Les prix élevés de l'or noir ont permis à Total d'engranger de nouveau l'an dernier des bénéfices astronomiques de plus de 12 milliards d'euros, un niveau qui rapproche le géant pétrolier français de ses records historiques. Le patron du groupe, Christophe de Margerie, s'est efforcé de déminer par avance les critiques récurrentes sur ces profits insolents, en faisant valoir sa contribution à l'économie française. Comme à l'habitude, les résultats publiés cette semaine par Total ont de quoi donner le tournis, avec un bond de 16% sur un an du bénéfice net 2011, à 12,27 milliards d'euros, et de 11% du bénéfice net ajusté (qui exclut les effets de stocks et autres éléments exceptionnels) à 11,42 milliards. Le chiffre d'affaires a lui aussi grimpé de 16% à 184,7 milliards d'euros. Cette nouvelle envolée est liée aux cours très élevés du pétrole brut l'an dernier, le prix moyen du baril de Brent ayant grimpé de 40% à 111,3 dollars. La flambée des cours a compensé une légère baisse de la production du groupe et la morosité persistante de ses activités de raffinage. Total a vu sa production d'hydrocarbures reculer de 1% l'an passé, à 2,346 millions de barils équivalent pétrole par jour (Mbep/j). Cette baisse est liée notamment au conflit en Libye, ainsi qu'aux difficultés persistantes dans l'aval, c'est-à-dire les activités de raffinage et de distribution de produits pétroliers, dont le résultat opérationnel a reculé de 7% à 1,08 milliard. Les résultats du groupe sont les meilleurs depuis ceux de l'exercice 2008. Cette année-là, Total avait dégagé un bénéfice net ajusté de 13,9 milliards d'euros, profitant à la fois de prix de l'or noir très élevés (avec un sommet absolu à 147 dollars le baril) et d'activités de raffinage en pleine forme. Sur le seul quatrième trimestre 2011, le bénéfice net a augmenté de 13% à 2,29 milliards, et le bénéfice ajusté de 7% à 2,725 milliards, pour une production stable à 2,384 Mbep/j. Fantasmes et réalité Ces résultats sont conformes aux attentes des analystes, qui tablaient sur un bénéfice trimestriel ajusté de 2,7 milliards, et une production de 2,38 Mbep/j, d'après des estimations compilées par Dow Jones Newswires. Total a confirmé encore une fois son objectif d'une hausse de sa production de 2,5% par an en moyenne entre 2010 et 2015. Au titre de 2011, le groupe va par ailleurs verser à ses actionnaires un dividende complet de 2,28 euros, identique à celui de l'exercice précédent. Evoquant devant la presse les fantasmes récurrents sur les profits insolents de son groupe, M. de Margerie les a opposés à la réalité de ses investissements. Nos profits sont plus qu'utiles, et surtout garants de nos investissements, a-t-il plaidé. Il a expliqué que le groupe entendait poursuivre une politique d'investissements colossaux, avec 20 milliards de dollars d'investissements nets prévus cette année (contre 22 milliards l'an dernier). Rappelant que Total emploie en France 35.000 personnes sur 170 sites, il a précisé que le groupe paierait cette année environ 1,2 milliard d'euros d'impôts, dont 300 millions au titre de l'impôt sur les sociétés (IS). L'an dernier, Total n'avait pas payé d'IS car ses activités françaises étaient déficitaires. Les investissements passés ont permis de porter les réserves prouvées d'hydrocarbures du groupe de 7% l'an dernier, à 11,423 milliards de barils équivalent pétrole, avec un taux de renouvellement des réserves de 185%, l'un des meilleurs du secteur, a par ailleurs souligné le groupe. C'est en augmentant la production qu'on arrive à la fin à contenir les prix du pétrole, y compris en extrayant gaz et huiles non conventionnelles, a par ailleurs plaidé M. de Margerie, rappelant ainsi son opposition à l'interdiction de la fracturation hydraulique en France, seule technologie qui permettrait d'exploiter les ressources de gaz de schiste du sous-sol national.