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Alger prend les commandes
SEMINAIRE SUR LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME AU MAGHREB ET AU SAHEL
Publié dans L'Expression le 21 - 02 - 2006

La région sahélo-saharienne est mise depuis mars 2003 sous la loupe des services de renseignements.
Le séminaire international sur la lutte contre le terrorisme au Maghreb et la région sahélo-saharienne a entamé ses travaux hier à Alger, avec la participation de huit pays africains, dont l'Algérie, et des observateurs américains et européens.
Ce séminaire de cinq jours est co-organisé par le Centre africain d'études et de recherches sur le terrorisme (Caert) et le Centre d'études stratégiques sur l'Afrique (Cesa) du ministère de la Défense américain.
C'est le ministre algérien chargé des Affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel, qui a présidé la cérémonie d'ouverture. Celui-ci, dans son discours d'ouverture, a souligné, lundi le caractère «pionnier» de l'Algérie en matière de lutte anti-terroriste: «Nous sommes heureux de vous accueillir en Algérie, terre africaine, dont la lutte contre le terrorisme a, aujourd'hui, valeur d'exemplarité, et dont le caractère pionnier est unanimement reconnu.
D'autres régions africaines ont eu, aussi, à souffrir de ce mal absolu (...) Et pour avoir souffert des affres du terrorisme, l'Afrique s'est diligemment employée à définir les voies et moyens les plus appropriés de prévention et de lutte contre ce phénomène ravageur».
La prévention d'abord
De leur côté, les Etats-Unis ont salué le travail accompli par le (Caert), par la voix de l'ambassadeur américain en Algérie Richard Erdman et celle de Carlton W.Fulford, général américain à la retraite et directeur du Cesa: «Au nom du gouvernement des Etats-Unis, nous saluons le travail du Caert et nous sommes ravis de la coopération qui existe entre lui et le Centre d'études stratégiques sur l'Afrique (Cesa) du ministère de la Défense américain».
Rappelant l'adoption, en 1999, de la convention de l'organisation de l'Unité africaine sur la prévention et la lutte contre le terrorisme, le ministre a fait remarquer que le continent africain «a non seulement fait oeuvre utile, mais il s'est aussi distingué par le caractère pionnier de son engagement». «Nous sommes d'autant plus satisfaits que l'action de la communauté internationale dans ce domaine crucial a toujours été efficacement relayée par l'Afrique qui s'est dotée d'une convention, d'un plan d'action ainsi que d'un centre opérationnel dont les grandes potentialités sont du meilleur augure».
Durant plusieurs jours donc, l'Algérie va piloter le projet de maîtrise de la violence terroriste dans le Maghreb et la bande du Sahel, bien que l'absence du Maroc des travaux ne soit pas passée inaperçue, renseignant sur les difficultés qui se profilent sur le terrain des réalités politiques, qui, elles seules, determinent la politique des Etats maghrébins et du Sahel en matière de sécurité. Selon la direction du Centre, «ces actions vont s'inspirer nécessairement de la Convention africaine de prévention et de lutte contre le terrorisme et du Plan d'action de l'Union africaine (UA) sur le même thème» .
Le plan d'action de l'UA, adopté à Alger en 2002, comporte une série de mesures concrètes concernant la police et le contrôle aux frontières, ainsi que des volets judiciaires, financiers, sur les échanges d'informations et sur la coordination aux niveaux régional, continental et international.
La Convention sur la prévention et la lutte contre le terrorisme, sur laquelle s'appuie la coopération interafricaine dans ce domaine, avait été adoptée en juillet 1999 lors du 35e sommet de l'Organisation de l'Unité africaine (OUA, devenue UA en juillet 2002).
Le Caert, inauguré en octobre 2004 à Alger, est conçu comme une agence spécialisée de l'UA. Il a pour mission principale «le renforcement des capacités des pays africains dans le domaine de la prévention du terrorisme, pour prendre part activement à la lutte internationale contre ce fléau». Les travaux de ce séminaire, qui se poursuivront jusqu'à vendredi sous forme de séances plénières et de groupes de discussions, à huis clos, ont débuté avec la participation, outre l'Algérie, de la Libye, du Mali, du Niger, du Nigeria, du Sénégal, du Tchad et de la Tunisie, en plus des partenaires internationaux venus des Etats-Unis et de pays européens (Danemark, France, Grande-Bretagne et Portugal). Plusieurs personnalités ont également pris part à cette rencontre, notamment le Commissaire à la paix et à la sécurité de l'Union africaine, M.Saïd Djinnit, le directeur du Cesa, le général à la retraite Carlton W.Fulford, et l'ambassadeur américain en Algérie, M.Richard W.Erdman. Le but de ce séminaire, qui regroupe aussi des experts civils et militaires, est d' « élaborer une liste d'actions concrètes visant à prévenir et à lutter contre la présence de groupes terroristes», au Maghreb et dans la région sahélo-saharienne.
L'expérience algérienne
L'expérience algérienne dans la lutte contre le terrorisme fera l'objet d'une journée d'étude à ce séminaire, où il sera également question durant toute une journée de l'expérience de l'Algérie en matière de réconciliation nationale, initiée par le président de la République, Abdelaziz Bouteflika.
La première journée des travaux sera consacrée aux «menaces et vulnérabilités en Afrique du Nord et en Afrique de l'Ouest» et aux «réponses nationales de contre-terrorisme en Afrique du Nord et en Afrique de l'Ouest».
L'Algérie, tend à devenir la capitale africaine de la lutte antiterroriste, et ce depuis qu'elle a pris l'initiative d'abriter le Centre africain d'études et de recherche sur le terrorisme, premier du genre sur le continent noir.
L'initiative de la création de ce centre à Alger, saluée à l'unanimité par les chefs d'Etat africains réunis il y a quelques mois à Addis-Abeba, dans le cadre des travaux de la troisième conférence ordinaire de l'Union africaine (UA), a mis l'Algérie sur orbite concernant les questions antiterroristes.
Jouissant de son expérience incontestable dans la lutte antiterroriste, l'Algérie n'a, semble-t-il, pas trouvé de difficulté pour arracher l'accueil de ce centre appelé à jouer un rôle dans la lutte internationale contre les réseaux terroristes. Les Etats-Unis, qui sont partie prenante de la «guerre invisible» lancée dans le Sahel, et partenaire dans ce séminaire, par le biais du Centre des études stratégiques, lequel dépend directement du ministère de la Défense américain, avaient en fait commencé à s'intéresser à cette région au lendemain de la guerre engagée aux Etats-Unis et la dispersion des cadres d'Al Qaîda et de ses sympathisants un peu partout dans le monde.
La présence du Yéménite Imad Abdewahed Alouane en Algérie (il avait été abattu à Batna en 2002), via le Sahel puis l'acheminement des 14 touristes kidnappés par le Gspc d'Algérie vers le Mali, avaient fini par conforter les experts militaires américains que cette bande du Sahel, longue de plusieurs milliers de kilomètres et qui va de la Mauritanie au Tchad et à la Somalie en passant par le Mali et le Niger, finira par constituer une «rampe de lancement» pour les futurs groupes armés.
La capture des islamistes africains menés par Amari Saïfi dans la zone de guerre du Tibesti a fini par faire croire définitivement que la bande du Sahel, déjà infestée de groupes rebelles, d'opposants armés, de Touareg sécessionnistes et de contrebandiers constitués en bandes mafieuses, risque de se voir encore encombrée d'islamistes qui se retrouveraient aux portes de l'Europe dès qu'ils passeraient les frontières nord.
Le plan Pan-Sahel Initiative (PSI) américain est un vaste programme, dont l'objectif est d'endiguer toute menace terroriste venant du Sahel.
Près de 120 millions de dollars ont été débloqués pour cet objectif, en plus d'experts militaires et d'équipements modernes pour le repérage, la reconnaissance, la détection et éventuellement l'attaque aérienne.
Pour Washington, toutes les bandes islamistes de la région ne peuvent qu'être alliées à Al Qaîda, et doivent de ce fait, être traquées sans répit et démantelées.
Cependant, les Etats-Unis ne peuvent s'engager longtemps sur plusieurs fronts ni engager leurs troupes déjà très éprouvées dans des guerres d'usure, et tout aussi aléatoires qui plus est. D'où tout l'intérêt porté aujourd'hui à l'Algérie qui possède déjà sur place hommes et logistique militaire.
D'aucuns affirment que les Etats-Unis avec leurs drones et leurs satellites ne sont jamais loin. Outre les satellites espions, les Etats-Unis utilisent des avions de reconnaissance Orion P3.
C'est une manière intelligente de mener une guerre de loin, sans avoir à déplorer des pertes, et en faisant impliquer d'autres parties dont les intérêts corroborent les leurs. C'est ce qu'on appelle en stratégie militaire «disposer de troupes sur place».


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