La question de l'avant-projet de Loi portant sur la réorganisation du foncier agricole suscite toujours la controverse. Regroupés autour de l'Union Nationale des Paysans Algériens (UNPA), à chaque présentation de ce projet, les bénéficiaires des terres agricoles crient ex abrupto à «une nationalisation mise en sourdine». Les pouvoirs publics précisent, de leur côté, que ce projet de Loi veut trancher le nœud Gordien de «l'usufruit» et de «la pleine propriété».Un flou juridique qui était préjudiciable pour le développement de l'Agriculture. Lors de la décennie noire, des centaines de milliers d'hectares qui appartenaient à des EAC et des EAI ont été sacrifiés, rappelons le. En fait, les bénéficiaires des terres agricoles soutiennent le maintien du recours à la justice pour le règlement des litiges en rapport avec le droit de jouissance de la concession agricole, comme le stipule la Loi. Toutefois, ils rejettent en bloc les propositions de l'avant-projet qui stipule le transfert de ce droit à l'administration. Hier, les attributaires de terres agricoles de Constantine, ont, à leur tour, été sceptiques quant à l'aboutissement de ce projet qui ne fait que «pénaliser» le développement de l'agriculture en Algérie, note-t-on. En effet, les bénéficiaires constantinois ont vivement critiqué les réserves sur certaines dispositions de cet avant-projet de Loi qui sera présenté bientôt aux deux chambres du parlement. L'Etat à travers le ministre de l'Agriculture, voulait être rassurant : «ce projet n'a pas été conçu pour nationaliser les EAC et EAI, ou pour céder les exploitations agricoles aux étrangers, comme le pensent certains, loin s'en faut». Rachid Benaïssa ajoute que «nous pensons à une nouvelle réorganisation pour régler définitivement tous les problèmes auxquels se trouvent confrontées les EAC et les EAI». De son côté, Slimane Aouane a souligné que la formule des 99 ans est «la plus adéquate», car assurant une plus grande stabilité des agriculteurs. Il a également appelé les pouvoirs publics à «ne pas écarter l'UNPA du débat», dès lors, a-t-il affirmé, que l'Union a «des propositions constructives à faire». En fait, les bénéficiaires veulent maintenir la Loi 87-19 du 18 décembre 1987, qui stipule le modèle de concession. La polémique actuelle porte sur la réduction significative de la durée de jouissance des terres agricoles octroyées par l'Etat, soit de 99 ans à 40 ans, avec un effet rétroactif. Kamel Bousmid, membre du Bureau national de l' UNPA, affirme que «cette formule ne peut qu'avoir des retombées négatives sur la production agricole de l'ensemble des attributaires qui ne détiennent d'ailleurs que 30 % de la totalité des surfaces agricoles utiles (SAU) au niveau national». Ce qui est inaliénable, c'est que cette Loi est imminente, dans la mesure où elle introduit une gestion privative de la terre qui reste, toutefois, propriété de l'Etat en réponse au souci d'adaptation de l'activité agricole à l'environnement économique actuel. Par ailleurs, l'Etat tient, à cor et à cris, au principe de l'appropriation, car estiment-ils, c'est le seul moyen de préserver la vocation agricole de ces terres. L'Etat doit, en ce sens, à l'exemple de certains pays d'Europe, exercer un droit de préemption, acheteur prioritaire, sur toutes les terres agricoles qui se libèrent. Plus de 2,5 millions d'hectares de terres concernés Plus de 2,5 millions d'hectares de terres qui seront ainsi mises dans la corbeille des concessions concernent particulièrement celles démembrées en 1987 et qui avaient enfanté les EAC et EAI, après l'élimination du système de l'autogestion. Aujourd'hui, 90 % des exploitations agricoles collectives (EAC) ont été divisées entre bénéficiaires et sont exploitées individuellement, selon la Chambre nationale d'agriculture. Le reste des terres anciennement du domaine autogéré, elles -même provenant du FNRA (Fonds national de la révolution agraire), a été versé au profit des exploitations agricoles collectives (EAC). Plus de 2,5 millions d'hectares ont été attribués à plus de 210.000 producteurs organisés en 96.629 exploitations agricoles collectives et individuelles (EAC et EAI). On dénombre actuellement 30.519 EAC occupant 1.841 000 ha et 66.110 EAI, pour une assiette foncière de 674.000 ha.