L'entreprise japonaise Olympus a lancé des poursuites judiciaires contre 19 anciens ou actuels membres de son conseil d'administration pour leur implication dans le trucage de ses comptes, et demandé la démission des administrateurs concernés encore en poste. La firme d'appareils photo et d'endoscopes leur reproche d'avoir mis en œuvre ou laissé faire des montages financiers complexes depuis la fin des années 1990, pour dissimuler un passif de 134,8 milliards de yens (1,35 milliard d'euros au cours actuel) issu d'investissements financiers risqués. La décision de réclamer ces dommages et intérêts, totalisant 16,54 milliards de yens (165 millions d'euros), a été prise par les commissaires aux comptes du groupe, en vertu d'une procédure exceptionnelle, a annoncé Olympus, hier. Ils se sont fondés sur un rapport de trois avocats, désignés expressément pour identifier les responsabilités des membres du conseil d'administration dans l'affaire, et dont les conclusions ont été publiées simultanément.D'après cet exposé de 200 pages, le maquillage comptable aurait coûté 85,9 milliards de yens (860 millions d'euros) à Olympus, en frais divers. La réputation du groupe a de plus été saccagée et la valeur de son action à la Bourse de Tokyo a fondu de moitié depuis la révélation de ce scandale par l'ex-P-DG britannique Michael Woodford à la mi-octobre. Parmi les responsables nommément visés par ces plaintes figure l'ex-P-DG Tsuyoshi Kikukawa, accusé d'avoir joué un rôle clé dans cette affaire. L'entreprise réclame 3,61 milliards de yens (36 millions d'euros) de dommages à cet ancien responsable qui a quitté toutes ses fonctions depuis. Il fait partie d'un groupe de six administrateurs désignés comme directement impliqués dans l'élaboration du maquillage, ou au moins clairement au courant des manipulations. Olympus a aussi intenté des poursuites contre son actuel P-DG, Shuichi Takayama, à qui il reproche, comme aux 12 autres anciens ou actuels administrateurs poursuivis, d'avoir manqué à son devoir de vigilance. Le groupe réclame 500 millions de yens (5 millions d'euros) à M. Takayama. L'entreprise a en outre demandé aux administrateurs visés par la plainte et encore en activité de démissionner au printemps. "Les membres actuels du conseil d'administration dont le comité a pointé la responsabilité et qui sont poursuivis en justice doivent démissionner afin de ne plus influer sur la gestion de l'entreprise, sitôt terminée l'assemblée extraordinaire des actionnaires" qui sera convoquée en mars ou avril, a expliqué Olympus dans un communiqué. La firme n'a en revanche pas porté plainte contre M. Woodford, qui avait été limogé pour avoir demandé des éclaircissements sur ces irrégularités comptables, avant d'exposer l'affaire à la presse. Depuis ces révélations, le procureur de Tokyo, la police et le gendarme de la Bourse ont ouvert des enquêtes, de même que des autorités aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne. M. Woodford, premier patron étranger de l'histoire de ce groupe nonagénaire, a toutefois abandonné vendredi dernier sa tentative de reprendre les rênes d'Olympus, expliquant manquer du soutien de ses principaux actionnaires japonais, notamment de grandes banques nippones. Après ces nouveaux rebondissements, l'action du groupe s'est envolée, hier matin, à la Bourse de Tokyo et gagnait 22,22% à la mi-séance, à 1 287 yens. Outre l'annonce des poursuites, un article de presse affirmait que le gendarme de la Bourse de Tokyo avait décidé de ne pas radier immédiatement le titre de la cote, comme il en a la possibilité au vu des dissimulations comptables. A la place, les efforts d'Olympus pour améliorer sa gouvernance seraient scrutés pendant trois ans, à l'issue desquels il serait déterminé si l'action peut ou non rester cotée.