L'industrie pétrolière a appelé mardi les gouvernements à jouer un rôle de premier plan, à la fois dans la lutte contre le réchauffement climatique et dans la régulation du marché pétrolier, dont elle a dénoncé l'excessive volatilité. Ainsi, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole s'est dit "prête à investir" pour motiver la reprise de la demande, a déclaré, mardi à Londres, son secrétaire général Abdallah el Badri, lors d'une conférence à Londres. L'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) détient actuellement une capacité de production excédentaire avec un coussin de production mobilisable rapidement de 6 à 7 millions de barils par jour (mbj). Les pays membres ont prévu de développer 150 projets d'exploration et de production, a rappelé son secrétaire général, lors de la conférence Oil & Money organisée par le groupe International Herald Tribune. Concernant le prix "juste" du pétrole, M. el Badri a déclaré qu'un baril situé entre 60 et 70 dollars ne permet pas de faire des investissements énormes, il faut plus d'argent pour les investissements off shore et dans les pétroles non-conventionnels. Les prix du brut ont dépassé mardi pour la première fois en un an le seuil de 80 dollars le baril. Alors que les pays consommateurs cherchent à sécuriser leurs approvisionnements en énergie, les pays producteurs ont, pour leur part, besoin, pour réaliser leurs investissements, de "sécurité en matière de demande", a fait valoir le secrétaire général de l'Opep. M. El Badri a dénoncé par ailleurs la spéculation, à l'origine selon lui, de l'extrême volatilité des prix de brut depuis deux ans. Les cours du pétrole ont flambé jusqu'à 147,50 dollars à l'été 2008 avant de s'écrouler en décembre jusqu'à 32,40 dollars "Il faut enrayer la spéculation excessive", a martelé le secrétaire général de l'Organisation de pays exportateurs de pétrole (Opep). "Le problème de la volatilité des prix est qu'il rend la planification des investissements très difficiles", a rappelé Choukri Ghanem, ancien ministre du pétrole libyen. Le régulateur américain des matières premières (CFTC) s'est attelé à cette tâche cet été. Il envisage notamment d'imposer des limites de positions sur le marché pétrolier de New York. Pour Nobuo Tanaka, qui représente les intérêts énergétiques des pays industrialisés, les pays consommateurs ont aussi un rôle à jouer dans la stabilisation des prix en "soulageant la pression sur la demande" par des économies d'énergie et une diversification de leurs sources d'énergie. Pour sa part, Tony Hayward, le patron du géant pétrolier britannique BP a estimé que "la transition vers des économies émettant peu de CO2 ne va pas se produire du jour au lendemain. Les gouvernements doivent y prendre une part plus active". "Nous avons besoin d'une coopération sans précédent entre les gouvernements et l'industrie pétrolière", a-t-il ajouté, à moins de deux mois du sommet sur le climat de Copenhague. Un avis partagé par Nobuo Tanaka, le directeur général de l'Agence internationale de l'énergie. "Consommateurs et producteurs (de pétrole) doivent coopérer pour que le scénario de 450 pppm (parties par million) se réalise". Ce scénario limitant la concentration des gaz à effet de serre dans l'atmosphère permettrait, selon les scientifiques, de limiter la hausse de la température mondiale à + 2 degrés. Paolo Scaroni, le directeur général du groupe pétrolier italien Eni, juge lui aussi que les pays consommateurs devaient opter pour des mesures contraignantes, comme des taxes sur le carbone, plutôt que de se reposer sur le marché des quotas de carbone. "Les taxes sur le carbone sont plus faciles, plus simples à mettre en oeuvre", estime-t-il, ajoutant que le plus grand chantier pour les gouvernements était de promouvoir les économies d'énergie. S.G.