Les négociations en vue de créer (sans Washington) une immense zone de libre-échange en Asie-Pacifique, censée couvrir la moitié de la population mondiale, devraient s'ouvrir en mai à Brunei. Seize pays (dont la Chine et le Japon) souhaitent signer un "partenariat économique intégral régional" (RCEP), potentiellement la plus importante zone de libre-échange au monde, hors l'Organisation mondiale du commerce. Outre la Chine et le Japon, le RCEP réunirait l'Association des nations d'Asie du sud-est (Asean: Bruneï, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Birmanie, Philippines, Singapour, Thaïlande et Vietnam), la Corée du Sud, l'Inde, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Soit, sur le papier, un marché unique de 3,5 milliards d'habitants au produit intérieur brut de 23 000 milliards de dollars, un tiers du PIB mondial. Et une zone qui réduirait la dépendance des pays membres par rapport aux économies occidentales en crise. "Nous nous réjouissons d'élargir et d'approfondir les (accords de libre-échange) existants et nous concevons le RCEP comme une plateforme pour le commerce et l'intégration des investissements en Asie et le reste du monde", affirme le projet de déclaration d'une réunion de l'Asean qui se tient jeudi et vendredi à Brunei. Les pays concernés devront toutefois surmonter leurs nombreuses querelles territoriales. Le Japon et la Chine s'opposent à propos d'un archipel en mer de Chine orientale, tandis que Tokyo et Séoul se disputent des îlots isolés entre leurs deux pays. Pékin et Hanoï se disputent les Spratleys et les Paracels, archipels supposés être riches en hydrocarbures. Et les Spratleys sont aussi revendiquées notamment par les Philippines. Ce projet de RCEP, lancé l'an dernier à Phnom Penh, ferait contrepoids à celui que défend Washington. Les Etats-Unis ont en effet lancé, avec le Japon mais sans la Chine, des négociations pour l'Accord commercial trans-Pacifique (TPP) impliquant également Australie, Brunei, Chili, Canada, Etats-Unis, Malaisie, Mexique, Nouvelle-Zélande, Pérou, Singapour, Vietnam, soit 40% du PIB mondial.