L'euro a "franchi le cap" et la zone euro a désormais le pire de la crise de la dette derrière elle, a déclaré samedi la ministre française des Finances, Christine Lagarde, devant les décideurs économiques et politiques du monde entier rassemblés à Davos (Suisse). Christine Lagarde a relevé que le succès éclatant, mardi, de l'émission obligataire sur 5 ans à hauteur de 5 milliards d'euros du Fonds européen de stabilisation financière (FESF) destinée à aider l'Irlande, avait renforcé la confiance dans la zone euro. Cette émission "a été sur-souscrite neuf fois. C'est une indication qui montre que sur le marché de la confiance, l'euro a franchi le cap", a-t-elle dit, s'exprimant en anglais lors d'un panel auquel participait aussi son homologue allemand Wolfgang Schäuble. "Ne +shortez+ pas l'Europe et ne +shortez+ l'eurozone", a-t-elle lancé. L'expression "shorter", de l'anglais to short, est utilisée dans les salles de marché et signifie que vous pariez sur la baisse de tel ou tel avoir, comme l'euro par exemple. "Nous voulons être ensemble, nous avons aidé ceux qui étaient en difficulté. Nous avons mis en place un fonds, et nous travaillons à l'affiner, à l'améliorer, et nous sommes certainement prêts à resserrer les rangs et à être ensemble" pour cette tâche, a-t-elle ajouté. M. Schaueble a souligné de son côté que la santé de la zone euro n'était pas aussi mauvaise que celle d'autres régions. L'économie allemande, locomotive de l'Europe, devrait croître entre 2,2% et 2,3 en 2011, a-t-il assuré. "Nous sommes prêts et nous sommes capables de défendre la stabilité de l'euro (...) Nous défendrons l'eurozone dans son ensemble si certaines Etats membres sont en crise (...) Nous sommes totalement convaincus que nous réussirons", a encore affirmé le ministre allemand, abondant dans le sens de sa collègue française. Il a remarqué cependant qu'en dehors de l'eurozone, "personne ne comprend réellement ce qu'est une monnaie commune européenne avec une politique monétaire commune, mais sans politique économique et bugdétaire commune". Le ministre allemand a assuré que les membres de l'eurozone "tireraient les conséquences" de la crise de la dette, "amélioreraient le mécanisme afin de rendre plus efficaces les dispositions communes, le pacte de croissance et de stabilité". Notons par ailleurs que lLes responsables de l'Union européenne étudient la possibilité d'étendre à 30 ans les prêts accordés à la Grèce et à l'Irlande dans le cadre de leur sauvetage et tourner ainsi la page de la crise de la dette, a-t-on appris vendredi de deux sources de la zone euro. Selon ces sources, Axel Weber, membre du conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne et président de l'influente Bundesbank allemande, a suggéré d'étendre la durée des prêts pour les deux pays dans le cadre d'une réponse globale pour surmonter la crise. Les prêts de la Grèce sont pour l'instant de trois ans et ceux de l'Irlande de sept ans. Cette idée a émergé lors de discussions intensives entre ministres de la zone euro, banquiers centraux et responsables en marge du Forum économique mondial de Davos, explique-t-on de mêmes sources. "Il y a toutes sortes d'idées. Je ne sais pas quel poids a celle-ci. Mais naturellement, elle n'a pas été passée sous silence. La Grande-Bretagne et d'autres pays n'ont fini de rembourser certaines obligations de la Première Guerre mondiale que récemment", fait valoir un responsable de la zone euro. Selon les sources, les responsables de l'Union réfléchissent également à une réduction des taux d'intérêt assortis aux prêts consentis par la seule zone euro. Ils portent pour l'instant une surcharge de 300 points de base, exigée par les allemands afin de punir "les pécheurs de la dette". Selon de nombreux économistes, ces taux punitifs risquent de contribuer à accentuer les difficultés des pays en question, les obligeant à dégager une croissance de près de 6% uniquement pour stabiliser leur niveau d'endettement. En 2013, le prêt de sauvetage représentera environ un tiers de son endettement total. Une maturité étendue à un taux moins élevé pourrait lui permettre d'éviter d'avoir à restructurer sa dette au secteur privé, pour l'essentiel détenue par des banques françaises et allemandes.