Docteur Abderrahmane Mebtoul Expert international, professeur en management stratégique Le G20 regroupant les pays les plus riches de la planète se réunit en sommet à Pittsburgh, aux Etats-Unis, et ceux-ci veulent que la question du rééquilibrage du système financier international figure en bonne place au programme. Utopie ou réalité dans la mesure où le fondement même du système monétaire international repose sur la suprématie du dollar qui représente plus de 60% des transactions mondiales, un sujet qui fâche alors qu'il estdéterminant , sera certainement abordé d'une manière partielle. En plus, l'approche progressive définie dans l'accord d'Abuja, notamment la réduction de certains tarifs douaniers au niveau régional, n'a été que partiellement appliquée dans une ou deux régions et a été en grande partie remplacée par la libéralisation généralisée des échanges que préconisent les programmes d'ajustement structurel financés par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI). Tout en reconnaissant que d'importants progrès au niveau du continent Afrique, politiques, le nombre de conflits ayant sensiblement baissé et économiques avec sept années consécutives de croissance relativement élevée ont permis à un certain nombre de pays de se constituer des réserves monétaires et d'améliorer leur balance des paiements, ce qui permet d'amortir les difficultés à court terme, néanmoins, cette performance ne doit pas voiler les nombreux obstacles qui se dressent sur la voie du développement des pays africains et qui ont entre autres pour noms la faiblesse de l'industrialisation, les failles dans la gouvernance, le taux élevé du chômage auquel sont confrontés plus de 200 millions de jeunes africains, en bref, la persistance de la pauvreté. Aussi, la crise risque de freiner cet élan, d'autant plus que les services et les infrastructures sont dégradées ; la fonction publique mal payée et donc gangrenée par la corruption avec l'inégalité entre les régions, l'insécurité dans les villes. Face à cela, la dominance d'une société de subsistance ou une contre-société de trafics qui enfante ses gagnants et ses perdants. La plupart des pays sont endettés même si ces données doivent être corrigées par le fait qu'une partie de la production est invisible, une partie de la population vit de sa production sans que celle-ci soit recensée. La croissance démographique est un facteur d'explication de la situation économique difficile ; elle engendre deux effets pervers : raréfaction des actifs et explosion d'une population jeune. Les sécheresses qui se succèdent depuis les années 60, l 'avancée du désert ont provoqué des crises agricoles graves. Les agriculteurs africains sont de plus handicapés par leur mauvaise maîtrise des techniques de conservation de l'eau et d'irrigation comme ils le sont aussi par les médiocres infrastructures. A cela s'ajoute le nombre des pays en guerre et donc de réfugiés. Le taux d'urbanisation. L'exode rural joue un rôle important dans cette croissance. Or les villes ne proposent qu'un nombre d'emplois dérisoire en l'absence de véritable politique de développement. Certes, du fait de son sous développement, l'Afrique reste moins affecté par la crise financière mondiale, l'Afrique participant à hauteur de 3% seulement aux échanges mondiaux et représente en moyenne 2007/2008 1% du produit intérieur brut mondial .Le système financier africain est généralement autonome et indépendant de ses relations avec les économies occidentales, et ne dispose pas encore d'un système boursier encore performant. Une des raisons pour lesquelles les turbulences économiques mondiales auront des effets moins graves en Afrique, est que le contrôle des mouvements de capitaux, a poussé les banques du continent à favoriser la gestion des dépôts locaux et à faire des investissements relativement peu risqués. Leur exposition aux "subprimes" et autres instruments financiers douteux qui ont provoqué la chute de banques américaines et européennes est donc minimale Toutefois, des conséquences à plus long terme sont attendues car la situation de l'Afrique est des plus inquiétantes, car même si elle ne subit pas une conséquence directe de la crise financière, l'impact se fait ressentir par d'autres biais. Les conséquences de cette crise, peuvent varier selon le niveau de développement des pays. L'effet de contagion peut donc atteindre des Etats dont les systèmes financiers sont plus intégrés au système international. Pour les autres, c'est une période d'incertitudes, avec paradoxalement, de nouveaux risques comme l'augmentation des interventions de l'armée dans la vie politique, des crises sociales et des grèves liées aux inégalités, l'injustice et à la corruption, la dévalorisation du savoir qui explique l'exode de cerveaux. Car, l'Afrique perd chaque année 20.000 professionnels comme conséquence de la "fuite des cerveaux", selon le bulletin de la Commission Européenne. Un tel exode influe négativement sur le continent dont le départ des compétences intellectuelles vers d'autres continents contribue à marginaliser l'Afrique dans les systèmes mondiaux du savoir. Le fait que ces personnes qualifiées et compétentes ne retournent pas dans leur pays, souvent pour des raisons de marginalisation par le pouvoir constitue la cause de l'impossibilité pour l'Afrique, d'entrer dans l'arène mondiale du savoir. Autre élément de défi, le manque d'eau. Il est prouvé mondialement ces dernières années dans les différents rapports de l'ONU, l'UNESCO, du Conseil Mondial de l'eau, que les ressources en eau vont poser un grave problème à l'humanité, deux tiers de la planète dont l'Afrique , risquant de souffrir d'un manque d'eau grave . Mais face à la crise mondiale, il y a lieu de préciser qu'il n'y a pas une Afrique mais des Afriques, La crise affectera au cas par cas. Les pays de l'Afrique australe et du Maghreb, sont économiquement plus prospères que l'Afrique centrale et l'Afrique de l'Ouest. Des pays ayant des réserves de change importantes notamment les économies pétrolières africaines ou des pays grands exportateurs de matières premières que les pays les plus pauvres ou vivant uniquement du tourisme qui risquent de connaitre une récession, sont moins touchés à court terme dans la mesure où l'effondrement des cours avec la mentalité rentière du passé qui a privilégié la dépense monétaire sans se préoccuper d'une bonne gestion, risquent d'avoir des effets néfastes à moyen terme. Sous réserve d'une gouvernance rénovée mettant fin à la corruption qui contribue à la démobilisation, et de la valorisation du savoir qui est un acte éminemment politique allant vers la démocratisation des sociétés, des pays comme l'Afrique du Sud, l'Algérie, le Nigeria l'Egypte, le Soudan impliquant la résolution du conflit au Darfour, peuvent être des acteurs dynamisants pour tout le continent. 2- Les effets de la crise mondiale sur l'Afrique Premier impact, la crise devrait se manifester au niveau de l'aide et l'investissement au développement qui pourrait en souffrir. Après avoir promis d'accroître fortement le montant de l'aide au développement, les pays riches ont réduit leur soutien financier à l'Afrique et n'ont rien fait pour améliorer les termes des échanges commerciaux avec ce continent. La Commission pour l'Afrique , créée par l' ex- Premier ministre britannique Tony Blair, a réclamé aux pays riches qu'ils accordent, jusqu'en 2010, une aide supplémentaire de 25 milliards de dollars au continent noir. En 2007 et 2008, l'aide a décru encore un peu plus. Hors allègements de dette, l'aide à ce continent des 22 pays de l'Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) est passée de 106 milliards de dollars en 2005 à 103 milliards de dollars en 2006, d'après African Monitor. En outre, l'aide de l'OCDE est passée en moyenne de 0,33% de son revenu national brut en 2005 à 0,3% en 2006, malgré la promesse du G8 de porter d'ici 2015 à 0,7% du PNB de chaque pays les fonds alloués à l'aide au développement. Enfin, 55% de l'aide totale n'a profité qu'à dix pays qui obtiennent souvent l'aide de pays occidentaux pour des raisons plus stratégiques qu'humanitaires. Si déjà en période normale, ils ont du mal à tenir ces promesses, sans doute qu'en temps de crise, ils auront encore plus de mal. Comme, il est utile de rappeler que ces montants promis sont une somme dérisoire comparés à l'injection de plusieurs centaines de milliards de dollars de liquidités sur les marchés par les banques centrales. Deuxième impact à terme sur le système et flux financiers et l'équilibre macro-économique. L'incertitude étant considérable à l'échelle mondiale, la croissance risque encore d'être revue à la baisse. Pour 2009, le FMI prévoit une détérioration sensible des comptes budgétaires et extérieurs des pays d'Afrique sub-saharienne. Il table sur une dégradation du solde budgétaire global de non moins de 6 points de pourcentage, avec un déficit voisin de 4 % du PIB en 2009. Quant au taux d'inflation, il devrait passer à 12,7% en 2007 et 12,9% en 2008 alors qu'il n'était que de 7,5% en 2005. A suiuvre....