte des documents comptables falsifiés. Ainsi, le rapport de l'expertise d'El Khalifa Bank à sa liquidation, a fait ressortir que les écrits entre sièges (EES) de certaines de ses succursales étaient établis sur toute sorte de documents allant de la "simple feuille bien rédigée à une écriture sur une carte de visite". L'autre fait majeur dans cette affaire est que les principaux accusés qui étaient responsables des entrées et des sorties des fonds ont affirmé qu'ils ne faisaient qu'obéir "aux ordres du patron", pour justifier l'absence de documents comptables sur la traçabilité de ces fonds.