Le Premier ministre égyptien, Essam Charaf, a appelé, hier, à une réunion d'urgence du gouvernement, au lendemain des affrontements entre chrétiens coptes et forces de l'ordre qui ont fait 24 morts au Caire. La réunion devait avoir lieu dans l'après-midi, alors que les heurts ont relancé les craintes de violences intercommunautaires dans le pays, selon la même source. Au moins 40 personnes ont été arrêtées dans la nuit à la suite des affrontements qui ont aussi fait plus de 200 blessés, a indiqué un responsable de la sécurité, sans préciser combien étaient musulmans ou chrétiens. Ces violences, les plus meurtrières depuis la révolte qui a renversé le président Hosni Moubarak en février, ont eu lieu en marge d'une manifestation de coptes protestant contre l'incendie d'une église dans le gouvernorat d'Assouan (sud). Un couvre-feu a ensuite été décrété dans le centre de la capitale pour tenter de rétablir le calme. En réaction aux heurts meurtriers, la Bourse du Caire a chuté de 5,15% à son ouverture, hier. Le principal indice (EGX) perdait encore 3,71% à 3.879,12 points, portant son recul depuis le début de l'année à plus de 45%. Dans la nuit, le Premier ministre avait appelé chrétiens et musulmans "à la retenue" et à ne pas céder aux "appels à la sédition". "Ce qui se passe, ce ne sont pas des affrontements entre musulmans et chrétiens, ce sont des tentatives de provoquer le chaos et la sédition", avait dit Essam Charaf sur sa page officielle sur Facebook. Dans des déclarations rapportées par les médias, le Premier ministre avait en outre estimé qu'il s'agissait d'un "complot pour éloigner l'Egypte des élections". Les premières législatives depuis le départ de M. Moubarak doivent se tenir à partir du 28 novembre. Ahmed al-Tayyeb, grand imam d'al-Azhar, la plus haute institution de l'islam sunnite, a appelé de son côté à des discussions entre les membres de la Famille égyptienne, une organisation réunissant des religieux musulmans et chrétiens, "afin de tenter de contenir la crise", selon la télévision. Affrontements meurtriers entre Coptes et policiers au Caire Au moins 24 personnes ont péri, lors d'affrontements au Caire entre la police militaire et des Coptes protestant contre une attaque visant une de leurs églises. Des heurts se poursuivaient en soirée devant un hôpital du Caire. Ces affrontements à coups de bâtons et jets de pierres entre des centaines de manifestants musulmans et chrétiens coptes ont eu lieu près de l'hôpital du centre-ville où étaient soignés les manifestants coptes blessés et où se trouvaient les corps de ceux tués plus tôt dans la soirée lors d'affrontements après une manifestation devant l'immeuble de la télévision publique. Deux à trois cents manifestants se sont rendus devant l'hôpital, où se trouvaient déjà plusieurs centaines de chrétiens, dont de nombreux membres des familles des victimes des affrontements. Ceux-ci ont fait au moins 24 morts et 174 blessés, selon le ministère de la Santé. Plusieurs voitures étaient en feu dans une grande rue voisine de l'hôpital et des manifestants coptes prenaient de l'essence des voitures pour en faire des cocktails Molotov. Les autorités ont décrété un couvre-feu dans le centre du Caire jusqu'à, hier. Les raisons qui ont fait dégénérer ce qui avait commencé comme une marche pacifique de milliers de Coptes du quartier de Chobra vers Maspero, où se trouve la télévision publique dans le centre du Caire, restent confuses. L'Egypte connaît depuis plusieurs mois une montée des tensions confessionnelles, alimentées notamment par des querelles de voisinage et des différends sur la construction d'églises. Les Coptes, qui représentent de 6 à 10% des Egyptiens, s'estiment discriminés dans une société en grande majorité musulmane. Ils ont été visés par plusieurs attentats, en particulier celui du Nouvel an contre une église à Alexandrie (23 morts). Démissions exigées Plus tôt dans la journée, des milliers de manifestants rassemblés devant le bâtiment de la télévision publique ont brandi des croix et des portraits de Jésus et lancé des cailloux et des engins incendiaires sur les forces de l'ordre et incendié quatre véhicules au moins. Ils scandaient: "A bas le maréchal (Hussein Tantaoui)", qui dirige l'Egypte depuis la démission sous la pression de la rue du président Hosni Moubarak en février. Ils ont brièvement essuyé des jets de pierres sur leur chemin.