L'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) a opté pour un maintien de ses quotas de production lors de sa réunion ministérielle tenue dans la nuit de mercredi à jeudi à Vienne. "C'est un maintien des quotas de production", a ainsi déclaré le ministre algérien de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil, à l'issue de cette réunion tenue dans la soirée en raison du mois sacré du Ramadan. L'Opep compte parmi ses membres plusieurs pays arabes et musulmans. L'Organisation, qui fournit 40% du brut dans la monde, s'est fixée comme principal objectif de ramener sa production à 24,84 millions de barils par jour (mbj) valable pour 11 des 12 Etats membres de l'Opep. L'Irak étant dispensé du système des quotas. "Etant donné que le marché est toujours suralimenté et qu'il existe un risque de rechute compte tenu de l'extrême fragilité de la reprise, la conférence a une nouvelle fois décidé de maintenir ses niveaux actuels de production", a indiqué l'Opep dans son communiqué final. Le président angolais en exercice de l'Organisation, José Maria Botelho de Vasconcelos, également ministre du Pétrole de son pays, a ouvert les travaux de la réunion en affirmant que "les jours les plus sombres de la tourmente financière et de la récession économique sont derrière nous". L'ensemble des ministres de l'Opep s'étaient déjà relayés, ces derniers jours, pour transmettre un seul et même message: modifier les paramètres du marché pétrolier serait risqué au moment où les prix du baril se sont redressés et où la reprise économique se dessine. Le ministre équatorien des Mines et du Pétrole, Germanico Pinto, a, à cet effet, expliqué que la réduction de la production de l'Opep serait "aventureux". L'Opep a ainsi voulu manifester son souci de ne pas faire augmenter davantage les cours du brut, une décision qui devrait être perçue comme un geste positif par les principaux consommateurs à moins de deux semaines du sommet du G20 (24, 25 septembre à Pittsburgh) qui va discuter de la santé de l'économie mondiale, toujours vulnérable après une crise des plus graves. Des prix entre 70 et 80 dollars sont bons pour tout le monde. A partir de 80 dollars, ils nuisent à l'économie", selon le ministre qatari, Abdallah al-Attiyah. "Nous sommes à l'aise avec le marché", a, de son côté, affirmé son homologue émirati, Mohammad al-Hameli. Depuis plus d'un mois, les prix du baril s'échangent autour de 70 dollars, proche du niveau de 75 dollars voulu par l'Opep. Mercredi il a clôturé à 71,31 dollars à New York. Le communiqué final n'a pourtant guère relayé ces signaux d'espoir. Dans ce texte, l'organisation dépeint un marché pétrolier "toujours suralimenté" et relève les "grandes inquiétudes (...) sur le rythme et l'ampleur de (la) reprise, spécialement dans les grandes nations industrialisées". Le ministre équatorien du Pétrole Germanico Pinto a récusé toute "contradiction" jeudi matin, expliquant que "les grandes économies sont en train de sortir de la récession" mais que "cela ne signifiait pas que la situation (était) optimale". Selon les analystes, cette valse-hésitation traduit surtout l'ampleur des zones d'incertitudes qui planent encore sur l'économie mondiale, en termes de chômage ou de reprise de la demande. Avec d'un côté des stocks pétroliers trop abondants, qui pourraient faire chuter les prix, et de l'autre la perspective d'un pic hivernal de consommation, susceptible de stimuler les cours, le marché pourrait connaître de violentes fluctuations, soulignent les experts. "Les prochains mois vont être des périodes critiques de montagnes russes, où tout le monde devra s'accrocher", a commenté Jason Schenker, analyste chez Prestige Economics. Autre contradiction manifeste: alors que plusieurs ministres ont martelé que le respect des baisses de production (4,2 mbj) décidées fin 2008 était indispensable pour stabiliser le marché, la déclaration finale de l'Organisation ne contient aucun appel à la discipline et le terme quota n'y figure même pas. "Le respect des quotas est la question clé", souligne pourtant Andrey Kryuchenkov, analyste chez VTB Capital. "L'Opep sait qu'elle peut contrôler ses capacités de production" mais la question est "qui fait quoi", a-t-il ajouté, en référence aux Etats qui n'ont pas les moyens de rogner sur leurs ressources pétrolières comme l'Iran, le Venzuela et l'Angola. Avant la réunion, certains ministres avaient pourtant fixé des objectifs chiffrés, le ministre koweïtien appelant de ses voeux un taux de respect des baisses de 75%, contre 68% actuellement. "L'Opep doit faire en sorte que les engagements soient respectés à 100%" pour éviter un engorgement du marché, relève l'analyste indépendant John Hall qui estime même qu'en occultant le sujet des quotas, "l'organisation a vu sa crédibilité entamée". Les ministres de l'Opep ont donc appelé à un meilleur respect des décisions prises fin 2008 pour éponger le surplus de l'offre. Pour atténuer la chute libre des cours, tombés jusqu'à 32,40 dollars le baril, l'Opep avait décidé de retirer 4,2 mbj du marché, plafonnant sa production à 24,84 mbj depuis le 1er janvier. Au total, la production des 11 pays soumis aux quotas dépasse de 1,28 mbj le plafond autorisé, selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE). "Nous avons besoin d'un meilleur respect" des mesures prises, a souligné le ministre koweïtien du Pétrole, cheikh Ahmad Abdallah al-Sabah. Selon lui, les baisses de production étaient respectées à 68% par les Etats membres mais un taux de "75% serait bien". Pour M. Khelil, un meilleur respect des quotas permettra de stopper la progression des stocks. La prochaine réunion de l'Opep aura lieu le 22 décembre à Luanda (Angola). S.G.