Le sommet des 60 ans de l'Otan s'est ouvert à Strasbourg et à Kehl sur fond de rapprochement transatlantique et de retour de la France dans le commandement militaire intégré, mais Barack Obama a pressé dès son arrivée ses alliés européens de faire plus en Afghanistan. Organisé symboliquement sur la frontière franco-allemande, la rencontre annuelle des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Alliance atlantique doit déboucher sur des décisions concrètes qui engageront l'avenir du bloc à court et moyen terme. En plus de faire le point sur la situation en Afghanistan, elle doit ainsi permettre de choisir un nouveau secrétaire général, d'accueillir deux nouveaux membres, la Croatie et l'Albanie, d'avancer sur le réchauffement des liens avec la Russie et de lancer la définition d'un nouveau concept stratégique mieux adapté aux enjeux du 21e siècle. Sur l'ensemble de ces sujets, les Européens, enthousiastes à l'idée de tourner la page de l'administration Bush, et les Américains ont fait montre d'unité au premier jour du sommet, sans pour autant que Washington ait obtenu de ses alliés l'envoi d'un nouveau contingent militaire en Afghanistan. "Nous soutenons complètement la nouvelle stratégie américaine en Afghanistan", recentrée sur l'action civile et la lutte contre Al Qaïda, a déclaré le président français Nicolas Sarkozy, lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue américain, quelques heures avant l'ouverture formelle du sommet. "Nous en avons parlé avec le président Obama: il n'y aura pas de renforts militaires français parce que la décision des renforts elle a déjà été prise l'an passé", a-t-il ajouté, disant par ailleurs que la France était prête à faire davantage sur le plan de la gendarmerie et de l'aide économique. Plus tard dans la journée, devant de jeunes Européens réunis à Strasbourg, Barack Obama a déclaré que la composante militaire de l'action occidentale en Afghanistan était essentielle et que "l'Europe ne (pouvait) tout simplement pas attendre des Etats-Unis qu'ils en supportent seuls le fardeau". "C'est un problème commun qui nécessite un effort commun", a-t-il poursuivi. A l'initiative de la France, plusieurs pays du Vieux continent devraient annoncer à Strasbourg un effort spécifique en dépêchant la Force de gendarmerie européenne, sous protection de l'Isaf (Force internationale d'assistance à la sécurité) pour former la police afghane. Ils pourraient aussi préciser leurs intentions quant aux efforts nécessaires pour sécuriser l'élection présidentielle, prévue pour août. Le secrétaire général de l'Alliance, Jaap de Hoop Scheffer, a chiffré ces derniers jours à quelque 4.000 hommes le contingent nécessaire à cette tâche. Lors de leur entretien bilatéral, Barack Obama et Nicolas Sarkozy ont discuté non seulement de l'Afghanistan et de l'Otan mais aussi de l'Iran, de la Russie et du Moyen-Orient, autant de sujets sur lesquels ils ont fait état d'une "parfaite identité de vues", selon les mots du chef de l'Etat. Le président américain s'est ensuite rendu en Allemagne pour des discussions avec la chancelière Angela Merkel. Le dîner de vendredi, qui a formellement ouvert le sommet, a été consacré à deux questions: la Russie, avec le réchauffement des relations avec Moscou, et l'avenir de l'Alliance, avec notamment le lancement du nouveau concept stratégique. L'Otan cherche par ce biais à s'adapter à la fois à un monde aux contours modifiés et aux nouvelles menaces - terroristes, énergétiques, climatiques, cybernétiques - qui se sont développées ces dernières années, mais aussi à tenir compte du nouveau visage de l'Alliance, qui a accueilli pas moins de 12 nouveaux membres depuis dix ans. La mission de mener à bien ce toilettage sera confiée au successeur de Jaap de Hoop Scheffer, dont le mandat de secrétaire général prend fin le 31 juillet. Le Premier ministre danois, Anders Fogh Rasmussen, qui avait les faveurs des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne, de l'Allemagne et de la France depuis plusieurs semaines, s'est déclaré candidat à ce poste vendredi. Il n'est néanmoins pas parvenu à vaincre les réticences de la Turquie, qui s'oppose à son choix notamment en raison de la façon dont il a géré en 2006 l'affaire des caricatures de Mahomet, publiées à l'époque par un quotidien danois. Les discussions sur le choix du prochain secrétaire général se poursuivront samedi, a précisé en fin de soirée le porte-parole de l'Otan, James Appathurai.