Conséquence directe après plusieurs mois de resserrement des contrôles, la population de l'extrême ouest de l'Algérie commence à vivre une relative normalisation au niveau des secteurs de la distribution des énergies fossiles. Ainsi, les mesures prises par les pouvoirs publics pour lutter contre le fléau de la contrebande commencent à porter leurs fruits sur le terrain. Dans les zones frontalières de la wilaya de Tlemcen, l'étau se resserre sur les trafiquants de tout acabit. De l'avis de tous, la situation a nettement changé et les temps sont devenus très durs pour les ''hallaba''. Ces mesures prises pour lutter contre le trafic de carburant, véritable saignée pour l'économie nationale et facteur de déstabilisation socioéconomique de cette région frontalière, constituent le sujet d'actualité dans cette zone ayant longtemps souffert de ce fléau. L'APS, qui a réalisé un reportage sur le fléau, s'est approchée de nombreux habitants des localités de Bab El Assa et de Maghnia, ces derniers ont estimé que les différentes décisions prises dans le sens de la lutte contre ce trafic, comme le plafonnement des approvisionnements en carburant au niveau des stations-service ou encore les mesures opérationnelles prises par les services des GGF au niveau des frontières, ont eu pour conséquence la diminution notable de ce trafic, devenu désormais source de tous genres de risque et de danger pour ceux qui le pratiquent. Dans ce sens, le lieutenant-colonel Mohamed Boualègue, commandant du groupement de la Gendarmerie de la wilaya de Tlemcen, a confirmé cette baisse de l'activité des trafiquants, ''conséquence des mesures visant à réprimer les auteurs de ces délits et des actions de sensibilisation et du travail de proximité menés avec la collaboration des notables et des représentants de la société civile des régions concernées''. Cette amélioration de la situation a été également le fruit d'une coordination étroite et tactique entre les brigades territoriales de wilaya et les sections de recherche, de sécurité et d'intervention ainsi qu'avec les unités des GGF. Evoquant les mesures répressives, le lieutenant-colonel Boualègue a expliqué que les différentes unités de la Gendarmerie nationale ont, dès le 18 juillet dernier, date de l'entrée en vigueur du plafonnement des quantités de carburant vendues au niveau des stations de service, intensifié les contrôles au niveau des frontières et en multipliant les patrouilles. Les propriétaires de véhicules légers sont autorisés à s'approvisionner en carburant à hauteur de 500 DA, alors que le plafond fixé pour les poids lourds est de 2.000 DA, rappelle-t-on. A partir de cette date, des plans tactiques ont été élaborés pour contrecarrer les trafiquants qui adoptent des méthodes différentes et tirent profit de la topographie difficile et complexe de la région. Pour échapper à l'étau imposé par les éléments de la Gendarmerie nationale, les ''hallaba'' optent pour des points de passage proches des zones d'habitation, situées près des frontières. D'autres trafiquants procèdent à la construction de réservoirs à l'intérieur de leurs maisons pour stocker le carburant. Ce produit est acheminé par des voitures ou des camions pouvant transporter jusqu'à 1.200 litres. Les conducteurs de ces voitures et camions s'approvisionnent au niveau des différentes stations de la wilaya. Une fois les réservoirs remplis, ils se dirigent vers les habitations disposant de citernes pour livrer le carburant avant de répéter la même opération plusieurs fois par jour. C'est au tour des contrebandiers d'entrer en scène. Ils choisissent le moment opportun pour ''livrer'' le carburant au pays voisin, distant, trop souvent de quelques dizaines de mètres seulement. Le précieux liquide est acheminé soit par des passeurs soit à dos d'ânes. Chaque baudet peut transporter entre 6 et 10 jerricans de 30 litres chacun. Le commandant du groupement de la GN de la wilaya de Tlemcen a révélé que la lutte implacable contre ce fléau se poursuit avec fermeté car des réseaux de trafiquants œuvrent à inonder le territoire national de toutes sortes de drogues et boissons alcoolisées. Pour exercer une pression encore plus grande sur les trafiquants, des tranchées et fosses sont creusées, ces derniers temps, le long de la bande frontalière, notamment près des zones propices au passage des contrebandiers. Le lieutenant-colonel Abdelwahab Benaffia, commandant du 19e groupement des GGF, situé à Bab El Assa, a estimé que la construction de ces tranchées et des autres obstacles ont permis de mieux maîtriser la surveillance et le contrôle de la bande frontalière, marquée par la diversité et la complexité de sa topographie. Ces mesures ont permis de réduire d'une manière notable toutes sortes de trafics notamment ceux touchant le bétail, le cuivre et les denrées alimentaires dont les prix sont soutenus par les pouvoirs publics. Par ricochet, elles ont également sévèrement frappé de plein fouet les narcotrafiquants, les trafiquants de véhicules et autres activités néfastes pour la société et l'économie algériennes. Une partie de la bande frontalière relevant de la zone d'intervention du 19e groupement des GGF est considérée comme le lieu de passage le plus fréquenté par les trafiquants de carburant eu égard à la proximité de certaines localités algériennes avec leurs voisines marocaines comme El Djorf et El gorni, proches d'Ahfir, Beni Drar et Saïdiya, au Maroc. D'autre part, pour assurer un suivi de l'état de mise en oeuvre de ce dispositif anti-trafic de carburant, une action de contrôle des stations de service est menée par les services de sécurité dont la Gendarmerie nationale. C'est ainsi que 4 stations de la région de Tlemcen ont été fermées, ces derniers temps, par décision administrative, pour non-respect des mesures de plafonnement et complicité de leurs propriétaires avec les ''hallaba'' en les approvisionnant en quantités de carburant supérieures à celles prévues par l'arrêté de l'ex-wali de Tlemcen. Ces derniers temps, il a été également constaté ''l'absence'' remarquée au niveau des stations d'essence de véhicules de type ''Renault 21'' et ''Renault 25'', utilisés par les trafiquants. Ces voitures sont minutieusement contrôlées par les ingénieurs des mines qui vérifient si les réservoirs n'ont pas été modifiés pour contenir plus d'essence ou si un deuxième réservoir n'a pas été illégalement installé. Les données statistiques disponibles au niveau du Groupement de wilaya de la Gendarmerie nationale indiquent que depuis juillet dernier, 574 véhicules utilisés par les trafiquants ont été mis à la fourrière communale et 117 autres voitures ont été saisies après que les enquêteurs aient constaté que leurs réservoirs ont été transformés pour contenir une plus grande quantité de carburant. Par ailleurs, 136 trafiquants ont été arrêtés dont 103 ont été placés sous mandat de dépôt. Les mêmes données chiffrées montrent une baisse du trafic de carburant puisque les quantités saisies, cette année dans la wilaya de Tlemcen, étaient de l'ordre de 380.702 litres de mazout et 20.088 litres d'essence contre 611.000 litres de mazout en 2011 et 680.000 litres en 2010. La lutte contre le trafic de carburant a impliqué, outre les services de sécurité concernés, les notables, les imams et les représentants de la société civile des régions frontalières qui ont joué un rôle non négligeable dans la sensibilisation sur les effets négatifs de ce fléau sur la vie quotidienne du citoyen. ''Nous avons longtemps souffert de l'indisponibilité de carburant au niveau des stations d'essence. Nous étions contraints de se déplacer d'un lieu à un autre à la recherche de quelques litres d'essence nous permettant de nous servir de nos véhicules'', a confié Hadj Ahmed, de la localité de Souani, relevant de la daïra de Bab El Assa. ''S'approvisionner en carburant était pour nous une véritable expédition. Nous étions contraints de subir le diktat des gérants des stations d'essence qui privilégient les trafiquants. Nous étions humiliés devant ces hallaba arrogants et qui se croyaient intouchables'', ajoute encore Hadj Ahmed. Ce moudjahid s'est félicité des mesures prises pour éradiquer ce fléau. ''Ces mesures commencent à porter leurs fruits puisque de nombreux jeunes de la région sont revenus à des activités faisant la réputation de cette région, comme la sculpture sur plâtre et la pose de la faïence'', a ajouté le même citoyen. De nombreux ''hallaba'' ont renoncé à leur activité illégale pour reprendre le travail de la terre. L'agriculture commence à renaître dans ces régions comme le montrent les grandes surfaces aujourd'hui emblavées. Un retour à la normale, souligne-t-on sur place. Depuis quelques jours, les autorités du pays ont donc haussé le ton et pris des mesures coercitives visant à empêcher les contrebandiers d'écumer les stations-service comme ils l'ont fait en toute impunité depuis assez longtemps et, partant, de protéger l'économie nationale contre ce fléau qui s'est développé rapidement ces derniers temps.