Le procès de l'affaire Khalifa Bank s'est ouvert, hier, au tribunal criminel de Blida. 104 personnes impliquées seront jugées pour différents chefs d'inculpation à savoir association de malfaiteurs, vol qualifié, escroquerie, abus de confiance et falsification de documents officiels. Le procès devrait d'ailleurs durer plusieurs semaines et le tribunal devrait tenir deux séances quotidiennes. C'est une magistrate, Maître Fatiha Brahimi, qui préside l'audience. Elle est assistée des présidents des tribunaux de Tipasa et Chéraga. Plusieurs centaines de personnes (accusés, témoins, avocats) se pressaient dans le plus grand désordre dans une salle d'audience exiguë. Plus de 150 avocats et une soixantaine de représentants de la partie civile prennent part à ce procès qui porte, dans son premier volet, sur un "trou" de 320 millions d'euros dans la caisse principale de Khalifa Bank, noyau central du groupe.A l'ouverture de la séance, la présidente du tribunal a entamé l'audience par la présentation des 104 inculpés dans l'affaire. Sur les 104 inculpés, il y a 35 prises de corps, sept sont en détention préventive. Dix accusés, étaient absents hier , dont sept sont en fuite, parmi lesquels Rafik Khalifa. Sous mandat d'arrêt international depuis le 14 juin 2003, ce dernier sera jugé par contumace. Trois accusés, dont l'ancien gouverneur de la Banque d'Algérie, Abdelwahab Keramane, son frère Abdennour Keramane, ancien ministre des Finances, et une nièce, Yasmine Keramane, ex-déléguée de Khalifa Airways, étaient également absents. Ces derniers ont fait savoir par voie de communiqué qu'ils refusaient d'assister au procès, se disant "pris pour des boucs émissaires dans cette affaire". Une soixantaine d'accusés parmi lesquels le PDG du groupe pharmaceutique Saidal, Ali Aoun, ont comparu libres. Les autres, dont l'ancien sélectionneur de l'équipe nationale de football Ighil Meziane, se sont constitués prisonniers à la veille du procès ou étaient en détention préventive depuis plus de deux ans. Les principaux chefs d'inculpation retenus sont: constitution d'association de malfaiteurs, vol qualifié, escroquerie, abus de confiance, falsification de documents officiels, faux et usage de faux. Les accusés encourent jusqu'à dix ans de prison et de lourdes amendes. La séance a ensuite été consacrée à l'appel de plus de 280 témoins dont des ministres, des hauts cadres de l'Etat et des personnalités parmi lesquels le ministre des Finances Mourad Medelci, le ministre d'Etat Bouguerra Soltani, l'ancien ministre de l'Habitat Abdelmajid Tebboune et le secrétaire général de la centrale syndicale, Abdelmajid Sidi Saïd et de quelque 120 victimes dans cette affaire, représentant notamment des entreprises et organismes publics et privés. Un membre du collectif de la défense a demandé au tribunal la présence, en tant que témoin, de M. Ahmed Ouyahia, en sa qualité d'ancien chef du gouvernement. La présidente a rétorqué que si le témoignage de M. Ouyahia peut apporter du nouveau dans l'affaire, le tribunal n'hésitera pas à le convoquer. Ce qui peut également être le cas pour l'actuel gouverneur de la Banque d'Algérie Mohammed Leksaci. Pour rappel, Khalifa Bank a été créée le 25 mars 1998 avec un capital social de 500 millions de dinars et a eu son agrément le 27 juillet de la même année. Celle-ci a d'ailleurs constitué le cœur d'un empire composé de 11 entreprises. Les déboires de l'empire Khalifa avaient commencé par l'arrestation en février 2003 à l'aéroport d'Alger de trois de ses cadres qui tentaient de sortir frauduleusement une mallette contenant deux millions d'euros et qui a été suivie par la mise en faillite du groupe en juin 2003. En effet, la justice a été saisie pour cette affaire après que les nombreuses inspections effectuées chez "Khalifa Bank" par la Banque d'Algérie eurent révélé des cas de transgression de la loi et des irrégularités dans le fonctionnement et la gestion de cette banque. L'affaire porte sur un trou de 3,2 milliards de dinars constaté dans la caisse principale de la banque à la suite d'irrégularités dans la gestion des dépôts. L'affaire "Khalifa Bank" dont l'instruction a été clôturée au mois de juin dernier, a été examinée le même mois par la chambre d'accusation près la Cour de Blida, après plusieurs reports à la demande du collectif des avocats au motif, que le délai d'examen de l'ordonnance de renvoi accordé à la défense n'était pas suffisant au regard du nombre important de prévenus. Après plusieurs jours de délibérations, la chambre d'accusation a décidé du renvoi de cette affaire, devant le tribunal criminel de Blida. La majorité du collectif de la défense a introduit un pourvoi en cassation quant aux qualifications d'accusations. L'affaire a été différée devant la Cour suprême qui a rejeté ce pourvoi en décembre dernier. Le premier président de la Cour suprême, Kaddour Berradja, avait indiqué que la chambre d'accusation a examiné la décision de la Cour de Blida et "a constaté qu'il n'y avait pas de violation de loi et elle a rejeté les pourvois".