Le Centre culturel français d'Alger (CCF) recevra dans une semaine pile, l'une des légendes vivantes du blues : Roland Tchakounté pour un spectacle grandiose qui sera organisé à la salle Ibn Zeidoun de l'Office Riadh El Feth. Le rendez- vous lyrique unique en ce genre se déroulera en compagnie de Mathias Bernheim à la percussion, et Mick Ravassat au dobro et guitare. Que du son donc à l'occasion de cet événement qui donne quelque part un avant- goût à ce rendez-vous de la fête monumentale du Panaf prévu le 5 juillet prochain à Alger."Pour connaître l'âme d'un homme ou d'un peuple, écoute l'émotion qui se dégage à travers sa musique " disait ce camerounais qui a commencé son apprentissage musical avec les percussions puis la guitare. Il s'initie ensuite au piano et à l'harmonica et fait ses premières expériences de groupe au Cameroun comme bassiste chanteur dans différentes formations locales spécialisées dans les reprises des chansons afro-américaines. (James Brown, Wilson Picket, Jimi Hendrix, etc.). Il attrape le virus du blues en écoutant Crawling Kingsnake de John Lee Hooker et n'a désormais qu'un seul rêve, devenir Bluesman. Il réussit à créer une parfaite synthèse entre ses racines africaines, ses influences blues et la singularité d'interpréter son répertoire en " bamiléké ", son dialecte maternel. Roland Tchakounté qualifie sa musique de " mélodie sauvage " servant à aborder des sentiments souvent tristes ou joyeux, mais aussi à exprimer l'état d'abandon dans lequel est plongé le continent africain. Utopique revendiqué, son désir est de rassembler l'espèce humaine au sein d'une seule et même grande famille sans distinction de race ni de couleur. Que de chemin parcouru depuis " Aba Ngo ", le précédent opus que Roland Tchakounté avait autoproduit en 2005 ! Sur les routes du monde bien évidemment puisqu'en tandem, en trio ou en groupe, le plus francilien des Camerounais est parti prêcher la bonne parole de son world blues de Chicago à Memphis, de Cognac à Mantes la Jolie et de Montréal jusqu'en Belgique, y faisant à chaque fois l'unanimité … Mais aussi musicalement puisque d'un effort en duo acoustique où seules la voix et les guitares se mêlaient, Roland Tchakounté passe à une formule où la guitare de Mick Ravassat s'électrifie et se double occasionnellement d'une basse et associe non seulement les percussions de Mathias Bernheim devenues indispensables à quiconque a découvert l'artiste en live mais aussi de façon plus impromptue les claviers de Christian Rousset. A sa voix si caractéristique et à son jeu de guitare acoustique particulièrement sensuel, Roland Tchakounté ajoute quelques notes tirées d'un harmonica sorti presque par hasard de sa poche et décline sa musique dans une direction de plus en plus élargie, les racines restant plus que jamais blues mais les sonorités s'en allant dans une voie où rien n'est interdit, que le résultat se teinte par moment de funk, de folk ou encore d'une petite touche de pop ! Son album "Waka " est selon la critique le plus " fabuleux et le plus mature " que Roland Tchakounté propose , un ouvrage pour lequel il a choisi de ne pas jouer la simplicité en se répétant mais au contraire de se renouveler et surtout d'évoluer, au risque de choquer quelque peu un parterre de fans sans cesse grandissant mais en sachant au fond de lui-même que la démarche serait comprise tellement elle est sincère. Des errances de ses trois dernières années, le chanteur a appris énormément et c'est avec beaucoup d'humilité qu'il met en pratique tout ce que ses rencontres ont pu lui apporter, ouvrant son cœur encore un peu plus grand et persévérant encore et toujours à chanter dans son dialecte maternel, le Bamiléké, que très peu de gens peuvent comprendre sur le papier mais que chacun ressent à sa manière au fond de soi, et laissant même un court moment entrer le Français dans une nouvelle composition. Par Rachida Couri