Après l'euro, c'est au tour de la devise britannique d'être rattrapée par les inquiétudes concernant le déficit budgétaire. La semaine passée, la livre sterling a chuté à 1,5456 dollar en fin de semaine, alors qu'elle valait plus de 1,57 dollar mardi. Parallèlement, le taux à 10 ans est monté à 4,17 %, un sommet depuis fin 2008. L'annonce de finances publiques dans le rouge en janvier, mois traditionnellement marqué par des rentrées fiscales accrues, a mis le feu aux poudres. Faut-il ou non réduire le déficit du Royaume-Uni dès cette année ? Le débat fait rage. En vue des élections, conservateurs et travaillistes s'affrontent sur cette question, chaque camp bénéficiant de l'appui d'économistes renommés. L'opposition estime qu'il faut agir au plus vite pour garder la confiance des marchés. Le parti de Gordon Brown préfère au contraire attendre pour ne prendre aucun risque sur la croissance. Les conditions d'un regain de volatilité sur la devise sont ainsi réunies. La livre sterling a reculé de 4,44 % depuis le début de l'année contre le billet vert et évolue sur ses plus bas depuis mai 2009. Pour comparaison, l'euro, fragilisé par la crise grecque, s'est, lui, déprécié de 5,25 % contre le dollar cette année. Il faut dire aussi, qu'en décidant de relever l'un de ses taux directeurs, la Fed a donné de l'élan au billet vert et poussé temporairement l'euro sous le seuil de1,35 dollar. L'annonce par la Fed, jeudi soir, du relèvement du taux d'escompte de 0,5 % à 0,75 % a suscité de vives réactions. Pourtant, dans son discours du 10 février, Ben Bernanke avait souligné que " la Réserve fédérale était en train de normaliser les conditions du guichet de prêts d'urgence aux banques. " Une phrase était particulièrement importante : " D'ici peu, nous devrions songer à augmenter légèrement l'écart entre le taux d'escompte et le taux cible des fonds fédéraux [Fed funds]. " Personne n'avait sans doute mesuré que " d'ici peu " pouvait signifier " dans huit jours ". " La décision d'augmenter le taux d'escompte montre que la Fed a repris la main, alors qu'elle était jusque-là limitée dans son action par l'environnement économique et financier ", analyse Philippe Waechter, chez Natixis AM. Pour l'économiste, la question est désormais de savoir si l'expression " maintien des taux exceptionnellement bas pendant une période prolongée " figurera une nouvelle fois dans le communiqué du comité de politique monétaire, le 16 mars. Pour le marché, la disparition de cette phrase serait clairement un message de durcissement. Juste après l'annonce de jeudi soir, l'euro a chuté de plus de 1,36 à 1,3444 dollar, tandis que l'indice dollar (le billet vert contre les six principales devises mondiales) a bondi au-dessus de 81 points. Le rendement de l'emprunt d'Etat américain à 2 ans s'est tendu à 0,96 %. " En agissant sur un taux directeur, la Fed a touché à un élément qui a une forte charge symbolique ", explique René Defossez, de Natixis. Beaucoup plus que si elle était intervenue sur le dispositif non conventionnel, comme elle le fait depuis la fin de l'année dernière.