Le ministre des Finances allemand Wolfgang Schäuble a prévenu, avant-hier, les députés allemands que ce n'était "sans doute pas la dernière fois que le Bundestag devait se pencher sur des aides à la Grèce", avant un vote lundi sur une deuxième aide à Athènes. "Il n'y a pas de garantie que la voie choisie conduise au succès", écrit M. Schäuble dans un courrier adressé aux 620 députés du Bundestag, Chambre basse du parlement allemand, et "ce n'est sans doute pas la dernière fois que le Bundestag doit se pencher sur des aides à la Grèce". Mais "les perspectives de succès des alternatives me paraissent encore plus faibles", argumente-t-il dans cette lettre, qui sollicite le feu vert des élus à une deuxième aide à la Grèce de 130 milliards d'euros, lundi. "Parce que je suis convaincu que la voie sur laquelle nous nous sommes mis d'accord (une participation substantielle des créanciers privés, des réformes contraignantes en Grèce, des aides de la communauté des Etats le temps de la transition) est la plus susceptible de mener au succès et la plus responsable, je vous demande votre accord", écrit encore le ministre. Munie de l'aval du Bundestag, dont l'approbation ne fait pas de doute, la chancelière ira ratifier lors d'un sommet, jeudi et vendredi, à Bruxelles les aides à la Grèce décidées en début de semaine par les ministres des Finances de la zone euro. Dans son courrier, M. Schäuble rappelle que "l'Allemagne finance toujours les aides (...) avantageusement". L'Allemagne emprunte en effet à des taux très faibles sur le marché de la dette, et, malgré une baisse du taux consentie décidée par ses partenaires, les crédits accordés à la Grèce rapporteront à Berlin plus qu'ils ne coûtent. L'Allemagne, première économie de la zone euro, est le plus gros contributeur aux plans d'aides successifs mis en place. La deuxième aide à la Grèce se fera toutefois par le biais du FESF, le fonds de soutien mis sur pied en 2010, et n'implique pas le déblocage de nouveaux fonds par les pays européens. La Grèce lance l'appel d'offres de l'opération d'échange des obligations La Grèce a officiellement lancé, avant-hier, l'appel d'offres de l'opération d'échange des obligations détenues par les créanciers privés du pays pour parvenir à effacer 107 milliards d'euros de dette, a indiqué une source gouvernementale. Un document publié sur un site spécialement créé à l'en-tête du ministère des Finances et de l'Organisme de la dette grecque (Pdma) constitue l'offre officielle, selon cette source, de l'opération qui doit permettre d'effacer 53,5% de la dette grecque détenue par des créanciers privés (banques, sociétés d'assurance ou fonds d'investissement) et d'éviter au pays la faillite. Les titres invités à participer au PSI ( Private Sector Involvement) représente une valeur totale d'environ 206 milliards d'euros, précise ce document. Les modalités du PSI ont été finalisées par les ministres des Finances de la zone euro lors d'une réunion à Bruxelles dans la nuit de lundi à mardi. Le Parlement grec a voté, jeudi, la loi permettant sa mise en œuvre et le gouvernement a entrepris un effort titanesque pour mettre sur orbite cette procédure hors norme, avait expliqué dans la matinée le Premier ministre Lucas Papademos. Le suspense réside désormais dans la proportion de créanciers privés détenteurs d'obligations grecques qui vont accepter une décote de 53,5% sur les titres qu'ils détiennent et qui représentera une perte finale dépassant 70% de leur valeur initiale. Les candidats volontaires à l'échange de dette auront jusqu'au 9 mars pour se faire connaître et l'opération elle-même devrait se dérouler d'ici le 12 mars pour les obligations de droit grec et les 5 et 6 avril pour celles du droit anglais et japonais, avait précisé au Parlement le ministre des Finances Evangélos Vénizélos. La loi sur le PSI prévoit la possibilité de déclencher des clauses d'action collective (CAC) pour contraindre les créanciers réticents à prendre part à l'opération d'échange. Cette restructuration de dette constitue l'un des deux volets du plan de sauvetage record de la Grèce, la seconde étant un prêt de 130 milliards d'euros sur trois ans qui vient s'ajouter à celui de 110 milliards d'euros accordé par la zone euro et le FMI en 2010 et dont une partie a été déjà versée. La Grèce est entrée dans une course contre la montre afin d'éviter la faillite au 20 mars, date à laquelle le pays doit rembourser 14,5 milliards d'euros. A Athènes, Jack Lang promet un nouveau dialogue européen sur la Grèce L'ancien ministre socialiste français Jack Lang, a promis qu'un nouveau dialogue européen s'engagera avec la Grèce pour favoriser la croissance du pays en cas de victoire à la présidentielle française du candidat François Hollande dont il était le représentant spécial à Athènes. En cas de succès du socialiste François Hollande à l'élection du mois de mai, nous proposerons que l'Union européenne engage un nouveau dialogue avec les responsables grecs pour assurer le financement d'un certain nombre de projets concrets d'infrastructure, de développement, de recherche scientifique, d'éducation à même de redonner à la Grèce l'énergie qui est en elle. Sans nier certaines mesures positives de l'accord européen conclu en début de semaine, notamment en matière d'allègement de la dette, l'ancien ministre de la Culture a estimé que certaines conditions imposées à la Grèce sont violentes et brutales dans un plan de sauvetage au caractère parfois punitif. Certaines catégories populaires sont saignées à blanc comme les retraités, les bénéficiaires du salaire minimum et certains fonctionnaires, a observé M. Lang au cours d'une conférence de presse à Athènes où François Hollande a souhaité qu'il soit son représentant spécial en tant qu'ami de longue date de la Grèce. Le candidat socialiste m'a demandé d'adresser un message d'amitié, de solidarité et d'espoir à la Grèce, a dit M. Lang qui a rencontré le président de la République Carolos Papoulias. Les modalités du plan de sauvetage adopté à Bruxelles, qui combine des prêts de 130 milliards d'euros et une opération d'effacement de dette, n'apportent pas la moindre mesure en faveur du développement de l'économie, a regretté M. Lang. C'est le reproche que les socialistes font également au Mécanisme européen de stabilité (MES) ratifié mardi en France par l'Assemblée nationale et au pacte de stabilité budgétaire conclu entre 25 pays de l'UE, qui doit être officiellement signé le 1er mars et que François Hollande veut renégocier en cas de victoire. Les socialistes se sont abstenus de voter le MES, destiné à devenir le pare-feu permanent de la zone euro contre les crises de la dette souveraine. Nous ne sommes pas contre les mesures de stabilité, c'est un devoir minimum de bien gérer les finances publiques d'un pays mais ce traité ne peut être voté tel quel puisque rien n'est écrit, sur la croissance, les investissements, le développement, a analysé M. Lang. Il a plaidé pour une Europe qui ne soit pas dominée par l'hégémonie d'une idéologie, d'un pays, regrettant au passage l'attitude de refus de la Chancelière allemande Angela Merkel ces derniers mois. Tout en reconnaissant que certaines erreurs ont été commises par certains responsables politiques grecs, Jack Lang a jugé inacceptable la mise sous tutelle que constitue, à ses yeux, la surveillance accrue de la Grèce de la part de ses créanciers pour s'assurer qu'elle ne dévie pas des objectifs fixés.