Le report par le Trésor américain du rapport sur les pratiques de change des partenaires commerciaux provoque un reflux du yuan lundi face au dollar, par rapport à son plus haut atteint depuis la réévaluation de juillet 2005. Le gouvernement Obama a temporisé vendredi pour éviter une confrontation avec Pékin sur la valeur du yuan en annonçant le report d'un important rapport dans lequel la Chine pouvait peut-être être accusée d'être un pays manipulant sa monnaie. Les médias officiels ont rapporté que le vice-Premier ministre chinois Wang Qishan s'était entretenu avec le secrétaire au Trésor américain Timothy Geithner après ce report, ce qui, de l'avis de cambistes, veut peut-être dire que le gouvernement américain se satisfait de la hausse de plus de 2% du yuan observée depuis début septembre. Ce renchérissement de la devise chinoise est le plus prononcé depuis la réévaluation de 2005. La pression américaine étant momentanément remisée, on peut penser que le yuan évoluera étroitement autour de 6,6500 par dollar, dans la perspective des élections législatives américaines le 2 novembre et du sommet du G20 à Séoul à la mi-novembre. "Il semble que les gouvernements chinois et américain aient conclu une sorte de compromis par lequel le yuan doit s'apprécier d'un certain montant pour désamorcer les tensions à ce sujet", dit un cambiste d'une banque asiatique à Shanghaï. "Mais il y a sans doute une limite d'appréciation du yuan car la Chine ne peut pas faire de concessions qu'aux Etats-Unis; il lui faut aussi se préoccuper de son marché intérieur et en particulier des petits exportateurs dont la marge bénéficiaire n'est que de quelques points de pourcentage". Le dollar se traite à 6,6436 yuans contre 6,6412 vendredi en clôture et un plus bas post-réévaluation de 6,6404 touché vendredi. Avant le début des transactions, la Banque populaire de Chine a fixé le cours-pivot quotidien de la parité yuan /dollar, autour duquel une marge de fluctuation de -/+ 0,5% est autorisée, à 6,6541, en déçà du record de 6,6497 de vendredi. Le yuan s'est apprécié de 2,66% depuis que la banque centrale chinoise a annoncé le désancrage vis-à-vis du dollar le 19 juin, mais le dollar lui-même a chuté de 10% face à un panier de monnaies dans le même temps. Le Quotidien du Peuple juge toutefois que cette hausse rapide ne durera pas car il n'y a pas eu d'amélioration suffisante de la conjoncture économique en Chine ou ailleurs pour l'étayer. Le journal observe en particulier que la pression visant à faire monter le yuan s'apaisera bientôt parce que l'excédent commercial du pays tend à plafonner. Il a diminué à 16,9 milliards de dollars en septembre, un plus bas de cinq mois. Notons que le directeur général de l'Organisation mondiale du Commerce (OMC), Pascal Lamy, a indiqué vendredi à Paris qu'une réévaluation du yuan, monnaie chinoise, " n'aura qu'un impact modeste sur le prix de vente du produit final et ne rétablira probablement pas la compétitivité des produits concurrents qui seraient fabriqués ailleurs". M. Lamy a fait cette remarque dans un discours prononcé au Sénat français, publié sur le site de l'OMC, et l'a justifié par le fait que de plus en plus de produits sont "Made in World". Selon lui, le concept de pays d'origine pour les biens manufacturés est devenu progressivement obsolète au fur et à mesure que les diverses opérations de conception, de fabrication de composants, d'assemblage et de commercialisation ont essaimé dans le monde, créant des chaînes de production internationales. "Le supposé +Made in China+ est certes assemblé en Chine, mais ce qui fait la valeur commerciale de la marchandises provient des nombreux pays qui ont précédé l'assemblage en Chine dans la chaîne de valeur globale", a-t-il fait remarquer.