L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) et l'Iran, soupçonné de vouloir se doter de l'arme nucléaire, se sont retrouvés, hier, pour la deuxième et dernière journée de leurs discussions à Vienne qualifiées jusqu'ici de constructives côté iranien. Cette rencontre, la première depuis trois mois, est suivie de très près car son issue est susceptible d'influencer une réunion-clé entre Téhéran et les grandes puissances le 23 mai à Bagdad. Les discussions sont bonnes et constructives. Elles sont sur la bonne voie, a déclaré Ali Asghar Soltanieh, l'ambassadeur iranien auprès de l'AIEA, cité par la presse officielle. La veille, le chef des inspecteurs et directeur général adjoint de l'agence onusienne Herman Nackaerts avait appelé Téhéran à donner des gages concrets de coopération. L'objectif de ces deux jours est de trouver un accord sur une approche visant à résoudre toutes les questions en suspens avec l'Iran, avait-il déclaré. Il est important que nous abordions la substance de ces questions et que l'Iran nous laisse accéder aux personnes, documents, informations, et sites pouvant aider à leur clarification, avait-il insisté. Les discussions avaient été interrompues il y a trois mois après l'échec de deux visites à Téhéran d'inspecteurs de l'agence de l'Organisation des Nations unies (ONU). Ces derniers avaient affirmé s'être vu refuser l'accès au site militaire de Parchin, où l'Iran aurait, selon les soupçons de l'agence, procédé à des tests d'explosion conventionnelle pouvant être applicables au nucléaire, ce que Téhéran dément. En novembre, l'agence avait publié un rapport, le plus critique en huit ans d'enquête, où elle avait présenté un catalogue d'éléments indiquant que l'Iran avait travaillé à la mise au point de l'arme atomique jusqu'en 2003 et, peut-être, au-delà. L'issue la plus optimiste de la réunion serait de voir l'Iran accepter d'ouvrir Parchin et approuver un cadre de vérification qui n'entame pas les droits des inspecteurs de l'agence, estime Mark Hibbs, expert du groupe de réflexion américain Carnegie Endowment for International Peace dans une analyse. La reprise du dialogue à Vienne est considérée par de nombreux experts comme un test des intentions de l'Iran avant la tenue de la réunion de Bagdad avec le Groupe 5+1 (Etats-Unis, Chine, Russie, France, Grande-Bretagne et Allemagne). Cette rencontre, qui fait suite à une reprise de contact jugée positive en avril à Istanbul, doit permettre d'entrer dans le vif du sujet. Des responsables iraniens ont suggéré ces dernières semaines que le pays serait prêt, sous condition, à accepter de renoncer à l'enrichissement d'uranium jusqu'à 20%, au cœur de son conflit avec les grandes puissances. Enrichi jusqu'à 90%, l'uranium entre dans la composition de l'arme atomique. Le quotidien Los Angeles Times avait fait de son côté état de rumeurs selon lesquelles les Etats-Unis pourraient envisager de laisser l'Iran enrichir à un faible degré de pureté pour produire de l'électricité, idée rejetée avec véhémence par Israël. Le ministre israélien de la Défense Ehud Barak a pressé, avant-hier, la communauté internationale d'exiger que l'Iran cesse tout enrichissement d'uranium. Téhéran est soupçonné par les Occidentaux et l'Etat hébreux de vouloir fabriquer l'arme atomique, malgré ses démentis répétés. Le pays fait l'objet de six résolutions de l'ONU pour son programme nucléaire, dont quatre assorties de sanctions. Ahmadinejad appelle l'Occident à changer d'attitude avec l'Iran Le président Mahmoud Ahmadinejad a appelé l'Occident à changer d'attitude vis-à-vis de l'Iran avant la reprise fin mai à Bagdad des discussions sur le programme nucléaire controversé de Téhéran. Si l'Occident change d'attitude et respecte le peuple iranien, il gagnera en retour le respect des Iraniens, a déclaré M. Ahmadinejad, cité par la presse officielle, lors d'un déplacement à Qouchan (nord-est). Ils doivent savoir que la nation iranienne ne cédera pas d'un pas sur son droit fondamental au nucléaire, a réaffirmé le président iranien. L'Iran, que les Occidentaux et Israël soupçonnent de vouloir fabriquer l'arme atomique, doit reprendre le 23 mai à Bagdad ses discussions avec les pays membres du groupe 5+1 (Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie, Chine et Allemagne), relancées le 14 avril à Istanbul. Le président Ahmadinejad a par ailleurs répété qu'aucun dirigeant intelligent ne se lancerait dans la construction d'une arme atomique. Aucun être intelligent ne dépense de l'argent pour construire l'arme atomique, a déclaré M. Ahmadinejad, selon Irna. Si les dirigeants (des pays possédant l'arme atomique) étaient intelligents, ils dépenseraient l'argent de leur peuple pour améliorer la vie de leurs citoyens, a-t-il dit. Les dirigeants iraniens ne cessent d'affirmer qu'ils ne veulent pas construire l'arme atomique qu'une fatwa du Guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, avait déclarée contraire à l'islam. Avant la réunion de Bagdad, l'Iran a par ailleurs repris lundi à Vienne ses discussions avec l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) qui fourniront des indications sur les intentions iraniennes, selon des experts et des diplomates. Le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Ramin Mehmanparast, a assuré la veille que Téhéran accueillerait avec bienveillance la réunion de Bagdad si elle est dépourvue de pressions et de pré-conditions, selon des propos rapportés par la presse. Dimanche, le principal négociateur iranien sur le nucléaire, Saïd Jalili, avait mis en garde l'Occident contre les mauvais calculs qui pourraient faire échouer le sommet de Bagdad, lors d'un entretien avec l'ancien Premier ministre français Michel Rocard. Après cette entrevue, M. Rocard, qui était en visite privée à Téhéran, a assuré que l'Iran était prêt à remettre les compteurs à zéro et à faire des pas en avant pour parvenir à une solution négociée de la question nucléaire.