Elément clé des pratiques culturales dans les oasis sahariennes, le métier de "grimpeur de palmier" pour la cueillette des dattes et l'entretien de l'arbre est aujourd'hui l'apanage d'un cercle de plus en plus restreint de personnes, le plus souvent du troisième âge. Ce savoir-faire, indispensable dans toute palmeraie, est ainsi menacé de disparition. Sur le banc des accusés face à cette désaffection quasi générale: les conditions de travail et d'emploi, notamment la faiblesse des rémunérations, pour un métier réputé particulièrement dur et nécessitant une main-d'oeuvre jeune, robuste et plutôt qualifiée. "Ce métier, nécessaire pour la sauvegarde du palmier dattier, est des plus harassant car il implique plusieurs tâches à la fois allant des traitements phytosanitaires à la coupe des palmes sèches en passant par l'arrachage du "lif" et des restes des hampes florales", explique A. El Hadj, un vieux phoeniciculteur de Metlili, tout en taillant la base de l'arbre. "Déjà qu'il faut être capable, physiquement, d'"escalader" un palmier jusqu'à sa plus haute cime avec, sur le dos et les épaules, un lourd attirail composé d'une tronçonneuse, d'une scie et autres", renchérit-il. Mais le "grimpeur" ne fait pas que grimper, à chaque fin de récolte automnale, dès l'arrivée du printemps, il s'occupera aussi du choix et de la récolte du pollen mâle ("dokkar") et de l'opération de pollinisation du palmier femelle, un acte hautement significatif et révélateur de la fécondité de l'arbre, ajoute ce connaisseur. "La fécondation du palmier, dit-il, est pratiquée, encore aujourd'hui, à la manière traditionnelle et seul un grimpeur expérimenté est apte à introduire les épillets de pollen". De son côté, Cheikh Ishak de Ghardaïa précise que le grimpeur s'occupe aussi du ciselage des régimes de datte et de l'étayage, une intervention délicate qui consiste à caler les régimes et à les consolider sur des palmes. Et le cheikh de regretter à son tour la difficulté de trouver de la main-d'oeuvre pour cette activité vitale pour le devenir de la phoeniciculture. Quasiment inexistantes à Ghardaïa, les personnes prêtes à exercer ce métier sont souvent ramenées de lointaines contrées de la wilaya d'Adrar, notamment de Touat et de Gourara, confie-t-il. Un professionnel de la région du M'zab fait savoir, pour sa part, que la profession est reconnue comme étant dangereuse et à haut risque, mais "n'est pas prise en charge par les assureurs car ne figurant pas dans la nomenclature des accidents du travail". Résultat: "Le jour de la récolte, il est rare de trouver un grimpeur pour cueillir les fruits, notamment pour le grappillage", disent en choeur les phoeniciculteurs de la région. Le grappillage consiste à cueillir (début juillet) les dattes précoces à moitié mûres, appelées ici "M'naguer" et très prisées par la population qui les acquiert au prix fort, tout en faisant attention à ne pas altérer l'intégrité des régimes de dattes.