Pour fin septembre 2008, les Etats-Unis rassembleront leurs activités militaires en Afrique (sauf en Egypte) sous un seul commandement. Leur objectif : le contrôle complet des matières premières africaines. La décision a été dévoilée au début de ce mois et montre bien l'importance stratégique de l'Afrique pour les Etats-Unis. C'est la première réorganisation de la structure de commandement de l'armée américaine sur le plan mondial depuis 1946. La nouvelle structure a été baptisée Africain Command et reprend une partie des tâches de l'EUCOM, le commandement installé à Stuttgart. Au cours de la dernière période de préparation, la part des opérations dirigées par l'EUCOM est passée de presque rien en 2003 à 70% en 2006. La majeure partie de ces activités se déroule en Afrique occidentale et plus précisément dans le golfe de Guinée, entre la Côte d'Ivoire et l'Angola, une région riche en pétrole. Le gouvernement américain s'attend à ce que 25% des importations américaines en pétrole viendront de cette région, vers 2015 (19% aujourd'hui). Entre 1995 et 2005, les grandes compagnies pétrolières américaines ont investi plus de 40 milliards de dollars, dans cette région. Entre 2005 et 2010, 30 autres milliards sont encore prévus. Le pétrole est une première raison importante de l'accroissement de l'intérêt stratégique de l'Afrique. La Chine inquiète les USA Une seconde raison, c'est la présence accrue de la Chine en Afrique, comme le disent les experts américains du Council on Foreign Relations. " La Chine a modifié la situation stratégique de l'Afrique. Sur tout le continent, elle est en quête de richesses naturelles, elle dame le pion aux entreprises occidentales dans les grands travaux d'infrastructures, elle fournit des prêts avantageux ". Actuellement, plus de 25% des importations chinoises en pétrole viennent déjà de l'Afrique. Ces dernières années, le commerce entre la Chine et l'Afrique a triplé, passant à 37 milliards de dollars, faisant de la Chine le troisième partenaire commercial de l'Afrique après les Etats-Unis et la France. L'Africain Command doit aborder de façon plus centralisée et plus efficace la présence militaire en Afrique, de façon à multiplier et faciliter désormais des expéditions militaires comme celle qui a eu lieu en Somalie, voici quelques semaines, lorsque des avions américains ont mitraillé des centaines de paysans somaliens dans le vain espoir d'éliminer trois membres d'El-Qaïda. Mais, avec la mise en place de l'African Command, les dirigeants américains ont encore de plus grandes ambitions. Une étude de l'armée américaine sur ce même African Command constate : " Ce qui manque aujourd'hui, en Afrique, c'est un mécanisme continental de stabilisation. Plusieurs tentatives ont bien été faites pour mettre sur pied des organisations régionales, comme la communauté économique des Etats ouest-africains (ECOWAS) ou l'Union africaine. Mais ces organisations ont été marginalisées vu l'absence d'un soutien de la part des pays développés. Les Nations unies essayent sans y parvenir d'unir le monde pour aborder les grands problèmes de sorte que l'Afrique puisse aller au devant d'un avenir pacifique ". L'étude conclut : " La meilleure façon de montrer au monde que les Etats-Unis sont vraiment en phase avec l'Afrique consiste à installer un commandement africain comme seule structure de commandement pour l'ensemble du continent africain ". Le général Jones, qui a préparé la mise en place de l'African Command, a constitué un groupe d'études à Stuttgart. Quinze agences et services du gouvernement américain, de même que la Chambre de commerce américaine pour l'Afrique, y ont participé. " Le combat du 21e siècle en Afrique consistera à coordonner tous les éléments pouvant avoir une influence nationale ". Autrement dit, l'African Command de l'armée américaine devient, non seulement, le chaînon central du contrôle militaire de l'Afrique mais aussi celui du contrôle politique et économique du continent.