Perçus au départ comme une simple opération de routine à la portée de n'importe quelle entreprise de voirie et réseaux divers, les travaux engagés depuis près d'une année au niveau de la rue Mellah Slimane, l'artère principale de "Souika", à Constantine, se sont révélés bien plus complexes et plus ardus que prévus, a-t-on constaté. Des difficultés qui, apparemment, n'étaient pas prévues au départ, sont en effet apparues en cours de route, retardant la réception des travaux initialement attendue pour octobre 2006. Aujourd'hui, seule une tranche sur les trois constituant la charge globale de ces travaux a été terminée et réceptionnée. Cette opération qui porte sur la réfection des réseaux et du revêtement en pavés de la rue Mellah Slimane a été ordonnée par M. Boudiaf, le wali de Constantine, dès les premiers mois de sa prise de fonction, dans le but de "faire le premier pas" dans la concrétisation du projet de restauration de la vieille ville de Constantine. De nombreuses difficultés de terrain ont fait que seule la tranche "C", qui va de la rue Bentchicou au lieu-dit Zelaika, est aujourd'hui terminée et réceptionnée. La tranche "B" qui va de Abdellah Bey à Seyda est à 80 p.c de son achèvement, et la tranche "A" reliant Abdellah Bey à Bab El Djabia est, pour sa part, au stade du revêtement. M. Haddouche, responsable de la commission technique de suivi des travaux au niveau de la cellule de réhabilitation de la vieille ville, évoque à ce sujet des difficultés liées à la nature du terrain, mais aussi à celle des travaux qui se sont avérées déjà bien spécifiques. L'étroitesse et l'encombrement de cette rue très commerçante ont imposé le recours au travail de nuit et à l'enlèvement manuel des déblais, ralentissant ainsi le rythme des travaux, mais c'est l'absence de main d'oeuvre qualifiée et de matériaux appropriés qui a constitué l'entrave majeure. Considérée comme un paramètre essentiel dans toute oeuvre de restauration du patrimoine bâti, la donne de la main d'oeu-vre qualifiée, est loin d'être ignorée par les spécialistes de la question à Constantine. Depuis le début des années 1980, tous les responsables ont insisté sur la nécessité d'ouverture d'ateliers de formation d'artisans dans les différentes spécialités de la construction traditionnelle. Pour les travaux de la rue Mellah Slimane, cette question de la main-d'oeuvre qualifiée ne devait pas, à première vue, se poser du fait qu'il ne s'agit que de la réfection des réseaux et du revêtement. Mais très vite le retour à cet ancien revêtement qu'est le pavé s'est avéré une spécialité en soi qui diffère beaucoup de la pose du carrelage. Or les entreprises en charge des travaux ne possèdent que des carreleurs qui n'ont jamais eu affaire au pavage. La pose du pavé dans les parties de la rue qui ont été terminées a été faite à la façon du carrelage et les agents de la commission du suivi technique n'ont rien pu faire face à ce manque de qualification de la main-d'oeuvre. Les malfaçons sont si visibles qu'il est question de refaire le travail. Outre le manque de qualification de la main d'oeuvre, l'opération a buté sur la pénurie de pavés nécessaires pour le remplacement de l'ancien dont une bonne partie était bien abîmée et ne pouvait plus resservir. Véritable impasse au début, ce problème vient néanmoins de connaître une solution "miracle" grâce aux excavations en cours sur l'avenue Aouati Mustapha et d'autres rues de la ville qui ont exhumé de sous le tapis en goudron leur ancien revêtement en pavés. Récupéré par l'APC, il resservira pour le remplacement du revêtement de la rue Mellah Slimane. "Comme un miracle envoyé par Sidi Rached, le Saint patron des lieux, cette découverte fortuite est une véritable mine d'or et une aubaine inespérée pour les travaux de remplacement du pavé de cette artère principale de Souika qui, autrement, se serait contentée de pierres d'oued inappropriées", souligne-t-on. C'est, d'ailleurs, en pierres d'oued qu'avaient été refaits les revêtements de la partie " C", aujourd'hui achevés, avant "la miraculeuse découverte". Il faut relever à ce propos que les carrières de pavés sont très rares dans la région. Selon le responsable de la commission du suivi technique à la cellule de réhabilitation de la vieille ville, il en existe qu'une seule de connue au niveau de tout l'est du pays. "Ramener des pavés, dans ces conditions, reviendrait encore plus cher que revêtir les rues de Souika en marbre", a-t-il confié. Malgré les difficultés sur lesquelles ils ont buté, les travaux en cours dans la rue Mellah Slimane de Souika ont été perçus comme un signe encourageant pour les habitants qui sont de plus en plus nombreux à introduire des dossiers de demandes d'agrément et d'aide technique pour engager à leur tour des travaux de restauration de leurs maisons et autres biens situés dans le périmètre de Souika. C'est dire que l'engouement semble, en la matière, avoir changé de camp. La cellule de restauration qui était pluridisciplinaire à sa création, regroupant plusieurs ateliers et de nombreuses commissions, en est aujourd'hui réduite, à travailler avec la seule commission technique. Celle-ci, déclare son responsable, fait dans l'empirisme, pour trouver des solutions ou plutôt "bricoler" des solutions aux problèmes qui surgissent sur le terrain. Pour l'heure, une solution définitive et durable demeure liée, d'une part, à l'approbation du "Master plan", cette étude destinée à la réhabilitation de la vieille de Constantine confiée à l'université italienne Roma III, et d'autre part, à l'élaboration d'un Plan de sauvegarde permanent par le ministère de la Culture. Mais le premier pas, fortement souhaité par le wali de Constantine, est fait. C'est assurément essentiel, car l'oeuvre de restauration de la vieille ville est entrée dans une phase concrète et n'est plus un voeu pieux.