De violents affrontements entre musulmans et chrétiens ont fait douze morts et plus de 200 blessés samedi soir dans un quartier populaire du Caire, selon un nouveau bilan de la télévision d'Etat. Citant des responsables du ministère de la Santé, la télévision a indiqué que douze personnes avaient péri et 232 autres avaient été blessées lors des affrontements interconfessionnels dans le quartier d'Imbaba. Il s'agit de quatre chrétiens et de six musulmans, les corps de deux victimes n'ont pas encore été identifiés. Dans un bilan précédent, la télévision d'Etat avait indiqué que dix personnes avaient été tuées et 186 autres blessées. Les principaux affrontements se sont produits autour d'une église du quartier d'Imbaba, attaquée par des musulmans au motif qu'une chrétienne supposée vouloir se convertir à l'islam y serait enfermée. L'armée égyptienne a par ailleurs annoncé que 190 personnes arrêtées après ces violences seraient déférées devant des tribunaux militaires. Le gouvernement égyptien a assuré hier qu'il défendrait la sécurité nationale d'une «main de fer» et qu'il prendrait des mesures contre les attaques de lieux de culte, au lendemain d'affrontements meurtriers entre musulmans et chrétiens. Les autorités vont «frapper d'une main de fer tous ceux qui cherchent à nuire à la sécurité de la nation», a déclaré le ministre de la Justice, Abdel Aziz Al-Gindi, à l'issue d'une réunion de crise après les violences qui ont fait 12 morts samedi soir au Caire. Le gouvernement va «appliquer de manière immédiate et ferme les lois qui criminalisent les attaques contre des lieux de culte et contre la liberté de croyance», a assuré le ministre, ajoutant que les lois antiterroristes seraient utilisées contre les fauteurs de troubles. Le Premier ministre égyptien Essam Charaf avait tenu plus tôt dans la matinée une réunion de crise. M. Charaf, qui prévoyait une tournée hier aux Emirats arabes unis et à Bahreïn, a reporté son voyage et convoqué «une réunion d'urgence du cabinet pour examiner les événements regrettables à Imbaba», selon l'agence officielle Mena et la télévision d'Etat. Le ministre de l'Intérieur, Mansour Al Issawi, s'est rendu sur le lieu des affrontements. Il a été pris à partie par des musulmans et des Coptes de ces quartiers réclamant davantage de sécurité, a rapporté l'agence Mena. Selon Ali Abdel Rahmane, gouverneur de Giza, dont dépend Imbaba, le gouvernement a ordonné un dédommagement de 840 dollars pour les familles des victimes et 336 dollars pour celles des blessés. L'armée, qui assure la direction du pays depuis le départ du président Hosni Moubarak, le 11 février dernier, a exhorté «toutes les communautés en Egypte, les jeunes de la révolution et les théologiens musulmans et chrétiens à s'opposer fermement aux tentatives de groupes obscurantistes de torpiller l'unité nationale». Plusieurs manifestations à l'appel de salafistes ont eu lieu ces dernières semaines pour réclamer «la libération» de Camilia Chehata et Wafa Constantine, épouses de prêtres, selon eux, séquestrées par l'Eglise. Les deux femmes auraient chacune quitté son mari après une dispute conjugale, il y a sept ans pour Mme Constantine, l'année dernière pour Mme Chehata. Toutes deux ont été raccompagnées chez elles par la police, après que les Coptes eurent assuré qu'elles avaient été enlevées par des musulmans. L'Eglise copte a démenti l'éventuelle conversion des deux femmes. Saisi par des islamistes, le parquet a demandé le 30 avril à entendre Camilia Chehata, mais l'Eglise a refusé de recevoir la notification transmise par un huissier. Faut-il rappeler que ces heurts entre musulmans et Coptes en Egypte sont devenus cycliques. Les Coptes représentent entre 6 et 10% de la population égyptienne. Présents en Egypte depuis les premiers temps du christianisme, ils s'estiment discriminés et de plus en plus marginalisés dans une société en grande majorité musulmane sunnite. Ils ont été visés par plusieurs attentats, en particulier celui du 31 décembre contre une église copte à Alexandrie, nord de l'Egypte, qui a fait 21 morts. G. H.