Controverse qui a marquée le pays des années durant, la question du foncier agricole en Algérie est-elle en voie de connaître son épilogue ? Les terres régies actuellement par la loi 87-19 du 18 décembre 1987 seront gérées par le modèle de la concession. En tout cas, la polémique autour du nouveau projet de loi qui propose une réduction significative de la durée de jouissance de terres agricoles octroyées par l'Etat, soit de 99 ans à 40 ans, a refait surface. Le ministre de l'Agriculture et du Développement rural, Rachid Benaïssa, a tenu à rassurer lors d'une rencontre avec les cadres du secteur, que le projet est en discussion au niveau du gouvernement. Le ministre a précisé que cet avant-projet n'a pas été conçu pour nationaliser les EAC et EAI ou pour céder les exploitations agricoles aux étrangers, comme le pensent certains, mais, explique-t-il, "nous pensons à une nouvelle réorganisation pour régler tous les problèmes auxquels se trouvent confrontées les EAC et les EAI". Ce qui est sûr en tous cas, c'est que cette loi est imminente, dans la mesure où elle introduit une gestion privative de la terre qui reste, toutefois, propriété de l'Etat en réponse au souci d'adaptation de l'activité agricole à l'environnement économique actuel. Les agriculteurs auront ainsi un document à présenter devant les institutions financières, dont les banques, en cas de demande d'octroi de crédits. Les terres qui seront ainsi mises dans la corbeille des concessions concernent particulièrement celles démembrées en 1987 et qui avaient enfanté les EAC et EAI, après l'élimination du système de l'autogestion. Actuellement, 90 % des exploitations agricoles collectives (EAC) ont été divisées entre bénéficiaires et sont exploitées individuellement, selon la Chambre nationale d'agriculture. Le reste des terres anciennement du domaine autogéré, elles-mêmes provenant du FNRA (Fonds national de la révolution agraire), a été versé au profit des exploitations agricoles collectives (EAC). Ce petit réajustement en projet dans la jouissance des terres agricoles par les anciens bénéficiaires des coopératives agricoles devrait, selon le ministre de l'Agriculture, donner plus de visibilité à la relance de la production agricole en Algérie. Le texte de loi tel qu'élaboré prévoit une concession de type individuel d'une durée de 40 ans, alors qu'auparavant, l'assemblée générale de la Chambre nationale de l'agriculture (CNA) avait adopté une résolution qui propose l'octroi à chaque agriculteur d'un acte de concession individuel pour un bail de 99 ans. Par ailleurs, les pouvoirs publics tiennent au principe de l'appropriation, car estiment-ils, c'est le seul moyen de préserver la vocation agricole de ces terres. L'Etat doit, en ce sens, à l'exemple de certains pays d'Europe, exercer un droit de préemption, acheteur prioritaire, sur toutes les terres agricoles qui se libèrent.. Les exploitations agricoles collectives et individuelles seront remplacées par des sociétés civiles d'exploitation agricole. Elles seront soumises à une fiscalité particulière mieux adaptée à l'activité agricole. Les sociétaires civiles peuvent procéder à l'ouverture du capital à des personnes physiques appelées " apporteurs de capitaux ". Il convient de signaler que les terres agricoles du domaine privé de l'Etat occupent une superficie de l'ordre de 2,8 millions d'hectares, soit 35% de la surface agricole utile. Plus de 2,5 millions d'hectares ont été attribués à plus de 210 000 producteurs organisés en 96 629 exploitations agricoles collectives et individuelles (EAC et EAI). On dénombre actuellement 30 519 EAC occupant 1 841 000 ha et 66 110 EAI pour une assiette foncière de 674.000 ha. La superficie restante, environ 300 000 ha, appartient aux réseaux des fermes pilotes, des instituts techniques (fermes de démonstrations) et des instituts de recherche (stations de recherche et d'expérimentation). Il faudra, néanmoins, relever que chaque année des dizaines de milliers d'hectares sont réquisitionnés à des fins d'urbanisation, sans indemnisation.