Des milliers de manifestants ont demandé lundi à Sofia, pour le quatrième jour consécutif, le départ du Premier ministre bulgare Plamen Orecharski, soutenu par les socialistes, qui avait mis en garde plus tôt dans la journée contre une nouvelle impasse politique s'il venait à démissionner. Plus de 7 000 personnes se sont réunies dans la capitale, scandant “Démission et Pourriture rouge” devant le siège du gouvernement à Sofia, bloquant la circulation sur des grandes avenues du centre-ville. “Une démission ne résoudrait rien. Soyons réalistes. Nous aurions un cabinet intérimaire pendant plusieurs mois et de nouvelles élections qui recréeraient la même situation politique ou bien une situation similaire”, a déclaré plus tôt M. Orecharski, économiste sans étiquette politique en place depuis fin mai, dans un entretien à la télévision privée bTV. Et pendant ce temps-là, il y a plusieurs secteurs sur le point de s'effondrer, a-t-il dit, citant l'énergie et le système de santé. Dimanche déjà à Sofia, plus de 15 000 manifestants avaient reproché au gouvernement d'obéir à l'oligarchie et avaient réclamé la démission de M. Orecharski. La mobilisation rappelle celle de cet hiver, quand les Bulgares étaient descendus dans la rue pour protester contre l'électricité chère, la pauvreté et la corruption. Le précédent gouvernement conservateur de Boïko Borissov avait fini par démissionner, entraînant la tenue d'élections législatives anticipées le 12 mai. “Nous ne cherchons pas à chasser les socialistes pour que le (parti conservateur) Gerb revienne. Ce sont tous les mêmes, contrôlés par les oligarques et la mafia”, a expliqué lors de la manifestation Ekaterina Boïanova, une institutrice de 37 ans. Si les manifestations de l'hiver étaient portées par la classe populaire, la nouvelle vague de protestation voit participer plus de personnalités et des personnes issues de la classe moyenne, qui demandent notamment une évolution des règles électorales afin de favoriser le renouvellement des élites politiques. “Nous devons trouver un moyen de laisser entrer de nouveaux petits partis au Parlement”, a déclaré lundi Biser Ivanov, un entrepreneur âgé d'une quarantaine d'années. “Ces manifestations sont catégoriques, elles ont une raison claire et les hommes politiques doivent changer leur approche”, a estimé lundi le président bulgare Rossen Plevneliev. La nomination hâtive vendredi à la tête de l'Agence nationale de sécurité (DANS) d'un jeune député controversé de 32 ans, Delyan Peevski, issu du parti de la minorité musulmane turque (MDL), avait mis le feu aux poudres. Delyan Peevski, sans expérience mais lié à un grand groupe de médias et à une banque, a renoncé entre-temps à la fonction. M. Orecharski, lui, a reconnu que sa nomination constituait une erreur. Mais cela n'a pas suffi à apaiser les tensions dans la société et la classe politique du pays le plus pauvre de l'Union européenne. “Je suis conscient du fait que le gouvernement a perdu une part de sa légitimité. Mais si je démissionne maintenant, il n'y aura aucune légitimité de quelque sorte que ce soit. C'est dangereux”, a fait valoir M. Orecharski. Si les socialistes et leur partenaire au Parlement, le MDL, retiraient leur soutien, alors le gouvernement devra démissionner”, a-t-il ajouté. Le cabinet de Plamen Orecharski est ouvertement soutenu par 120 députés socialistes et du MDL sur 240 au total, et tacitement appuyé par les ultra-nationalistes d'Ataka.