Les ministres des Finances de l'UE se sont montrés divisés, hier, concernant l'idée d'une taxe sur les transactions financières en Europe, souhaitée par la France et l'Allemagne, avant une discussion sur le sujet. "Nous ne voulons pas de nouvelle taxe sur les transactions", a martelé le ministre suédois des Finances Anders Borg, en arrivant à une réunion avec ses homologues de l'UE. "Nous pensons que cela pourrait être nuisible aux recettes fiscales. Et cela pourrait aussi entraîner beaucoup d'activités financières hors d'Europe", a-t-il expliqué. La Suède, qui a déjà mis en place une taxe sur les transactions financières dans les années 1980, avait décidé de la supprimer après quelques années sur un constat d'échec. Les recettes s'étaient révélées décevantes, en raison notamment d'une baisse des volumes d'échanges. Une partie importante de ceux-ci, jusqu'à la moitié en 1990, avaient quitté la Suède pour Londres, selon une étude de la Commission européenne. La ministre espagnole des Finances, Elena Salgado, s'est elle aussi montrée réservée concernant une telle taxe. "Nous avons toujours dit que nous voyions de grandes difficultés pratiques à la mise en place d'une taxe sur les transactions financières", a-t-elle déclaré aux journalistes. La France et l'Allemagne poussent au contraire en faveur de cette taxe. Les ministres français et allemand des Finances, Christine Lagarde et Wolfgang Schäuble, ont écrit en juillet à leur homologue belge Didier Reynders, dont le pays préside l'UE, pour plaider à nouveau sa cause, après un échec des discussions sur ce sujet au sommet du G20 de Toronto (Canada) fin juin. La Commission européenne s'est quant à elle montrée sceptique sur la "faisabilité" d'une telle taxe, qu'elle juge "incertaine", dans un document préparé avant la discussion des ministres des Finances. Des ONG, syndicats et parlementaires européens sont de leur côté montés au créneau pour défendre cette taxe, en marge de la réunion. Dans un communiqué publié mardi, une coalition composée d'Oxfam, des Européens pour une réforme financière (socialistes) ou de la Confédération européenne des syndicats (CES) a demandé aux ministres de "reconnaître les mérites d'une taxe sur les transactions financières".La taxe sur les transactions financières est débattue par la société civile, les responsables politiques et les économistes depuis la proposition de James Tobin, au début des années 1970, de taxer les opérations monétaires internationales afin de décourager la spéculation. Longtemps jugée impraticable, cette idée connaît un regain d'intérêt depuis la crise financière. Elle est désormais évoquée au sein du G20, plus particulièrement par les Européens. La Commission européenne vient de présenter un document informel ("non paper"), exposant les différentes manières de taxer les opérations spéculatives sur les marchés financiers. Elle avance deux options: une taxe sur les transactions financières proprement dites (FTT) et une taxe plus large sur les activités financières (FAT). Dans le premier scénario, deux sous-options sont envisagées, la première consistant à taxer toutes les transactions sans distinction. Cette solution se heurte à des difficultés techniques et politiques importantes. Il est en effet très complexe de calculer l'impôt sur les produits dérivés. En outre, le revenu d'une telle taxe "européenne" serait très déséquilibré, puiqu'il proviendrait du Royaume-Uni pour plus de 70%. L'autre sous-option consisterait à taxer juste les actions. La taxe sur les activités financières serait davantage basée sur les bénéfices et les rémunérations.