L'échange de dette lancé par la Grèce à destination de ses créanciers privés, dont le résultat a été annoncé, hier, est un montage complexe visant à soulager le pays en effaçant plus de la moitié de l'ardoise, soit 107 milliards d'euros. En voici les chiffres essentiels: Le montant de la dette grecque concernée par cet échange atteint 206 milliards d'euros (sur une dette publique globale de plus de 350 milliards). Sur ces 206 milliards, 86%, soit 177 milliards, sont des obligations de droit grec, le reste étant des obligations de droit international. L'objectif de cette opération est de réduire le poids de la dette, de plus de 160% du PIB actuellement à 120,5% en 2020. Pour que l'opération permette vraiment de soulager la Grèce, il fallait que la participation des créanciers privés soit importante. L'objectif visé était d'au moins 90% pour permettre un allègement suffisant de la dette: il fallait donc que les créanciers privés, représentant 90% du total de la dette concernée (206 milliards), acceptent cet échange. La participation volontaire a atteint 83,5%, selon les chiffres publiés, hier, par le ministère grec des Finances. Sur la partie des titres de droit grec, la participation atteint 85,8%, mais seulement 69% pour les obligations de droit étranger. C'est au-delà du seuil minimum fixé par la Grèce pour procéder à l'échange, soit 75%, mais inférieur aux 90% désirés. Le ministère grec des Finances a donc fait part, hier, de son intention d'activer les clauses d'action collective (CAC) qui existent dans les contrats régissant les obligations de droit grec éligibles à l'échange. Ces clauses permettent d'imposer à l'ensemble des créanciers une modification qui n'aurait été acceptée que par une partie d'entre eux. Concrètement, ce mécanisme fera passer la participation, volontaire ou contrainte, à 95,7% des 206 milliards. Elle pourra même encore augmenter, le gouvernement grec ayant décidé de prolonger jusqu'au 23 mars la possibilité pour les détenteurs d'obligations régies par le droit international de se présenter finalement à l'échange de dette, clos, avant-hier soir à 20H00 GMT. Au total, banques, assureurs, fonds d'investissement et fonds de pension vont perdre jusqu'à 107 des 206 milliards d'euros de dette grecque qu'ils détenaient. En échange d'une obligation d'un montant initial de 100, la Grèce propose de donner aux créanciers des titres d'une valeur de 46,5 en renonçant au reste. Concrètement, ils vont recevoir des titres dont la valeur sera inférieure de 53,5%. Il s'agira d'obligations émises par le Fonds européen de stabilité financière (FESF) pour 15% de la valeur initiale et de nouvelles obligations grecques pour 31,5%. Les 53,5% restants seront perdus. Réunion du FMI sur un nouveau prêt programmée pour le 15 mars Le Fonds monétaire international a annoncé, avant-hier, qu'une réunion de son conseil d'administration pour examiner un nouveau prêt à la Grèce était provisoirement programmée le 15 mars. "La réunion du conseil d'administration est programmée de manière provisoire pour le 15 mars", a indiqué lors d'un point de presse à Washington le directeur des relations extérieures de l'institution, Gerry Rice. "Cela dépend évidemment [...] de la mise en oeuvre de mesures préalables par les autorités grecques, et de l'obtention complète d'assurances sur le financement y compris un accord sur la restructuration de la dette détenue par le secteur privé", a-t-il ajouté. Le FMI a indiqué qu'il souhaitait une participation forte, mais n'a pas défini un seuil qui lui paraîtrait nécessaire. "Nous avons intérêt manifestement à ce que l'échange de dette réussisse. Cela exigera un taux de participation élevé", a expliqué M. Rice. Mais "il appartient aux autorités et à leurs conseillers juridiques de déterminer quel taux de participation peut être atteint, et c'est une question de choix politique. Nous ne gérons pas étroitement ce processus", a-t-il souligné. Le porte-parole s'est refusé à dire quel serait le montant du prêt qu'envisage d'accorder le FMI: "la taille exacte [...] n'a pas encore été déterminée. Encore une fois c'est quelque chose dont nous discuterons la semaine prochaine avec le conseil d'administration". Selon le ministre des Finances allemand Wolfgang Schäuble, le nouveau prêt sera au maximum de 23 milliards d'euros: 10 milliards d'euros restant du premier prêt accordé en mai 2010, et 13 milliards d'euros supplémentaires. Interrogé sur ce que ferait le FMI si la restructuration de la dette détenue par le privé échouait, M. Rice s'est aussi refusé à répondre. "Prenons les choses les unes après les autres plutôt que de nous projeter dans le futur", a-t-il affirmé. Il a rapporté que le FMI était satisfait des avancées ces dernières semaines des mesures demandées à la Grèce. "Nous sommes convaincus que la Grèce fait des progrès constants vers leur mise en œuvre. Notamment la loi de finances rectificative a été adoptée par le parlement, et des réformes critiques du marché du travail ont été promulguées", a-t-il relevé. "Les autorités ont pour objectif, d'après ce que nous comprenons, que les mesures qui restent, concernant le secteur financier, l'administration fiscale, et des réformes structurelles, soient mises en oeuvre dès que possible", a-t-il déclaré.