Les pays développés restent sous la menace d'un retour de la récession s'ils prennent trop tôt des mesures de sortie de crise, prévient le directeur général du Fonds monétaire international (FMI) Dominique Strauss-Kahn. La reprise de la demande privée et de l'emploi sont des conditions préalables au retrait des mesures de soutien à l'économie. Le calendrier du retrait de ces mesures est en outre différent selon les pays. "La reprise dans les pays développés est apathique", a-t-il déclaré à des journalistes à Tokyo. "Il faut être prudent car la reprise est fragile." Dominique Strauss-Kahn s'est appuyé sur l'exemple japonais, qui a subi sa propre crise financière à partir de la fin des années 1990, pour dire que cela montrait que la reprise ne démarre qu'à partir du moment où les entreprises et les banques assainissent leur bilan. A ce sujet, il a ajouté qu'à l'échelle mondiale un grand nombre d'actifs dépréciés n'avaient pas encore été dévoilés. La lutte contre l'endettement public, auquel de nombreux États ont eu recours pour juguler la crise, sera bientôt la priorité numéro un de nombreux pays, a poursuivi le directeur général du FMI. Chercher à sortir trop tôt des mesures de soutien aurait un coût énorme car les pays manqueraient d'outils pour lutter contre un nouveau retournement de l'économie. Pour M. Strauss-Kahn ces pays devraient résoudre en priorité un problème à double équation résidant dans l'abondance des liquidités dans le monde et le très haut niveau de la dette publique. "Régler ce problème prendra du temps, sera très difficile et c'est sans doute la principale priorité à laquelle les pays avancés, mais aussi plusieurs pays émergents, devront s'attaquer dans les 2, 5 ou 7 ans", a souligné le DG du FMI lors d'un déplacement à Tokyo. Il a appelé ces pays à rapidement "élaborer une stratégie" pour sortir de la spirale de la dette, afin de "montrer aux marchés et détenteurs d'avoirs que le gouvernement a conscience de l'importance du problème et de l'urgence de le régler". "L'autre question est le moment où vous commencez à resserrer votre politique budgétaire, (et trouver le bon moment) est très difficile" car un mauvais choix risque de briser la reprise de la consommation et de faire augmenter le chômage, a prévenu M. Strauss-Kahn lors d'une conférence de presse. Evoquant les deux écueils de resserrer trop tôt ou trop tard les cordons de la bourse, il a jugé que ces deux risques étaient "asymétriques". "Si vous sortez trop tard (des politiques de soutien exceptionnel à l'économie), vous gaspillez des fonds et augmentez la dette. Mais c'est un problème qui prendra de toute façon des années à être réglé, donc commencer trois mois plus tôt ou plus tard ne change pas grand-chose", a-t-il noté. "D'un autre côté, si vous sortez trop tôt, alors vous courrez le risque de replonger en récession", le pire des scénarios selon lui. M. Strauss-Kahn a par ailleurs confirmé que les perspectives de croissance du FMI, dont l'institution doit présenter une version actualisée dans quelques jours, allait "montrer que la reprise est plus forte et plus rapide que ce que nous prévoyions en septembre". "Même pour les économies avancées, la reprise est plus rapide et précoce qu'attendue, même si elle reste à un niveau qui n'est pas complètement satisfaisant", a-t-il expliqué. Il a toutefois mis en garde sur la "fragilité" de cette reprise: "de nombreux investisseurs ne veulent pas investir dans les économies développées et se limitent aux économies émergentes comme le Brésil, la Russie et l'Asie avec la Chine". Dans un billet publié sur son blog, Marek Belka, directeur du département Europe du FMI, estime que les mesures budgétaires et monétaires prises pour sortir le continent de la crise doivent être maintenues car l'économie reste fragile. L'ancien Premier ministre polonais juge que l'Europe a subi une crise très grave et que le continent devra mettre en place des mesures de restructuration et d'assainissement de ses finances publiques qui prendront du temps. "Nous ne sommes plus au bord du précipice comme ce fut le cas en 2009, presque toutes les économies européennes sortent à présent de récession. Mais il n'est pas certain que nous soyons revenus sur la terre ferme", écrit-il sur son blog http://blog-imfdirect.imf.org/