Des émissaires de l'Union africaine (UA) et de l'organisation régionale ouest-africaine (Cédéao) entament lundi à Abidjan un nouveau round de médiation pour tenter de résoudre la crise politique que traverse la Côte d'Ivoire depuis le second tour du scrutin présidentiel du 28 novembre dernier. Dépêché par l'UA pour coordonner les efforts de la Cédéao (Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest) en Côte d'Ivoire, le Premier ministre kenyan Raila Odinga est arrivé lundi matin à Abidjan où il doit avoir des entretiens avec les différentes parties ivoiriennes, dont les deux présidents proclamés, Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara. Fin décembre, le président de la Commission de l'UA, Jean Ping, a demandé à M. Odinga "d'assurer le suivi de la situation en Côte d'Ivoire et de renforcer les chances de succès des efforts en cours" de la Cédéao. Dimanche, M. Odinga était à Abuja (Nigeria) avec le président Goodluck Jonathan, avec qui il s'est entretenu de la crise ivoirienne, avant d'entamer sa visite en Côte d'Ivoire. A propos de sa visite à Abidjan, le chef du gouvernement kenyan a déclaré à la presse qu'il allait "effectuer une mission de protection de la démocratie et de la voix du peule en Côte d'Ivoire". Les émissaires ouest-africains: les présidents Boni Yayi (Bénin), Ernest Koroma (Sierra Leone) et Pedro Pires (Cap-Vert), sont eux aussi attendus dans la matinée à Abidjan, une semaine après une première mission "sans résultats". A Abidjan, M. Odinga et les trois présidents mandatés par la Cédéao devront s'entretenir avec M. Gbagbo pour tenter à nouveau de le convaincre de céder le pouvoir à son rival Ouattara, reconnu par la communauté internationale comme le président élu. Les quatre médiateurs africains "rencontreront aussi M. Ouattara", a indiqué lundi le ministre de l'Information et porte-parole du gouvernement sierra-léonais, Ibrahim Ben Kargbo. "Les chefs d'Etat de la Cédéao veulent s'assurer que M. Ouattara reprend le contrôle de l'administration du pays", a déclaré M. Kargbo. Ce dernier a ajouté que la Cédéao entendait obtenir "le départ du président sortant et averti que cela ne ferait l'objet d'aucun compromis, la discussion ne devant porter que sur les conditions pour "faciliter" son retrait". Le ministre serra-léonnais a cependant ajouté qu'il fallait proposer à M. Ggagbo des conditions pour "faciliter" son départ, sans préciser lesquelles. Auparavant, la Cédéao a brandi la menace "d'une opération militaire si elle n'obtient pas satisfaction" et en cas d'échec de sa nouvelle mission en Côte d'Ivoire, confrontée depuis un mois à une grave crise politique . Le chef de la Cédéao le président du Nigeria M. Jonathan avait annoncé que son organisation "va prendre des décisions" à propos de l'impasse politique en Côte d'Ivoire. Les efforts de la Cédéao et de l'UA visant à trouver une issue à l'impasse politique en Côte d'Ivoire restent jusqu'ici vains et sans résultats du fait de l'intransigeance de M. Gbagbo refusant toujours de renoncer à la présidence, faisant fi des incessantes pressions internationales. Le 22 décembre 2010, l'UA a réaffirmé son engagement à "prendre des mesures nécessaires contre tous ceux qui continuent à saper la volonté du peuple ivoirien et à inciter à la violence". Sous le coup de sanctions internationales, Laurent Gbagbo, au pouvoir depuis 2000, campe sur sa position de rester le premier responsable de la Côte d'Ivoire, ce qui ne cesse d'attiser la tension entre ses partisans et ceux de son rival Ouattara. Depuis le second tour de la présidentielle de novembre dernier, remportée par Alassane Ouattara, un climat de tension et d'insécurité s'est installé en Côte d'Ivoire marqué par des violences qui ont fait 179 morts depuis la mi-décembre, selon l'ONU. Déplorant une situation humanitaire dégradée, le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a dénoncé récemment des "des cas d'enlèvements, de disparitions forcées, de "détentions arbitraires, d'exécutions sommaires, interdiction des réunions pacifiques, assassinats et destructions de propriétés", signalés en Côte d'Ivoire depuis le début de la crise, qui risque de durer. Le président sortant, qui s'appuie sur le soutien du Conseil constitutionnel et de l'armée, a réaffirmé au cours du week-end qu'il était prêt au dialogue mais a prévenu que Ouattara, désigné vainqueur de l'élection présidentielle par la commission électorale, ne devait pas compter "sur des armées étrangères pour venir le faire président". Un de ses porte-parole a précisé qu'il n'accepterait pas de partir. Depuis le second tour de la présidentielle, le 28 novembre, la Côte d'Ivoire vit dans la crainte d'un embrasement. Plus de 170 personnes ont été tuées dans les violences post-électorales, notamment le 16 décembre lors d'affrontements en marge d'une manifestation de partisans de Ouattara qui tentaient de marcher sur le siège de la radiotélévision ivoirienne (RTI), considérée comme une machine de propagande au service de Gbagbo. Les Etats-Unis et l'Union européenne, qui ont endossé la victoire de Ouattara, ont imposé un embargo sur les voyages de Gbagbo et de ses proches du premier cercle. La Banque mondiale et la Banque centrale d'Afrique de l'Ouest ont annulé sa signature, exerçant une pression financière sur le président sortant.