La septième édition du Festival du théâtre amateur amazigh s'est bouclée, hier, dans la ville d'Akbou, prés de Béjaïa, à la maison de jeunes Abderrahmane-Fares ainsi que dans les contrées avoisinantes. Initiée par l'association "Etoile culturelle" d'Akbou, de concert avec la fondation "Pour le futur", ce rendez vous qui intervient cette année avec le mois sacré du Ramadhan, est exclusivement dédié à la mémoire du dramaturge, poète et Homme de culture, figure particulièrement connus dans les massifs montagneux de la kabylie, Mohand Ouyahia dit Mohya. Pas moins de seize troupes venues des villes de Béjaïa, Tizi Ouzou et de quelques contrées limitrophes ont pris part à cette manif qui s'est déroulée simultanément dans plusieurs endroits notamment à la maison de jeunes d'Akbou, Ighram, Amalou et Chellata…Ce rendez-vous fut clôturé avec une très vielle pièce, " Sin Enni " écrite par Mohand Ouyahia lui-même et adaptée de l'œuvre, "En attendant Godot " de Samuel Beckett. Mise en scène par Latreche Mouhoub et produite par le Théâtre régional de Béjaïa, cette pièce qui n'a cessé d'être reprise par les théâtres régionaux d'expression amazigh, parle de l'absurdité de l'existence. Ce rendez-vous fut aussi une occasion de rendre hommage à un homme de théâtre, Mohand Ouyahia qui n'a cessé d'œuvrer pour faire connaitre les travaux universels du 4e art. De son vrai nom Mohia Abdellah, Mohya est considéré comme un militant artistique qui a fait connaitre aussi bien de Nazim Hikmet que Bertold Brecht, Alfred Jarry ou Eugène Pottié etc. Mohand Ouyahia est également l'auteur de chansons très populaires reprises par Idir, Ferhat, Takfarinas, Ideflawen, Malika Doumrane ou le groupe Djurdjura. Né à Azazga le 1ernovembre 1950, soit quatre ans avant le déclenchement de la guerre de libération, Mohya est sissue d'une famille de montagnards originaire du village Ath Eurbah dans la commune d'Iboudrarène. Le petit se nourrissait de la culture du terroir, notamment la sagesse transmise oralement dans la société et en même temps poursuivait ses études secondaires au lycée Amirouche de Tizi Ouzou en 1968, pour rejoindre l'université d'Alger et obtenir, en 1972, une licence en mathématiques. Son succès dans un concours lui ouvrit les portes de l'Hexagone où il s'installa l'année suivante. A l'université Paris VIII, il se montra particulièrement actif en rejoignant des groupes d'études et en animant des bulletins et des revues. A cette époque, Mohya constitua avec un groupe d'amis, un atelier de traduction-adaptation. Sa vie se confond avec son parcours et son œuvre, littérature, poésie, théâtre, adaptations, traductions,… ne laisse aucun aspect et porta son grain au moulin de la production et de la promotion de tamazight. Depuis son accession à l'université d'Alger, il s'était mit à produire tout en participant au combat identitaire. Il assistait aux cours de Berbère dispensés par Mouloud Mammeri . Les premiers pas, Mohya les fit en tant que poète et plusieurs de ses textes sont interprétés par beaucoup d'artistes kabyles entre autres, Slimane Chabi… Il est vrai que bon nombre de ses poèmes restent, à ce jour, inédits, mais ses nouvelles et les contes n'ont pas été, du reste, négligées dans son œuvre. Timucuha (Contes) qui constituent le véritable gisement de la culture orale berbère ont été fortement travaillés par lui: " Tamacahut n Iqannan (histoire des nains) ", " tamacahut n ye yal (histoire des ânes) ", " asmi nxeddem le théâtre " (quand on jouait au théâtre) et bien d'autre. Mohya aura également préfacé plusieurs publications en écrivant plusieurs essais notamment sur la chanson kabyle. D'autres part, il collabora à vulgariser, à travers des publications militantes (revues et bulletins), les aspects de la culture kabyle. Cependant, c'est dans la traduction et le théâtre que Mohya est considéré comme un pionnier, d'autant plus que ses débuts remontent à son passage au lycée Amirouche où il anima, avec un groupe de lycéens, une troupe théâtrale qui subit l'ostracisme de l'administration qui en voyait une véritable menace. Le hasard, faisant bien les choses, il fit rencontrer les anciens du lycée à l'université d'Alger où ils constituèrent ce qui fut appelé, à l'époque, "Le cercle des étudiants de Ben-Aknoun". Le déclic fut, en quelques sortes, la pièce de Kateb Yacine "Mohamed prends ta valise " qui révolutionna les esprits. Mohya traduisit alors en kabyle " Morts sans sépulture " de J.P. Sartre puis, avec Momoh Loukad cette fois-ci, " la pute respectueuse " du même auteur. En 1974, il adapta " l'exception et la règle " de Brecht (Llem-ik, Ddu d udar-ik) qu'il publia aux éditions Tala. Dans la préface, Mohia insistait déjà sur la nécessité de produire en Tamazight.