Les prix à la consommation au Japon, hors ceux des produits périssables, ont baissé de 0,1% en 2012 sur un an, tandis que toutes catégories confondues ils ont été étales sur un an, montrant que le pays est loin d'être débarrassé de la déflation qui bride son activité. Selon les données publiées, avant-hier, par le ministère des Affaires intérieures, les prix au détail ont de surcroît encore reculé de 0,2% en décembre sur un an, à cause notamment du repli des tarifs des appareils électroniques et électroménagers. La banque centrale du Japon (BoJ), dont le rôle est de veiller à l'évolution des prix et d'agir en conséquence, a fixé cette semaine pour le pays, sous la pression du gouvernement, un objectif d'inflation de 2% sur un an, à approcher le plus rapidement possible. Le nouveau Premier ministre, Shinzo Abe, a fait de cette question l'un des principaux enjeux de son nouveau mandat entamé le 26 décembre. En 2012, la baisse est imputable à la chute des tarifs des téléviseurs, ordinateurs et autres équipements électroniques de loisir sur lesquels se joue une féroce concurrence entre fabricants et entre détaillants. Ce combat entraîne une incessante guerre des prix pour attirer le client peu enclin à acheter, guerre qui existe aussi sur les réfrigérateurs et autres appareils électroménagers. En revanche, la hausse des prix des transports et de l'énergie a contribué à redresser la barre. Le Japon est englué depuis une quinzaine d'années dans une déflation chronique, avec une période de rémission entre 2006 et 2009, un phénomène pernicieux qui ralentit l'activité économique. Le rythme du repli avait atteint jusqu'à 2,4% sur un an en août 2009. En excluant non seulement l'alimentation (sans les boissons alcoolisées), mais aussi l'énergie, les prix à la consommation ont reculé de 0,6% en décembre par rapport à ceux du même mois de 2011, a précisé le ministère. Ces données prouvent à nouveau que le recul des prix des produits du commerce est fort mais atténué dans les statistiques d'ensemble par la cherté du gaz de ville (+1,4%), de l'essence (+2,8%) ou encore du gaz propane (+3,4%) ainsi que de l'électricité (+4,4%) à cause des coûts d'approvisionnement en carburant de centrales thermiques qui tournent à plein régime pour remplacer les réacteurs nucléaires. Les prix au détail ont en revanche continué de chuter en décembre pour de nombreux produits électroménagers et électroniques grand public. L'indice des prix à la consommation dans la région de Tokyo, considéré comme un indicateur avancé de l'évolution des prix dans le reste du Japon, a régressé de son côté de 0,2% en janvier sur un an, hors produits périssables, a précisé le ministère. Déficit commercial record en 2012 Le Japon a enduré un déficit commercial record en 2012, son premier solde négatif annuel vis-à-vis de l'Union Européenne et le pire jamais atteint avec la Chine, une situation grave qui conforte l'action du Premier ministre Shinzo Abe, mais risque aussi de lui donner du fil à retordre. A cause d'une piètre conjoncture économique internationale, d'un yen enflammé et de frictions diplomatiques avec l'Empire du Milieu, le Japon, habitué à afficher des excédents presque insolents, s'est enlisé pour la deuxième année de suite dans le rouge. Cette fois son déficit commercial a presque triplé à 6 927,3 milliards de yens (58 milliards d'euros) par rapport à celui, déjà exceptionnel, de la catastrophique année 2011, saccagée par le séisme, le tsunami et l'accident nucléaire du 11 mars. Ce fait inédit est dû à la chute des exportations (malmenées par la crise d'endettement en Europe, la cherté du yen et la décélération de l'activité mondiale), et à une facture énergétique gonflée par les importations de gaz et autres carburants compensant l'arrêt quasi total des 50 réacteurs nucléaires de l'archipel. "Les perspectives d'un retour dans le vert des comptes commerciaux japonais restent des plus incertaines", prévient Jun Kawakami de Mizuho Securities. Selon lui, le récent affaiblissement du yen face au dollar ne corrigera pas dans l'immédiat le déséquilibre de la balance commerciale du Japon, même s'il est de nature à stimuler les exportations. "Un recul de la devise prend habituellement environ six mois pour avoir un effet notable, et toute embellie réelle des exportations va avoir lieu non pas par des mouvements de devises, mais par une amélioration fondamentale de l'économie mondiale", ajoute M. Kawakami dans un entretien avec Dow Jones Newswires. Du coup, on comprend mieux la priorité affichée d'emblée par le Premier ministre Shinzo Abe: redresser l'économie en misant d'abord sur la relance intérieure par des dispositions budgétaires et en forçant la main de la banque centrale pour qu'elle ouvre encore davantage les vannes monétaires afin de combattre la déflation lancinante et d'affaiblir le yen. Les chiffres publiés renforcent aussi la conviction de M. Abe, que les sociétés nippones manquent de compétitivité et d'inventivité. Enfin ces mauvaises statistiques fortifient la volonté du pro-nucléaire de redémarrer dès que possible des réacteurs atomiques jugés sûrs, afin de réduire les ruineuses importations énergétiques. Au cours de l'année dernière, les importations ont progressé de 3,8% en valeur (+2,1% en volume) à 70 672 milliards de yens (603 milliards d'euros), dopées par les achats de gaz et pétrole ainsi que par les arrivages de téléphones portables assemblés à l'étranger, par souci de coûts. Les exportations annuelles, elles, ont diminué de 2,7% en valeur (-4,5% en volume) à 63 744,6 milliards de yens (545 milliards de yens), malgré un rebond des ventes de véhicules, à cause de moindres expéditions vers l'Europe et vers la Chine. 2012 aura aussi été marquée pour le Japon par son premier déficit commercial annuel avec l'Union Européenne (UE), certes peu important (1,25 milliard d'euros) mais symptomatique. En cause principalement, une chute des exportations d'automobiles et pièces connexes ainsi que de composants électroniques et équipements scientifiques, alors que parallèlement, l'archipel a importé de pays du Vieux continent plus de médicaments, de voitures et acheté des avions. Avec la Chine, le Japon a enregistré son plus important déficit historique, avec un solde négatif qui a plus que doublé à 3 521,3 milliards (30 milliards d'euros) à cause du ralentissement économique et de frictions diplomatiques sino-japonaises au sujet d'îles de mer de Chine orientale partiellement nationalisées par le Japon mais revendiquées par Pékin.