Même s'ils résistent mieux que les flux de capitaux investis, les transferts de fonds des émigrés vers leurs pays d'origine ont commencé d'être affectés par la crise économique et financière. Selon une étude publiée lundi par la Banque mondiale, les envois de fonds des émigrés vers les pays en voie de développement devraient baisser de 7,3% en 2009, pour n'atteindre que 304 milliards de dollars, après une hausse de 15% en 2008. Selon la Banque mondiale, ces transferts de fonds des émigrés à leurs familles ont commencé à ralentir au quatrième trimestre de 2008, suite à l'intensification de la crise au tournant de l'été, a précisé le document. En mars dernier, la Banque mondiale estimait que les pays en développement allaient faire face en 2009 à un déficit de financement de 270 à 700 milliards de dollars "du fait que les investisseurs privés fuient les marchés émergents". La relative bonne tenue des transferts de fonds des émigrés s'expliquerait, selon le même rapport, par le fait que "si les nouveaux flux migratoires ont baissé, le nombre d'émigrés a été relativement peu affecté par la crise". Malgré cela, ces transferts, vitaux pour le développement de certains pays, pourraient baisser davantage si la crise se prolonge, en cas de mouvements sur le marché des changes, et du fait que les "contrôles migratoires pourraient être renforcés encore dans les principaux pays de destination", a souligné le rapport. Notons que selon les chiffres de la Banque mondiale, en 2007, 190 millions de travailleurs migrants dans le monde ont fait parvenir à leurs familles 318 milliards de dollars (environ 248 milliards d'euros), selon les statistiques de la Banque mondiale. Si l'on considère les seuls envois au Sud, ces transferts de fonds ont atteint 240 milliards de dollars. Entre 2000 et 2007, ces envois ont été multipliés par quatre. Mais depuis un an, la croissance s'est nettement ralentie et, en 2009, les transferts pourraient décliner. Un tiers d'entre eux ont concerné, en 2007, trois pays : l'Inde (27 milliards de dollars en 2005), la Chine (25,7 milliards) et le Mexique (25 milliards). Mais pour tous les pays du Sud, ces flux sont vitaux. La Banque mondiale estime qu'ils représentaient 17 % du produit intérieur brut (PIB) d'Haïti au début des années 2000 et 40 % du PIB somalien à la fin des années 1990. Les études de la Banque mondiale ont montré que l'argent des immigrés a contribué à réduire la misère. En Ouganda, la part de la population qui vivait en dessous du seuil de pauvreté s'est réduite de 11 % en 2005. Même si l'Afrique ne réceptionne qu'une part minime - 4 % seulement - de l'ensemble des fonds migrants, une réduction sensible de ces sommes commence à inquiéter la Banque africaine de développement (BAD). Celle-ci estime que les 15 milliards de dollars attendus en 2008 (14 milliards en 2007) pourraient faire défaut. D'ores et déjà, le Mbuzi ya Jamii (littéralement "une chèvre pour la famille"), qui permettait aux Kényans immigrés de payer en ligne des produits et services destinés à la famille restée au pays, a vu son chiffre d'affaires décliner, relève un rapport de la BAD. Les transferts de fonds à destination de l'Amérique latine et des Caraïbes se sont élevés à près de 60 milliards de dollars au cours de 2007. Soit une hausse à un chiffre entre 2006 et 2007 (6 %), alors qu'entre 2000 et 2006 la hausse a été de 19 % par an. Isma B.