Le Fonds monétaire international s'est mis, avant-hier, en retrait de la Grèce, en annonçant qu'il se refusait à travailler avec le gouvernement transitoire et qu'il attendait les élections de juin. Alors qu'à Athènes un exécutif intérimaire prenait ses fonctions, le FMI a choisi de suspendre ses contacts avec le pays jusqu'aux législatives programmées pour le 17 juin. La Grèce ne devrait donc plus entendre parler du FMI pendant un mois. "Nous attendons avec intérêt de prendre contact avec le nouveau gouvernement une fois qu'il aura été formé", a affirmé à la presse un porte-parole de l'institution, David Hawley. A savoir le gouvernement formé "après les élections", a-t-il précisé. "L'essentiel est que notre mission à Athènes sera relancée après les élections. Je n'ai pas de date spécifique", a poursuivi le porte-parole. Ce choix est logique sachant que le gouvernement intérimaire ne devrait pas avoir de Parlement à sa disposition: celui-ci devait en principe être dissous, hier, conformément à la Constitution. Ce gouvernement sera donc incapable d'appliquer les mesures que demande le FMI à la Grèce. De plus, le Fonds a insisté ces derniers mois pour dire qu'il souhaitait que son programme économique soit soutenu par l'opinion. Les élections législatives anticipées du 6 mai ont donné lieu à une percée historique des partis protestataires, qui ont fait campagne sur leur rejet du "mémorandum" des politiques économiques souhaitées par le FMI et ses deux partenaires, la Commission européenne et la Banque centrale européenne. La fragmentation du Parlement a empêché la Grèce de former un gouvernement de coalition en mesure d'appliquer le "mémorandum". Et à en croire les sondages, les partis anti-FMI, et en particulier la gauche Syriza, devraient conforter leur implantation au Parlement. Pour les analystes financiers, l'appartenance de la Grèce à la zone euro est déjà menacée. "La réédition des élections grecques pourrait bien mettre en route le processus de sortie", commentait Jens Nordvig, de la maison de courtage Nomura. Diego Iscaro, du cabinet de conseil IHS Global Insight, estimant qu'il y avait 75% de chances pour que la Grèce abandonne la monnaie unique. Le FMI y songe "Nous, au FMI, devons être techniquement prêts à tout, parce que c'est notre métier. Mais je ne suis pas en train de laisser entendre que c'est une solution souhaitable. Je dis seulement que parmi l'étendue des multiples possibilités, c'est l'une de celles que nous devons envisager", a déclaré la directrice générale du FMI Christine Lagarde la veille sur une télévision néerlandaise. "Je ne dis pas que ce serait plus coûteux [que le maintien de l'euro en Grèce], car je ne compare pas. Je dis simplement que ce serait extrêmement coûteux, et pas seulement pour la Grèce", a-t-elle poursuivi. Le FMI a accordé en mars à Athènes un nouveau prêt de 28 milliards d'euros, succédant à celui de 30 milliards d'euros de mai 2010, dont deux tiers avaient été déboursés. Il n'a versé que 1,6 milliard d'euros de ce nouveau prêt, et devait en verser 1,6 milliard supplémentaires fin mai. Mais comme cela nécessite la formation d'un gouvernement ayant une majorité au Parlement, cela devrait intervenir en juin au plus tôt. Pour certains analystes, la question n'est plus de savoir si le FMI va financer la Grèce, mais s'il va se faire rembourser l'argent qu'il lui a prêté. "Quand bien même le FMI se félicite de n'avoir jamais accusé de pertes dans aucun programme, une sortie de la Grèce de l'euro mettrait certainement à l'épreuve cet historique", estiment ceux de la banque Barclays.