"L'Algérie de demain doit se construire aujourd'hui". Les défis, qui attendent notre pays d'ici 2030, ne peuvent être relevés que si l'on adopte un nouveau mode de gouvernance qui prône la rupture avec les politiques des rafistolages conjoncturels qui n'ont rien apporté depuis 48 années d'indépendance. "Gouverner étant de prévoir, les défis qui attendent l'Algérie sont immenses du fait de l'important retard accusé dans la réforme globale, les politiques socioéconomiques depuis des décennies s'étant réfugiées dans des actions de replâtrages conjoncturels en misant sur la dépense monétaire et aux réalisations physiques souvent ne répondant pas aux normes internationales, sans se préoccuper des coûts, au lieu d'une vision stratégique tenant compte des mutations mondiales. L'Algérie a déjà 48 années d'indépendance politique. Or 2030, c'est l'Algérie de demain qui peut soit rentrer dans la régression économique et sociale ou devenir un pays pivot au sein de l'espace euroméditerranéen et arabo-africain", souligne l'éminent expert algérien, Abderrahmane Mebtoul dans sa récente analyse sur l'économie algérienne. Selon cet expert, nos gouvernements doivent renoncer au modèle de l'économie rentière pour un autre, créateur de richesses, pour éviter le scénario catastrophe qui ne sera que le prolongement des difficultés auxquelles fait face quotidiennement le peuple algérien, avec son lot de complications. "Si l'on prend l'hypothèse la plus optimiste (les derniers rapports internationaux pour l'Algérie donnant un pic pour l'Algérie dans 16 ans pour le pétrole (1% des réserves mondiales et entre 20/25 ans pour le gaz (3% des réserves mondiales) et tenant compte d'une forte consommation intérieure, l'extension du gaz non conventionnel et le nouveau modèle de consommation énergétique qui se mettra en place entre 2015/2020 qui prépare les énergies alternatives qui risquent de raccourcir l'échéance pour le gaz, car on peut découvrir des milliers de gisements non rentables, il n' y aura plus de devises provenant des hydrocarbures, comme cela a été le cas récemment pour l'Indonésie mais qui a préparé l'après-pétrole, dans 20 ans", a-t-il mis en garde. "Nous devrions assister à la suppression du ministère des Hydrocarbures et donc de Sonatrach et par là celui de la Solidarité nationale. Le risque est l'implosion de la caisse de retraite, pas d'attrait de l'investissement, chômage croissant, des tensions sociales de plus en plus criardes avec une instabilité politique, à l'instar des pays les plus pauvres de l'Afrique subsaharienne et risque d'intervention de puissances étrangères en cas d'instabilité du Bassin méditerranéen. ", prédit-il Les solutions préconisées Pour éviter la dérive à l'orée de l'épuisement des richesses du sous-sol, M. Mebtoul met en avant des solutions pour parvenir à substituer notre économie rentière à une économie créatrice de richesses. "Ce scénario se base sur les conditions favorables de développement de l'Algérie, par une gouvernance rénovée grâce à une plus grande moralisation des dirigeants, se basant sur les principes d'un Etat de droit, l'implication de la société, loin des mesures administratives autoritaires, donc des actions démocratiques, corrélativement à la réhabilitation du savoir, du management stratégique de l'entreprise et des institutions, par une libéralisation maîtrisée grâce au rôle central de l'État régulateur". Ce scénario passe également par la lutte contre "la corruption qui s'est socialisée en démobilisant toute énergie créatrice, dont la sphère informelle dont l'intégration suppose non des mesures autoritaires mais d'autres mécanismes de régulation transparents, existant des relations dialectiques au niveau des différentes sphères du pouvoir, entre la logique rentière dominée par les hydrocarbures et la logique de cette sphère informelle produit du dysfonctionnement des structures de l'Etat, reflétant la faiblesse d'un État de non droit", a-t-il révélé en pointant du doigt la sphère financière informelle qui traite en cash rendant inopérant certaines mesures si louables soient-elles comme l'exigence de 500.000 dinars par chèque pour toute transaction, renvoyant d'ailleurs à l'inefficience du système financier lieu de distribution de la rente. Il faudra, selon cet expert de renommée internationale, favoriser le dialogue économique et social, évitant la concentration excessive du revenu national au profit de rentes spéculatives destructrices de richesses, garder une partie de la rente pour les générations futures, mettre en place un nouveau modèle de consommation énergétique reposant sur les énergies renouvelables dont le solaire et promouvoir des segments, y compris les services à valeur ajoutée, en réhabilitant l'entreprise en levant les contraintes d'environnement et son fondement et le savoir actuellement dévalorisé au profit des rentes. Et ce, dans un environnement concurrentiel, bannissant tout monopole. "Cette nouvelle approche reposera sur des allocations bien ciblées d'investissement, les infrastructures n'étant qu'un moyen, devant faire un bilan objectif des impacts réels du programme de la dépense publique 2004/2009 afin d'éviter les mêmes erreurs pour le futur programme 2010/2014, du bilan des assainissements des entreprises publiques ainsi que de l'efficacité de la gestion des réserves de change, notamment des montants placés à l'étranger".